Et
Nour fut…
L’incompréhension
d’un bébé
Je m’appelle Nour1 et ma
maman me disait souvent que je suis un enfant de Palestine.
Jeté dans une cellule en compagnie de
ma mère, je ne comprenais pas ce que signifiait la Palestine. Je
sentais et vivais les souffrances de ma mère et à ses pleurs
quotidiens.
A cet endroit sombre où la peur
m’envahissait souvent, elle m’avait donné le nom de
« Nour ».
Elle me répétait souvent cette phrase
que je ne comprenais pas : « Tu vois mon petit,
l’ennemi m’avait arrêtée alors que j’étais enceinte de
quelques mois. L’occupant m’a alors placée dans cette cellule de
la prison de Neve Tirza, comme tant d’autres femmes
palestiniennes ».
Ennemi, occupant, être enceinte,
prison,…des mots étranges qui me revenaient souvent et que je ne
comprenais pas.
Un jour, en fin d’une courte
promenade, elles n’ont pas voulu regagner les cellules ; elles
sont restées ensembles dans la petite cour.
Cependant, comme il était interdit de respirer l’air frais et de prendre le soleil plus longtemps, des hommes armés étaient venus avec leurs méchants chiens enragés et ont commencé à les frapper, frapper et frapper tant qu’ils ont pu, en les poussant dans les petites cellules…
Ma maman avait reçu des coups de pied et de poings au ventre.
Cependant, comme il était interdit de respirer l’air frais et de prendre le soleil plus longtemps, des hommes armés étaient venus avec leurs méchants chiens enragés et ont commencé à les frapper, frapper et frapper tant qu’ils ont pu, en les poussant dans les petites cellules…
Ma maman avait reçu des coups de pied et de poings au ventre.
Je pleurais…J’avais peur ce jour
là.
Les conséquences des coups de pied et de poings au ventre
Depuis, maman, traînant un gros
ventre, était souvent amenée dans un petit local appelé
infirmerie, jusqu’au jour où elle fut transportée à l’hôpital,
avec de la ferraille2 qui lui nouait les bras !!!
Elle avait gardé cette étrange ferraille qui lui serrait les bras
durant tout son séjour à l’hôpital !!!
Mon petit frère était alors sorti du
ventre de maman. Il ne bougeait pas ; il ne criait pas ; il
ne respirait pas.
Le retour à l’enfer
de Neve Tirza
Voilà, maman et moi devons retourner
dans notre cellule et j’étais content de voir enfin ses bras
libérés de cette maudite ferraille ; Elle pouvait ainsi me
serrer très fort contre elle durant tout le trajet.
La cellule était petite, sombre, mal
aérée, humide et froide ; cependant, j’étais rassuré car
j’étais avec ma maman.
Il m’arrivait souvent de sursauter au
moindre bruit dans le couloir.
- Maman ! Maman ! j’ai peur…
- Chut, Nour, chut mon bel ange, calme, calme, je suis là et il ne va rien t’arriver…
Souvent aussi elle me disait que nous
devions rester deux ans ici avant d’aller rejoindre Papa, mes 2
frères et ma sœur…
Quelquefois, maman devait se préparer
car elle avait une visite. On se retrouvait alors dans un petit
réduit. Il y a une vitre au milieu, d’un côté maman et moi, et
de l’autre, des gens.
On m’avait dit que c’était ma
famille mais je ne les connais pas.
On pouvait ainsi se voir au travers de
la vitre, mais on ne pouvait pas se toucher et s’embrasser.
Alors pour dire aux membres de la
famille qu’elle les aime, maman mettait sa main largement ouverte
sur la vitre, et de l’autre côté, une main tentait de se
confondre avec la sienne.
Ma maman ne pleurait jamais, sauf le
jour qu’on nommait « fête des mères » ; ce jour
là, on lui avait donné un mot écrit par mon grand frère : «
Je vous embrasse tous deux du bout des doigts »…
Mes premiers pas
Aujourd’hui, je peux dire que j’ai
un peu grandi.
Maman me fredonne de vieilles
ritournelles de mon pays, la Palestine. J’aime bien « ya
setty », c’est une berceuse ; et maman a une voix si
douce…
Mes journées étaient bien pleines
puisque mes petites jambes gigotent car je voudrais commencer à
marcher si on me tient.
L’autre jour, maman m’avais pris
les mains et j’étais droit ! Je m’amusais alors à lancer
une jambe puis l’autre pour faire quelques pas. Je riais et maman
aussi.
Quand soudain, la porte de la cellule
s’ouvrit en grand et des « chiens3 en furie »
(comme dit maman) sont entrés.
Ils criaient fort et hurlaient que
c’était interdit de promener son enfant et de l’apprendre à
marcher.
Maman était alors en colère et d’une
violence extrême. Elle était au sol, pliée en deux, et elle
recevait des coups de bottes sur tout le corps. Et là, une des
furies m’avait aperçu allongé sur le lit. Elle me prit par les
pieds et me fit tourner puis me projeta de toutes ses forces contre
le mur.
Je suis retombé sans pousser un seul
cri. Mais il a fallu m’emmener à l’infirmerie et m’y plâtrer
la hanche. J’avais mal, mais maman m’a toujours dit de ne pas
crier, de ne pas pleurer.
Une autre chose étrange. Parfois les
« Rambo » (c’est un mot employé par maman) venaient
avec des lances à eau et nous visaient. Maman me prenait vite, me
serrait fort contre sa poitrine et se postait dans l’angle de la
pièce pour me tenir à l’abri.
Oh, certes, j’étais très mouillé, mais maman recevait de gros jets d’eau dans le dos et cela lui faisait très mal.
Oh, certes, j’étais très mouillé, mais maman recevait de gros jets d’eau dans le dos et cela lui faisait très mal.
Si je ne vous parle pas de mes jouets,
c’est tout simplement qu’ils étaient interdits.
Quand maman avait droit au parloir et
que l’on déposait pour nous des vêtements et des jouets, on nous
remettait les fringues, mais pas les jouets. C’est interdit,
interdit et interdit.
Tant pis et comme le disait maman, un
jour nous sortirons de cette maudite prison.
La séparation
Voilà, j’ai grandi et j’ai deux
ans. J’ai grandi dans une cellule-chambre avec maman, très souvent
dans ses bras ou sur le lit.
Elle me met mes plus beaux habits et me
fait tout beau, puis j’entends des bruits de bottes dans le
couloir, ce qui me fait toujours très peur.
Des en hommes en uniformes sont entrés
et tentent de me prendre.
Je m’accroche alors au cou de maman en hurlant : « au secours, Maman ! Maman ! ».
Je m’accroche alors au cou de maman en hurlant : « au secours, Maman ! Maman ! ».
Ils réussissent à m’arracher à ma
Mère qui, pour la première fois n’a rien fait.
Elle se tenait droite, immobile, sans
parler, sans crier… Comme si elle était complice.
Seulement, elle me regardait
m’éloigner, dans les bras des méchants…et depuis je ne l’ai
plus revue…
Un monsieur qui est mon papa m’avait
récupéré et m’a emmené loin, très loin…
Et depuis on me dit que suis libre ;
mais Père m’a fait une promesse : ma maman sortira bientôt….
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(1) Nour : prénom arabe qui
signifie « lumière »
(2) Ferraille : Menottes
(3) Chiens : Manal traitait de
ce nom les gardiens et les soldats de la prison
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