Marche pour la liberté de Gaza :
le siège doit cesser
lundi 28 décembre 2009
Bianca Zammit - ISM
The Palestine Chronicle
« Est-ce là notre destin ? Est-ce là ce que nous valons ? Rien d’autres que des photos sur les murs ?, s’exclame Um Rabia, parlant de ce qui est maintenant une coutume en Palestine, couvrir les murs des rues, des maisons et des magasins avec les photos des membres décédés des familles. Les enfants d’Um Rabia ont été tués par une arme automatique depuis un mirador alors qu’ils se rendaient à l’école. Aucun soldat, aucun officier et aucun gouvernement n’a même été obligé d’assumer la responsabilité de cet acte et si les tendances actuelles se poursuivent, alors il ne faut guère s’attendre à ce que la justice soit rendue dans un proche avenir.
Malheureusement, l’histoire d’Um Rabia est une histoire très courante en Palestine. Si la tendance n’est pas stoppée, bientôt il n’y aura pas de murs dans les rues, de maisons et de magasins à ne pas être recouverts.
En octobre 2009, une occasion s’est présentée à la porte de la communauté internationale. Cette occasion ne cherchait rien d’autre que la vérité sur les violations des droits humains perpétrées durant l’opération Plomb durci. Elle était à l’écoute, elle témoignait et faisait application du droit international. Quand le rapport Goldstone a finalement été publié, il a révélé quelles étaient clairement les priorités pour chaque nation en particulier, leurs intérêts ou désintérêts à l’égard des droits humains et de la primauté du droit. Le rapport faisait le constat qu’Israël a commis des crimes de guerres et des crimes contre l’humanité. La communauté internationale a fait le choix de minimiser les conclusions du rapport, elle a opté pour quelques déclarations suivies de l’inaction. Une inaction qui n’a jamais apporté la justice, sa démarche ‘attendons, nous verrons bien’ n’a fait que de mettre en danger d’autres vies innocentes.
Une chose est clairement apparue avec la réaction de la communauté internationale au rapport Goldstone, c’est que si nous restons à attendre après les gouvernements qu’ils se réveillent brusquement et qu’ils privilégient l’humanitarisme, alors, combien longue sera l’attente en effet. Pour ceux qui ont un pays, un passeport et toute la sécurité et les avantages inhérents, la patience peut, peut-être, être considérée comme une vertu, mais en Palestine, à Al-Quds (Jérusalem-Est), en Cisjordanie, chaque jour qui passe d’autres êtres humains sont déplacés, expulsés de leurs foyers et contraints de devenir des réfugiés, dans leur propre pays. Dans la bande de Gaza, quotidiennement, les agriculteurs deviennent une cible alors qu’ils essaient seulement de récolter leurs fruits et leurs légumes sur leurs terres, les personnels de la pêche connaissent le même sort et les enfants, comme ceux d’Um Rabia, sont confrontés à la mort, tous les jours, alors qu’ils tentent d’aller à l’école. Plus la communauté internationale prend son temps, plus les Palestiniens le paient de leur vie.
Les réactions au rapport Goldstone ont fait prendre conscience d’une leçon historique importante, à savoir que, parfois, la communauté internationale était capable de se tromper, et qu’alors, c’était à nous, les peuples du monde, d’œuvrer pour la justice et de dire NON. Cela n’est pas tant notre choix que notre devoir.
1 400 personnes venant du monde entier, de 42 pays, ont pris ce devoir au sérieux. Ils ont choisi de passer la veille du Jour de l’An et le reste des congés à manifester en solidarité avec le peuple de Gaza, alors que les Gazaouis commémorent l’opération Plomb durci et le siège de trois années.
Yousef Abdul Jarrab Al-Mughrabi est étudiant, il a 21 ans. Pendant l’opération Plomb durci, une bombe lancée d’un drone a explosé à proximité de sa maison, l’explosion l’a rendu aveugle et il a été blessé sur le côté droit du corps. Son état nécessitait d’urgence un traitement ontologique spécifique qui n’était pas possible à Gaza. Il a pris contact avec un spécialiste égyptien mais il n’a reçu l’autorisation de se rendre en Egypte, par l’ambassade égyptienne, qu’un mois plus tard.
Le spécialiste égyptien lui a conseillé d’aller en Espagne pour un autre traitement. Quand il est arrivé en Espagne, les médecins lui ont dit aussitôt qu’il était venu trop tard. Al-Mughrabi est un étudiant remarquable avec une moyenne supérieure à 90. Avant l’agression, il préparait un diplôme en Génie civil à l’université collège de Sciences appliquées. Maintenant, obligé de modifier son parcours, il doit repartir de zéro. Pour étudier, son épouse lui lit les manuels scolaires, lui les répète et les mémorise. Il vient à l’université avec l’aide de son frère qui l’accompagne chaque jour. Al-Mughrabi n’a pas abandonné, il espère trouver de l’aide pour recouvrer la vue. Il a gardé un esprit énergique et vif. « Je souhaite que mon sacrifice ne soit pas inutile et qu’il aidera à apporter plus de justice à la situation désespérée des Palestiniens ».
A Al-Mughrabi, le siège lui a coûté la vue. A d’autres, le siège leur a pris la vie ou celle de ceux qu’ils aimaient. Mohammed Yousef Mousa est étudiant à l’université collège de Sciences appliquées. Son père a été blessé durant l’opération Plomb durci. Il avait besoin de recevoir des soins immédiats en Egypte, des soins pas disponibles dans Gaza. L’ambassade d’Egypte lui a refusé l’entrée. Il est décédé trois mois plus tard.
Le siège aussi prend des vies, chaque jour, dans Gaza ; des infrastructures de bases considérées comme garanties en d’autres pays, comme la fourniture d’électricité et d’eau, connaissent ici la pénurie. Le siège bloque toutes possibilités, telles les bourses d’études à l’étranger. Il empêche les gens de remplir leurs obligations religieuses, tel que participer à un pèlerinage à l’étranger. Il conduit à séparer les familles qui maintenant dépendent essentiellement d’Internet pour communiquer entre elles. Il fait que les familles qui ont un être cher dans une geôle israélienne en sont complètement séparées, sans visites régulières, obligées de s’en tenir à des lettres qui sont remises des mois plus tard à leurs destinataires. Le siège coûte leur travail aux Gazaouis, les moyens d’en trouver. Il provoque des pénuries alimentaires devenues une réalité quotidienne. Il oblige les gens qui ont perdu leurs maisons pendant l’opération Plomb durci à vivre, encore un an plus tard, sous des tentes, sur les lieux de leurs maisons. Il force les Gazaouis à habiter dans un musée de destructions et à revivre les agressions chaque jour. Le siège interdit aussi l’entrée de tout matériau de construction et entrave toute reconstruction, obligeant les gens à vivre dans un état de rancune et de danger constant.
Le siège doit cesser. Tel est le message porté par la Marche pour la liberté de Gaza, le 31 décembre 2009. La Marche pour la liberté de Gaza est composée de gens qui ont trouvé le courage de dire NON, là où la communauté internationale ne l’a pas su. Ainsi, se poursuit l’œuvre initiée par Mahatma Gandhi, dans sa situation désespérée pour l’indépendance de l’Inde et par Nelson Mandela dans son combat contre l’apartheid en Afrique du Sud. Leur héritage est trop fort pour être ignoré, le siège trop meurtrier pour être permis. Le 31 décembre 2009 est l’occasion pour tous les peuples du monde de montrer leur solidarité avec le peuple de Gaza et pour adresser un NON aux ambassades d’Israël à travers le monde. La tendance doit être inversée. Nous ne devons pas permettre qu’il y ait plus de photos sur les murs.
Bianca Zammit est membre d’ISM (International Solidarity Movement) à Gaza et du Mouvement pour le Boycott, les Désinvestissements et les Sanctions. Elle a rédigé cet article pour PalestineChronicle.com.
24 décembre 2009 - The Palestine Chronicle - Photo : blog de C. Gegout - traduction : JPP
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