11 août 2013

Des milliards par mois pour en finir avec Bachar ?


Des milliards par mois pour en finir avec Bachar ?

Des milliards par mois pour en finir avec Bachar ?

Un plan anti-Bachar vient d’être préparé par les généraux américain s, et une lettre de trois pages a été remise, le 22 juillet, à Carl Levin, président de la commission des Forces armées du Sénat pour l’en informer. C’est de tradition, aux États-Unis : les relations entre élus et militaires sont constantes, même s’il s’agit de projets plutôt secrets. Une pratique qui n’a jamais cours en France, bien sûr. Cette lettre, signée par Martin Dempsey, chef d’état-major des forces interarmées US, présente les cinq scénarios récemment soumis à Barack Obama et au Pentagone pour qu’ils choisissent celui qui pourrait convenir.
En voici la liste : entraînement des unités rebelles, frappes limitées sur les forces loyalistes au moyen de missiles de croisière tirés à distance, interdiction totale ou partielle du ciel syrien à l’aviation de Bachar, établissement de zones de sécurité pour les insurgés aux frontières du pays avec la Turquie et la Jordanie, prise de contrôle des sites d’armes chimiques, etc. Un choix difficile pour Obama, car le moindre de ces projets suppose le déploiement dans les pays voisins de plusieurs dizaines de milliers de militaires US, d’avions de combat, plus l’envoi de navires de guerre en Méditerranée.
Les généraux américains ont évalué l’effort financier nécessaire à la réalisation de chacun de ces scénarios. Exemples : 1 milliard de dollars ou 500 millions par mois (à débourser par le seul Pentagone, alors que la facture sera bien plus élevée) pour la protection des zones de sécurité aux frontières, et 5 milliards au total, toujours par mois, à débourser par les États-Unis et leurs alliés, si Obama décide d’interdire l’espace aérien aux avions de Bachar. Les mêmes chefs de guerre US prévoient pour chacune de ces interventions, mais sans vraiment y croire, une participation aux frais, si l’on ose dire, des alliés de l’Otan.
« Un coût insensé » estime un diplomate français, à qui « Le Canard » a soumis ces chiffres, tandis qu’un officier d’état-major affirme, lui, que présenter une telle prévision de dépenses incitera la Maison Blanche à limiter l’engagement militaire des USA, comme aujourd’hui, à la simple formation des forces rebelles et aux livraisons clandestines d’armements, rien de plus.

Djihad à l’exportation

Voilà qui va sans doute provoquer quelques commentaires ironiques des alliés de Washington. « Mais nous sommes, nous aussi, en retrait sur le dossier syrien », admet-on au Quai d’Orsay. Les services français de renseignement, eux, se montrent plus sévères dans leur appréciation du comportement des Américains au Proche et au Moyen-Orient depuis quinze ans. Un projet de note d’analyse en préparation à la DGSE évoque à ce propos " un flottement général » de la politique des États-Unis dans ces régions troublées. Ce qui est une façon de découvrir l’Amérique.
Ce même document affirme que le prochain départ d’Afghanistan des troupes US, en 2014, va laisser un grand vide militaire et stratégique dans cette région, et pas seulement favoriser le retour au pouvoir des talibans. Puis, avant même la récente décision, prise par Washington, de fermer une vingtaine de ses ambassades et de ses consulats, ces analystes de la DGSE dressent une liste des principales menaces terroristes, du « chaudron irako-syrien » au Maghreb et au continent africain.
Et d’une : formation d’un foyer djihadiste permanent au Sahel, à partir du Sud libyen. Et de deux : développement d’un foyer de même nature en Syrie et en Irak, avec la participation de volontaires européens. Et de trois : fragilité récurrente de la Tunisie, du Maroc, de la Libye et de l’Égypte. Et de quatre : menaces permanentes sur certains États africains, de l’ouest du continent (golfe de Guinée) à la côte est (Somalie), et jusqu’au Moyen-Orient, « avec le désormais sulfureux Yémen » selon la formule d’un diplomate aussi pessimiste que les services français.
Non loin de !’Hexagone, la situation actuelle en Méditerranée provoque cette brutale réaction d’un vieux routier du renseignement : « C’est un vrai merdier sécuritaire. »
Claude Angeli (Le Canard Enchainé)

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