11 octobre 2009

le temple de Salomon se dessine à l'horizon


Attention : le Temple de Salomon se dessine à l’horizon !


Des milliers de Palestiniens sur leurs gardes vont converger, aujourd’hui, depuis les divers territoires occupés, vers Jérusalem pour aller y défendre la Mosquée Al-Aqçâ et pour apporter du renfort à ceux qui s’y sont enfermés pour la garder et briser l’encerclement des forces israéliennes qui se poursuit depuis plusieurs jours. Les Palestiniens qui accomplissent cette mission morale et religieuse en défiant l’arrogance de l’occupation israélienne et son appareil répressif écrasant le font au nom d’un milliard et demi de musulmans présents sur tous les continents.


Ils n’ont ni missiles, ni tanks, ni avions. Ils n’ont même pas de fusils et ils savent parfaitement qu’ils mènent un combat inégal contre un ennemi armé jusqu’aux dents et équipé des armes les plus sophistiquées. Pourtant, ils n’hésitent pas une seconde à aller affronter l’ennemi avec leurs poitrails dénudés – dénudés de tout, sauf de leur foi, de leur détermination irréfragable à faire face à la nécessité de défendre leurs lieux saints et à mourir en martyrs, si nécessaire, afin de les protéger et d’en consacrer l’arabité et l’islamité.

Ceux qui montent ainsi la garde, dans les territoires occupés, font leur devoir ; ils se montrent à la hauteur de leur conscience et de leurs cœurs emplis de foi, et ils ont une connaissance en profondeur des projets israéliens de judaïsation de leur ville, de destruction de leur chère mosquée Al-Aqçâ et de construction du prétendu « temple » sur les ruines de celle-ci.

Au début de ce siècle, et après l’effondrement des négociations de Camp David, M. Ismail Cem, ministre turc des Affaires étrangères de l’époque, arriva à l’aéroport de Gaza, et demanda à rencontrer rapidement feu le président palestinien Yasser Arafat. Il se disait porteur d’une missive de la plus grande importance, qui n’aurait su attendre…

Le président palestinien réserva à cet hôte turc le meilleur accueil ; il connaissait l’importance de la Turquie, en raison de son histoire et de sa position stratégique, et aussi en tant que pays musulman, héritier du Califat, dont le peuple nourrit en lui-même une grande colère contre le complot sioniste. Les Turcs d’aujourd’hui sont les petits-enfants du Sultan Abdül Hamid, qui avait chassé la délégation du mouvement sioniste d’une réunion importante dans son palais, après que celle-ci eût tenté de le soudoyer, ainsi que ses ministres, afin qu’ils acceptassent la création d’un Etat juif en Palestine.

L’hôte turc demanda à rencontrer le président palestinien à huis-clos, en la présence de son seul interprète. Arafat accepta immédiatement, et il demanda à un de ses ministres (Fatih Abû Madyân, ministre de la Justice), d’être cet interprète, bien que son anglais ne fût guère meilleur que celui – déplorable – de son patron, car il voulait que l’Histoire eût un témoin.

M. Cem dit au président Arafat qu’il lui apportait une proposition de création de l’Etat palestinien indépendant, accompagnée d’aides financières très généreuses et d’une reconnaissance internationale complète, tant celle des Etats-Unis que celle des autres grandes puissances, de la solution de tous les problèmes en suspens, dont ceux des réfugiés, de Jérusalem et des colonies, à la condition qu’Arafat acceptât qu’une petite synagogue fût édifiée dans la cour de la mosquée Al-Aqçâ, quelle qu’en soit la nationalité, quel que soit le drapeau qui y soit levé, l’important étant que cette synagogue soit construite et qu’elle soit dénommé « Temple de Salomon »…

Le président palestinien disparu, célèbre pour son esprit de répartie et sa vision pénétrante en ce qui concerne cette question, surprit son visiteur turc par un large sourire et son accord total avec cette proposition, et le ministre turc fut soulagé.

Il s’élança vers le président Arafat pour l’embrasser, mais celui-ci lui dit alors que son accord était, néanmoins, suspendu au consentement du peuple turc : si celui-ci acceptait la proposition, celle-ci serait immédiatement mise en application… Sinon…

Retournez donc en Turquie, auprès de son le peuple, dit-il en s’adressant au ministre, consultez-le sur cette question, après quoi, j’appliquerai sa décision sur-le-champ !...

Les paroles du président Arafat firent sur le ministre turc l’effet de la foudre. Il pâlit, puis il se dirigea vers la sortie, suppliant le président Arafat d’oublier tout ce qui avait été dit à ce propos et de ne plus jamais évoquer cette proposition. Après quoi, il se fit amener à l’aéroport, reprit son avion et rentra à Ankara.

Benjamin Netanyahu et son gouvernement d’extrême-droite veulent construire cette synagogue, sur les décombres de la mosquée Al-Aqçâ, dont ils déstabilisent les fondations en faisant creuser des tunnels dans son sous-sol. De temps à autre, ils envoient des juifs extrémistes en envahir la cour, dans les espoir que les Palestiniens finissent par voir, dans ces incursions, quelque chose d’ordinaire, d’habituel – quelque chose qu’il finiraient par accepter comme un fait accompli, exactement de la manière dont ils ont imposé la banalisation des colonies, les négociations vides de sens et la paix économique.

L’agenda de Netanyahu est extrêmement clair :

a) l’expansion et la colonisation de peuplement, qu’il a réussi à imposer tant à l’Amérique qu’à l’Autorité Autonome Palestinienne, qui a accepté de reprendre les négociations avec lui ;

b) l’imposition de la reconnaissance d’Israël en tant qu’Etat juif, ce en quoi il a réalisé une percée magistrale en réussissant à amener le président Barack Obama à l’admettre, comme l’a montré son discours devant l’Assemblée Générale de l’Onu ;

c) la judaïsation de Jérusalem et l’édification du prétendu temple. Il a d’ores et déjà réalisé le premier volet en étouffant la ville de Jérusalem par des blocs de colonies et en détruisant les maisons des Palestiniens, faisant des juifs une majorité absolue de sa population. Et le voici qui s’atèle à la réalisation de la deuxième phase, à savoir la construction de sa satanée synagogue et la destruction de la mosquée Al-Aqçâ.

Il faut que, dès aujourd’hui, se mette en branle une intense action arabe et musulmane pour venir en renfort aux veilleurs qui s’opposent à ce projet insidieux, et les peuples arabes doivent envoyer un clair message de soutien au monde entier, qui reflète sa mobilisation en vue de défendre ses lieux saints. Sinon, nous devons nous attendre à subir la perte de la première des deux Qiblas et du troisième des Lieux saints, exactement de la même façon dont nous avons perdu la Palestine, la mosquée d’Abraham à Hébron et nos deux dignités, l’arabe et l’islamique.

Nous disons aux peuples du monde que nous en avons assez de ces régimes corrompus dont il est désormais avéré que la plupart d’entre eux ne sont pas autre chose que des agents à la solde d’Israël ; nous en avons assez de leur soumission totale aux diktats israéliens et américains, ainsi que de l’absence de toute dignité et de toute énergie chez la plupart de leurs responsables, du haut en bas de la pyramide des responsabilités. Eux, ils ne veulent à aucun prix connaître le sort de feu le président Arafat ; ils n’aspirent pas au martyre, comme lui, il y aspirait, et comme y aspiraient aussi sept mille Palestiniens morts en martyrs depuis l’éclatement de la première Intifada.

Le complot du silence auquel participent ces responsables arabes est non moins criminel, pour Jérusalem occupé, que ce que font les juifs extrémistes et l’armée israélienne, qui les soutient, en agressant les fidèles palestiniens musulmans et en envahissant l’esplanade des mosquées.

Si nous ignorions la triste et honteuse réalité du monde politique arabe actuel, nous dirions que le spectacle de la profanation de la mosquée Al-Aqçâ mérite de la part des autorités égyptiennes davantage que la « publication de directives à l’intention des Affaires étrangères et des instances concernées, les incitant à intervenir sans délai afin d’apaiser la situation à la mosquée al-Aqçâ, comme nous l’ont annoncé, hier, les journaux égyptiens.

Nous nous attendions à entendre et à voir une position forte provenir du sommet syro-saoudien qui a achevé ses travaux hier, un sommet que le ministre saoudien de l’Information a qualifié d’historique. Mais il semble que le Serviteur des Deux Nobles Mosquées soit trop occupé à former le futur gouvernement libanais pour pouvoir perdre son temps avec Jérusalem occupée…

Il n’est jusqu’au souverain jordanien, pourtant gardien officiel du Dôme du Rocher, dont le père s’était chargé de restaurer la célèbre coupole dorée à ses propres frais, dont la réaction ne se soit limitée à demander à son ministre des Affaires étrangères de convoqué le chargé d’affaires israélien à Amman afin de lui remettre une « ferme protestation officielle ».

Quant au président du Comité Al-Quds, le souverain marocain Muhammad VI, nous ne l’avons pas entendu, jusqu’à présent.

Nous ne demandons pas une intervention militaire, car c’est là un honneur que nous ne risquons plus de nous payer, mais nous réclamons des mesures pratiques, telles que la fermeture des ambassades israéliennes (dans les capitales des pays arabes et des pays musulmans) et une intervention énergique auprès de l’allié américain, dont nous avons fait toutes les guerres, en Afghanistan et en Irak.

Serait-ce là en faire trop, pour Jérusalem, pour sa mosquée Al-Aqçâ et pour sa Coupole du Rocher ?

Force nous est bien de reconnaître, à notre corps défendant et la mort dans l’âme, que la synagogue dont il est question sera sans doute construite bientôt, plus tôt que nous ne pouvons l’imaginer, dans la cour de la mosquée Al-Aqçâ ou sur ses décombres, dès lors que perdurerait cette situation arabe qui nous fait honte.


Source : Al Quds Al Arabi
Traduction : Marcel Charbonnier


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