Bernard Mikael : Médias : Les dérives de la presse française
Volontairement ou inconsciemment, mais automatiquement, on cherche à rattacher le dossier libanais à un conflit régional voire international qui va du conflit historique arabo-israélien au Grand Proche Orient de l'administration Bush.
A lire ou regarder la presse française, la crise libanaise se trouve simplifiée, voire ridiculisée en un conflit entre « L'opposition prosyrienne » et « La majorité antisyrienne ». Ainsi, nous pouvons lire dans l'AFP : l'opposition prosyrienne menée par le Hezbollah, le Président sortant prosyrien Emile Lahoud, le gouvernement pro occidental… De même, on entend parler de la division des chrétiens entre la majorité anti-syrienne et l'opposition amenée par le pro iranien Hezbollah…
Dans la presse écrite, on distingue deux types d'information :
L'information écrite par les agences de presse comme l'AFP, Reuters ou aussi l'Associated Press… dans lesquelles on attend lire des dépêches reflétant l'actualité. Ces informations sont censées être neutres et transparentes. Or, ces agences de presse sont loin de leur devoir d'information et effectuent une sorte d'automatisation de l'information utilisant des termes devenus génériques et standard, mais surtout, qui contiennent des raccourcis néfastes, même humiliantes pour le passé et le combat de l'opposition libanaise
L'autre source de la presse écrite est celui des quotidiens : Le Monde, Le Figaro, Libération… qui ont le devoir de l'analyse de l'information, basée sur la recherche et mettant l'information dans son contexte local, régional et international. Or, les analyses des quotidiens français, on cherche à représenter un seul point de vue, celui du pouvoir en place.
Cette dérive de la presse française frôle aujourd'hui le ridicule, voire l'insulte au peuple français, en recherche continue de la vérité.
Quelles peuvent être les raisons de ce dérapage ? Plusieurs réponses sont possibles :
• Un point noir dans l'histoire de la diplomatie française, celle du dossier libanais durant tout le mandat du président Chirac. Pendant douze ans à la présidence, M. Chirac a directement géré le dossier libanais à travers sa grande amitié avec feu le premier ministre Rafic Hariri, lui-même au centre du conflit libanais. Les sources de l'information et les déclarations du Quai d'Orsay sur les douze ans, n'ont reflété que le point de vue Chiraco-Haririen, et ainsi dérouté les journalistes et leurs esprits critiques.
• Une deuxième raison peut expliquer cette dérive journalistique et souvent repris par les grands journalistes français : le manque de budget. Il n'y a plus, ou très peu de reporters détachés dans les pays en conflit, on s'appuie alors sur des sources locales, souvent peu neutres. On s'appuie aussi sur les dépêches des agences de presse, en rajoutant quelques analyses basées sur la maigre connaissance des dossiers internationaux.
• L'argent politique jouera tout au long un rôle des plus importants. Ce sujet tabou est très peu évoqué, mais, cherchant à éclaircir un passé sombre de collaboration avec les forces d'occupation syriennes au Liban, et ayant fait fortune lors de 12 ans de gouvernance, le Courant du Future des Hariri peut se permettre de déployer les grands moyens pour se racheter une conscience, et influencer ainsi une significative partie de la presse étrangère.
Dans les qualifications : Prosyrien, antisyrien ou l'opposition menée par le Hezbollah pro iranien… le seul dénominateur commun est l'axe irano syrien.
Volontairement ou inconsciemment, mais automatiquement, on cherche à rattacher le dossier libanais à un conflit régional voire international qui va du conflit historique arabo-israélien au Grand Proche Orient de l'administration Bush.
Certes, tous les partis politiques –sauf le Courant Patriotique Libre du Général Aoun- ont des liens avec une ou plusieurs forces régionales, mais, la résolution de la crise libanaise se trouve au Liban même. Il suffit d'analyser ces réclamations pour comprendre que la crise libanaise est simplement libanaise : une nouvelle loi électorale qui rend les droits à toutes les factions du cocktail libanais et un gouvernement d'union nationale pour ainsi appliquer la Constitution libanaise. Les accords de Doha sont les meilleures preuves à cette théorie.
Bernard Mikael
(merci à Djamal ! )
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire