TUNISIE
Taoufik Ben Brik arrêté et écroué
NOUVELOBS.COM | 29.10.2009 |
Le journaliste et opposant tunisien avait été convoqué par la police après qu'une femme eut porté plainte contre lui pour agression. RSF parle d'"une affaire montée de toutes pièces pour inquiéter le journaliste". Sa femme s'inquiète pour sa santé.
La femme du journaliste et opposant tunisien Taoufik Ben Brik a indiqué, jeudi 29 octobre à nouvelobs.com, que son époux avait été arrêté et emprisonné. Il était convoqué par la police plus tôt dans la matinée après la plainte d'une femme. Celle-ci affirme que le journaliste l'a agressé et a tenté de la violer en pleine rue, à Tunis.
La femme de Taoufik Ben Brik, Azza Zarrad, explique que "[son] mari a été envoyé dans le bureau des SS pour y passer la nuit et être jugé le lendemain". "On est sans nouvelles de lui depuis ce matin. On ne peut pas aller le voir, on ne peut le joindre, on ne sait rien..."
Elle s'inquiète surtout pour la santé de son époux. "Il atteint par le syndrome de Cushing, maladie chronique qui lui ôte toute immunité. Il doit rester dans un milieu sain, disposer d'une bonne hygiène de vie et surtout prendre des médicaments. En prison, il n'a rien de tout cela. Sans médicament, il peut tomber dans le coma et mourir...", explique-t-elle.
Azza Zarrad appelle la Comunauté internationale à réagir.
"Une affaire montée de toutes pièces"
Mardi, Taoufik Ben Brik racontait au nouvelobs.com son altercation avec la femme qui l'accuse. "Jeudi dernier, à Tunis, j'avais mis ma voiture dans un parking", explique-t-il. "Avant même que j'ai mis le contact, une voiture garée derrière moi m'a embouti. La conductrice, qui, je pense, était de la police, en est sortie, me criant dessus, m'accusant d'avoir voulu lui rentrer dedans ; elle déchire mes habits, essaie de me pousser à la violence", rapporte Taoufik Ben Brik. "Elle a essayé de m'amener à user de la violence pour m'inculper d'agression".
Il "doit être traduit demain [vendredi] devant le tribunal de première instance", rapporte au nouvelobs.com Souhayr Belhassen, présidente de la Fédération International des Droits de l'Homme (FIDH).
"Tout porte à croire qu’il s’agit d’une affaire montée de toutes pièces par les autorités pour inquiéter le journaliste, connu pour ses articles critiques à l’égard du président Ben Ali", renchérit Reporters Sans Frontières (RSF).
"Des atteintes à la liberté d'expression"
La Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives (FTCR) explique au nouvelobs.com que Taoufik Ben Brik a été arrêté "à cause de ses écrits. La police essaye de fomenter une histoire pour le faire taire et ce n'est pas la première fois". La FTCR s'élève "contre des atteintes à la liberté d'expression qui touche ce journaliste mais aussi tous les Tunisiens".
De son côté, la FIDH estime que cette affaire est liée "aux fabulations d'une femme soi-disant agressée, mais aussi aux déclarations du Président qui souhaite traduire en justice toute personne critique vis-à-vis du pouvoir". Souhayr Belhassen affirme que "la Tunisie est en pleine régression. L'arrestation de Taoufik est le premier passage à l'acte".
Contacté par le nouvelobs.com, l'ambassade de la république tunisienne en France ne souhaite faire "aucun commentaire", avant de raccrocher violemment.
Appels à la communauté internationale
La FIDH "condamne fermement des actes qui accentuent les tensions en Tunisie" et en appelle à la Communauté internationale "avec beaucoup de scepticisme". La présidente de la FIDH insiste surtout pour que la "France bouge, c'est la première concernée".
En ce sens, la FTCR dénonce "le silence complice du gouvernement français devant ces atteintes aux libertés essentielles, ainsi que sa complaisance envers une dictature policière féroce".
Enfin, Azza Zarrad s'élève contre "l'appui de la France à Ben Ali. On est furieux, on est révolté contre Nicolas Sarkozy qui a été le premier à féliciter Ben Ali de sa réélection alors qu'il sait très bien les conditions en Tunisie".
RSF appelle "la communauté internationale à réagir face à ces agissements dignes d’un régime mafieux, au lendemain de la réélection de Zine el-Abidine Ben Ali".
Les Verts ont demandé la libération immédiate du journaliste tunisien Taoufik Ben Brik. Dans un communiqué, ils affirment qu'"il s'agit d'une manipulation du régime de Ben Ali, à l'égard duquel le journaliste s'est montré critique". Pour eux, Nicolas Sarkozy et son ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner "doivent condamner immédiatement et sans ambiguïté ces atteintes à la démocratie".
La secrétaire nationale du PCF, Marie-George Buffet, enfonce le clou. Dans une lettre publique à Nicolas Sarkozy, elle appelle le chef de l'Etat a "oser dire qu'à l'évidence le régime tunisien est un Etat policier qui bafoue les droits humains et les règles élémentaires d'un Etat de droit. Je souhaite vivement que la France dans les relations d'Etat à Etat qu'elle se doit d'entretenir avec la Tunisie, puisse adopter une attitude qui corresponde davantage aux valeurs dont elle se réclame".
La FTCR a lancé un appel pour Taoufik Ben Brik, déjà signé par Olivier Besancenot (NPA) et Noël Mamère (Verts).
(Boris Manenti - Nouvelobs.com)
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