19 novembre 2014

Michael Warschawski
 
Monsieur l’Ambassadeur et Docteur Barnavi

Mon grand pere avait l’habitude de dire qu’il ne faut jamais desesperer de l’intelligence humaine et que les yeux qui semblent definitivement fermes peuvent un jour se deciller. Cette réflexion, banale s’il en est, m’est revenue a l’esprit en lisant il y a quelques jours l’interview qu’a donne a l’Humanité l’ancien Ambassadeur d’Israël a Paris, Elie Barnavi.
A l’epoque ou il était ambassadeur, j’ai eu souvent l’occasion de polemiquer avec ses propos, en particulier en 2002, alors qu’il defendait bec et ongle la repression sanglante menee par Ariel Sharon contre la resistance palestinienne.
Un des objets de notre polemique était la necessite de pressions exterieures pour faire reculer Israel. Alors que les Palestiniens et le mouvement de solidarite exigeaient des sanctions de la part de la communaute internationale, l’argument des agents de propagande d’Israel, ambassadeurs en tete, était : « des pressions exterieures ne feront que durcir l’opinion publique israelienne ; laissez faire la societe israelienne et qu’elle decide democratiquement du chemin a suivre. »
Douze ans plus tard voici ce que dit l’ex-ambassadeur au journaliste de l’Humanite : « Aucun sursaut ne viendra des Israeliens eux-meme » et d’ajouter : « sans une pression politique exterieure tres forte, il n’y aura pas de paix dans cette region du monde. » I rest my case, dirait Perry Mason…
Plus interressant encore est le bilan que tire Elie Barnavi du processus d’Oslo, reprenant presque mot a mot ce que disaient ceux qu’il accusait alors d’etre des gauchistes impuissants : « Cet echec [d’Oslo] était inevitable. Tout ce processus était mal fichu, cet accord était cousu de non-dits, de questions en suspens… Sans contrôle international, sans arbitre, le devenir de ce processus était suspendu a la bonne volonte des parties. » L’ancien ambassadeur va meme plus loin quand il declare que « Yasser Arafat n’aurait jamais du accepter d’entrer dans ce processus, de venir a Gaza, alors que la colonisation se poursuivait. » C’est exactement ce que disaient « les gauchistes », mais en temps reel, pas vingt ans plus tard.
Interroge sur son appel aux parlementaires europeens a reconnaitre maintenant l’Etat Palestinien, Barnavi explique que l’existence formelle d’un Etat Palestinien, ferait qu’ « Israel serait reconnu comme occupant le territoire d’un Etat souverain. » On aurait presque envie de demander au Docteur Barnavi, si une telle souverainete autoriserait a ses yeux le President Mahmoud Abbas a appeler a l’aide des armees arabes voire iranienne, mais il ne faut pas en demander…
Il y a quand meme une limite que l’ancien ambassadeur a Paris n’est pas prêt a franchir : l’union nationale palestinienne. Non seulement il ne mentionne pas cet acquis important pour le peuple palestinien – si important qu’il a pousse Netanyahou a se lancer dans la criminelle et desastreuse attaque contre Gaza – mais il dit : « un fosse de haine et d’incomprehension separe l’Autorite Palestinienne et le Hamas ». Et pourtant ce gouvernement d’union est en train de se mettre en place, malgre la haine et la mecomprehension ».
J’ai debute ce blog par une phrase de mon grand père, je le termine par le dicton rabbinique qui dit : « La ou se tient un repentant, meme le plus grand des justes n’a pas sa place. » Bravo Elie Barnavi pour cette remise en question.

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