27 mars 2016

Il y a treize ans: En souvenir de Maître Mahmoud Khelili



mahmoud khelili


En souvenir de Maître Mahmoud Khelili


Il y a treize ans,
Maître Mahmoud Khelili, grande figure du barreau d’Alger, est décédé à l’âge de 68 ans. L’avocat est mort d’une crise cardiaque, alors qu’il venait d’arriver à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, en région parisienne, en provenance d’Alger.

Ancien officier de l’ALN pendant la guerre d’indépendance de l’Algérie, Maître Khelili avait assuré la fonction de commissaire de police à El-Harrach juste après l’Indépendance. Devant les transgressions caractérisées aux droits les plus élémentaires de la personne humaine dont il était le témoin direct, il démissionne. Il sera arrêté et sauvagement torturé pour avoir refusé d’exécuter les ordres d’un obscur patron de la sécurité militaire à l’époque, qui lui avait ramené un prisonnier en le sommant de le faire passer à tabac. Son refus d’exécuter une tâche aussi infamante lui a coûté de se voir couper une oreille. Depuis, il s’est juré de se mettre, sa vie durant, au service de la défense des droits humains.
Manaï Ahmed
Jeudi, 6 Mars 2008
Oraison funèbre de Maître Mahmoud Khelili
Allahou Akbar… Allahou Akbar… Allahou Akbar.
Bismillahi Arrahmani Arrahim
« Très certainement. Nous vous éprouverons par un peu de peur, de faim et de diminution de biens, de personnes et de fruits. Et fais la bonne annonce aux endurants qui disent, quand un malheur les atteint :
Certes nous sommes à Allah et c’est à Lui que nous retournerons ». Le Saint Coran.
Grand frère Mahmoud
Ainsi tu nous abandonnes et tu nous quittes si vite, à un moment où nous t’attendions tous et que nous avions tant besoin de toi !
Nous t’attendions avec impatience pour t’entretenir du seul sujet qui t’importe vraiment depuis de nombreuses années, mais voilà que tu as préféré à notre rencontre, celle de ton Créateur. Mais tu as bien raison, qui donc pourrait refuser Son appel. Tu nous précèdes dans cette voie et nous te rejoindrons tous.
Nous sommes ici quelques uns de tes amis, de tes collègues et de tes admirateurs, rassemblés à la hâte dans ce pays d’exil pour te rendre hommage et te faire un dernier adieu.
Dans quelques heures, tu seras reçu comme tu le mérites par la foule de tes amis, de tes collègues et de tes admirateurs, sur le sol de ton pays auquel tu as tout donné. Eux sauront te faire l’accueil dont tu es digne, te rendre l’hommage que tu mérites, t’accompagner jusqu’à ta dernière demeure et te confier à cette terre que tu as tant aimée.
Allahou Akbar… Allahou Akbar… Allahou Akbar.
Grand frère Mahmoud !
C’est avec une immense tristesse que nous te faisons nos adieux, mais nous savons que quelque part, une foule de gens, attend ton arrivée avec impatience et qu’elle va t’accueillir avec des chants, dans la joie et l’allégresse.
Ce sont les milliers de disparus, enlevés par les despotes, auxquels tu as consacré les meilleures années de ta vie, dépensé des trésors d’ingéniosité, d’intelligence, de patience et de courage pour mettre des noms sur leurs cadavres et leur éviter de mourir deux fois.
Des milliers de disparus, leurs nombreuses familles et d’autres plus nombreux encore, témoigneront devant Le Tout Puissant que ta vie n’a pas été pas été vaine et en pure perte et qu’elle fut au contraire faite d’effort continu, de travail acharné, de don de soi et de générosité pour que cesse l’injustice et qu’enfin justice soit faite !
Mahmoud, Noble Chevalier !
C’est avec des cœurs lourds et attristés que nous te faisons nos derniers adieux. Ton départ nous prive d’un très cher ami mais aussi d’un vénérable maître.
Tu nous a appris, ainsi qu’à toute une génération, par tes convictions profondes, la sincérité de ton combat et ton témoignage quotidien, le véritable sens de la vie. Tu nous as appris notamment que la vie n’a point de sens, ni de goût ni d’odeur, si elle n’était consacrée au service désintéressé de l’humanité et surtout des gens les plus démunis et si elle ne visait à consacrer les idéaux sans lesquels l’existence n’a plus de sens.
Mahmoud, mon ami !
Ta réputation nous est parvenue dans notre exil au début des années quatre vingt dix avec les premiers signes du drame qui continue encore à endeuiller la vie des algériens. Nous avons reconnu très vite en toi un noble et preux chevalier, qui, enfourchant pour simple monture la loi, surgît au secours des humiliés, des laissés pour compte, des victimes de l’iniquité et de la Hogra ainsi que de leurs familles, pour redresser les torts, faire la vérité et consacrer le règne de la justice sans laquelle on ne peut concevoir de société humaine viable.
Pendant des années, nous parvenaient les échos de ton combat Antarien avec les juges, les procureurs, la police et les services …et nous avions peur pour toi.
Pendant des années, nous parvenaient aussi les échos de vos plaidoiries devant les diverses juridictions, civiles et militaires, normales et exceptionnelles, mais toutes drapées dans la même iniquité…et cela augmentait notre inquiétude mais nous rendait encore plus admiratifs.
Pendant des années enfin, nous parvenaient tes attaques ciblées contre les véritables responsables du drame algérien et ceux qui l’ont alimenté pour mieux en profiter…et cela nous emplissait d’angoisse.
Tu étais, pour moi et pour tous ceux qui ne t’avaient pas encore connu directement, une espèce de taureau en furie, qui, au moindre geste, bondit sur l’ennemi pour le terrasser à l’aide de ses cornes faites de codes de la loi.
Quelle fût ma surprise quand je t’ai rencontré pour la première fois il y a six ans, de découvrir en toi, en lieu et place du taureau en furie, un superbe et fier lion n’inspirant que sérénité et sagesse. Tu m’a conquis par ton immense douceur, ta grande sensibilité et ta capacité d’écoute, ce qui constitue sans doute le caractère d’un homme sûr de lui.
Allahou Akbar… Allahou Akbar… Allahou Akbar.
Grand frère Mahmoud,
Je serais bien incapable d’énumérer toutes tes qualités et encore moins tes bonnes actions. Mais n’aies pas crainte, elles sont toutes consignées dans un Livre, tenu soigneusement par Le Meilleur Comptable.
Nous te disons Adieu grand frère et nous te faisons la promesse sincère des véritables croyants, que, tant que nous vivrons, nous cultiverons ton souvenir et nous resterons fidèles à la voie que tu nous as tracée. Nous défendrons les humiliés, les Moustadafines et toutes les victimes du despotisme à une époque où ce dernier, plus arrogant que jamais, semble se généraliser aux dimensions de la planète.
Mahmoud !
« Ô toi, âme apaisée, retourne vers ton Seigneur, satisfaite et agréée, entre donc parmi Mes serviteurs et entre dans Mon paradis ». Le saint Coran.
Suit une prière.
Ahmed Manaï
06 mars 2003
Traduit de l’arabe

بسم الله الرحمان الرحيم

وَلَنَبْلُوَنَّكُمْ بِشَيْءٍ مِّنَ الْخَوفْ وَالْجُوعِ وَنَقْصٍ مِّنَ الأَمَوَالِ وَالأنفُسِ وَالثَّمَرَاتِ وَبَشِّرِ الصَّابِرِينَ الَّذِينَ إِذَا أَصَابَتْهُم مُّصِيبَةٌ قَالُواْ إِنَّا لِلّهِ وَإِنَّا إِلَيْهِ رَاجِعونَ أُولَئِكَ عَلَيْهِمْ صَلَوَاتٌ مِّن رَّبِّهِمْ وَرَحْمَةٌ وَأُولَئِكَ هُمُ الْمُهْتَدُون سورة البقرة ( 155, 156, 157)

صدق الله العظيم

الله أكبر… الله أكبر…الله أكبر

محمود، أيّها الأخ الأكبر.

كنا ننتظر لقاءك و تجاذب الحديث معك فيما هو شغلك الشاغل منذ أكثر من عشر سنوات. لكنّك خيّرت لقاء ربك على لقاءنا، و من ذا الذي لا يستجيب لندائه؟ فأنت السابق و نحن اللاّحقون.

ها نحن جمع قليل من أصدقاءك و أحباءك و زملاءك و مريديك، تجمّعنا على عجل في المَهاجر لتوديعك الوداع الأخير.

بعد ساعات قليلة، تستقبلك الجموع الغفيرة من الأصدقاء و الأحباء و المريدين على أرض الوطن الذي نذرت حياتك لخدمته، تُوَدِّعُك هي الأخرى الوداع الأخير و تُودِعُك ثراء الأرض التي أحببتها حد العشق.

الله أكبر… الله أكبر…الله أكبر

محمود، أيّها الأخ العزيز.

نحن نُوَدّعُك بكل ألم و حسرة و لكننا نعلم أن هناك من سيحتفل بقدومك و يستقبلك بالفرحة العارمة و الأهازيج. إنُهم آلاف المفقودين الذين اختطفتهم أيادي الجبابرة و كرّست أنت السنين العديدة من حياتك لوضع أسماء على رفاتهم و دفعت من الخبرة المهنية و الذكاء و الصبر و الشجاعة الشيء الكثير، لكي لا يموتوا ميتتين.

إنٌ آلاف المفقودين و أهاليهم و أكثر منهم، سيشهدون لك أمام الله بأن حياتك لم تكن عبثا، و إنٌما حياة بذل و عطاء و جهد مستميت لكي يحق الحق و يزهق الباطل…إنٌ الباطل كان زهوقا.

محمود، أيّها الفارس المِغوار.

إنٌا نُوَدّعك بكل حُزن و أسى، و نُوَدّع فيك الصّديق الودود و الأستاذ الكريم، الذي علٌمنا و علٌم الأجيال عبر مسيرة طويلة حافلة، معنى الحياة الحَقّة و كُنه الوجود. لقد علّمتنا بالخصوص بأنه لا معنى للحياة و لا طعم و لا مذاق، إن لم تكن حياة بذل وعطاء من أجل الناس جميعا و بالأخصّ من أجل أكثرهم حاجة للعَون و المساعدة و المساندة، و كل ذلك في سبيل المُثل التي لا يمكن للحياة أن تستقيم بدونها.

الله أكبر… الله أكبر…الله أكبر

لقد عرفناك أيّها الأخ الأكبر بالسّماع مند أوّل التسعينات، مع ظهور العلامات الأولى للمأساة التي لا تزال تخيّم على حياة الناس في الجزائر.

عرفناك فا رسا مغوارا يمتطي جواد القانون للدفاع عن المظلومين و المحرومين و المحقورين و المستضعفين و ضحايا القمع و عائلاتهم، و من أجل حَصحصة الحق و تكريس العدل الذي لا يستقيم عمران بشري بدونه.

كانت تصلنا بانتظام أصداء مرافعاتك لدى المحاكم العادية و الاستثنائية المدنية و العسكرية، و كلها تساوت في ظلمها. و كانت تبلغنا أخبار صراعاتك اليومية و ملاحمك العنترية مع القضاة و رجال النيابة و أعوان الأمن و العساكر كما كان ينتهي إلى مسامعنا، وقع هجوماتك الكاسحة على من تسبب في مأساة الجزائر و غذّاها ليُحسن له التمعّش منها…و كان كل ذلك يملأ قلوبنا خوفا على حياتك. و خلتك شخصيا و خالك كل الذين لم يسبق لهم التعرف عليك، أنك ثور هائج تسلح بالقانون، لا ينتظر إلا إشارة للانقضاض على الخصم.

و لكم كانت دهشتي يوم التقيت بك منذ ست سنوات و اكتشفت فيك لا شيء أخر سوى أسدا أغلبا لم يغلبه إلا هدوءه. لكم فاجأني لطفك و عذوبة لسانك و رقة إحساسك و ميلك إلى الإصغاء، و هي لعمري من شِيَم الرجال الواثقين بأنفسهم.

الله أكبر… الله أكبر…الله أكبر

محمود أيّها الأخ الأكبر.

يعجز لساني عن ذكر مناقبك و أعمالك، لكنّك ستجدها محصية في كتاب أمين

نُوَدّعُك أيّها الأخ العزيز و نعِدك وعد المؤمنين الصادقين، بأننا سنحفظ وِدِّك و ذِكراك ما حيينا و بأننا سنواصل على دَربك في الدفاع عن المظلومين و المحقورين و كل ضحايا الاستبداد في عصر عمّ فيه الاستبداد و الظلم الصارخ و الغطرسة كامل بلاد المعمورة.

يَا أَيَّتُهَا النَّفْسُ الْمُطْمَئِنَّةُ ارْجِعِي إِلَى رَبِّكِ رَاضِيَةً مَّرْضِيَّةً فَادْخُلِي فِي عِبَادِي وَادْخُلِي جَنَّتِي ( سورة الفجر27، 28، 29، 30)

صدق الله العظيم

احمد المناعي
باريس، 2003 -06 مارس



http://www.hoggar.org/index.php?option=com_content&view=article&id=449:maitre-mahmoud-khelili&catid=63:manai-ahmed&Itemid=36/


IL EST DECEDE, JEUDI, D’UNE CRISE CARDIAQUE A PARIS
Me Khellili, un avocat courageux
L’avocat, 68 ans, s’effondré alors qu’il venait d’arriver à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, en provenance d’Alger.
Me Mahmoud Khellili, grande figure du barreau d’Alger, est décédé, jeudi dernier, à l’âge de 68 ans. L’avocat est mort d’une crise cardiaque, alors qu’il venait d’arriver à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, en région parisienne, en provenance d’Alger. “Accompagné de sa femme, Me Khellili avait été pris de vertiges en quittant l’avion, mais avait continué à marcher. Il s’est ensuite effondré dans l’aérogare de Roissy, foudroyé par un arrêt cardio-respiratoire”, indique une dépêche de l’AFP. La même dépêche ajoute que le corps du défunt a été, tout de suite, transporté à la chambre funéraire de Gonesse (Val-d’Oise, région parisienne) “où s’est rendue une délégation de l’ambassade d’Algérie à Paris”.
Me Khellili s’est toujours distingué par son engagement sans réserve sur des questions sensibles engendrées par la décennie noire, et notamment celle des droits de l’Homme. Il s’est ainsi voué, durant cette décennie de toutes les bavures, à la défense des activistes islamistes lors de procès qui feront date. Celui qu’on surnommait “l’avocat du FIS” pour avoir figuré dans le collectif d’avocats constitués pour défendre les chouyoukh en 1991, était, de fait, engagé avec détermination pour faire reconnaître leurs droits aux prisonniers d’opinion, quelle que soit leur couleur politique. Ces dernières années, il s’était impliqué, corps et âme, aux côtés des familles des disparus.
Avant de faire le métier d’avocat, Me Khellili avait assuré la fonction de commissaire de police à El-Harrach juste après l’Indépendance. Devant les transgressions caractérisées aux droits les plus élémentaires de la personne humaine dont il était le témoin direct, il démissionne. Il sera arrêté et sauvagement torturé pour avoir refusé d’exécuter les ordres d’un obscur patron de la sécurité militaire à l’époque, qui lui avait ramené un prisonnier en le sommant de le faire passer à tabac. Son refus d’exécuter une tâche aussi infâmante lui a coûté de se voir couper une oreille. Depuis, il s’est juré de se mettre, sa vie durant, au service de la défense des droits humains.
Un de ses farouches adversaires, Me Khaled Bourayou, qui n’est pas connu pour partager les opinions du défunt, n’a pas manqué, pour autant, de lui rendre ce vibrant hommage : “Me Khellili était un brillant avocat. Il a le mérite d’avoir grandement contribué à renforcer les droits de la défense. C’était un homme intègre et courageux. Il avait le courage de ses idées”.
http://www.liberte-algerie.com/actualite/me-khellili-un-avocat-courageux-3780/

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