Les Etats-Unis
reconnus complices de crimes contre
l'humanité,
les Nations Unies paralysées
les Nations Unies paralysées
Gabrielle Lefèvre
Vendredi 12 octobre
2012
C’est une
sentence cinglante qui a été infligée
aux Etats-Unis d’Amérique et aux Nations
Unies par le Tribunal Russell sur la
Palestine, à New York.
Il ne s’agit pas
d’un slogan extrême-gauchiste, mais bien
d’une analyse fouillée de la manière
dont les Etats-Unis, en paralysant les
Nations Unies, assurent une sorte
d’impunité à l’Etat d’Israël, pourtant
reconnu maintes fois coupable de crimes
contre l’humanité sur le peuple
palestinien, par diverses instances des
Nations Unies elles-mêmes.
Le Tribunal Russell
sur la Palestine est un tribunal
d’opinion, sur le modèle de celui
institué par Bertrand Russell lui-même
avec Jean-Paul Sartre à propos de la
guerre du Vietnam. Il est composé de
citoyens du monde connus pour leur
engagement moral pour les droits humains
et pour la justice et la paix (1). La
quatrième session du TRP s’est tenue à
New York les 6 et 7 octobre 2012.
L’impunité dont
bénéficie Israël, cette « politique des
deux poids deux mesures » qui révolte
nombre d’Etats et de citoyens dans le
monde entier, discrédite le système
entier des Nations Unies, censé assurer
la paix et la justice mondiale.
Une aide
militaire colossale
Cette complicité
n’étonne évidemment pas de la part des
Etats-Unis, protecteurs de l’Etat
d’Israël (en violation de ses propres
lois) et surtout de l’industrie de
l’armement qui transforme ce petit Etat
en monstre surarmé et en puissance
nucléaire au service des intérêts
stratégiques américains au
Proche-Orient. Les routes du pétrole
sont proches. Et puis, il fallait au
début contenir l’influence soviétique
notamment dans l’Egypte de Nasser et
ensuite la montée d’un islamisme
contestant les dictatures arabes mises
en place par les grandes puissances.
Dictatures corrompues qui ont laissé
dans la plus grande pauvreté des masses
populaires ne trouvant plus que dans les
structures religieuses l’aide nécessaire
à leur survie. Le célèbre activiste
américain Noam Chomsky a présenté au
tribunal sa lecture incisive de
l’histoire des relations
israélo-américaines.
Une politique du
nettoyage ethnique
Israël n’est pas le
modèle démocratique que sa propagande
veut laisser croire. C’est ce qu’a
démontré devant le TRP l’historien
israélien Ilan Pappé analysant l’impact
du sionisme sur la société israélienne
et qui a institué le judaïsme comme
nationalisme ainsi qu’une mythologie
présentant le Palestinien comme un agent
étranger occupant une terre qui était
celle des Juifs dans l’antiquité. Le
Palestinien est présenté comme une
menace démographique à supprimer par le
nettoyage ethnique, comme un éternel
responsable de ce qui lui arrive : il
n’avait qu’à accepter de se laisser
déposséder de ses terres, de sa culture
ainsi que le prévoyaient les Nations
Unies en créant l’Etat d’Israël. Le
problème est que le nettoyage ethnique
avait commencé avant la résolution des
Nations Unies fixant les territoires
respectifs des uns et des autres ! Et ce
nettoyage ethnique, reconnu pourtant
comme crime contre l’humanité, se
poursuit depuis plus de 60 ans dans le
silence assourdissant de la communauté
internationale, paralysée par les vétos
successifs des Etats-Unis aux Nations
Unies.
La paralysie des
Nations Unies
C’est bien cela qui
était au cœur des travaux du Tribunal
Russell sur la Palestine. Les analyses
juridiques très fouillées, les
témoignages les plus poignants ont mené
à cette tragique conclusion : la
colossale aide économique et militaire
des Etats-Unis à Israël lui permet de
poursuivre sa politique d’occupation des
terres palestiniennes, d’oppression, de
discrimination, d’emprisonnement, de
mort lente du peuple palestinien. La
Cour Internationale de Justice a
détaillé tout cela dans son avis sur le
Mur, datant de 2004. Et cela n’a pas été
suivi d’effet par les Nations Unies, à
savoir par les gouvernements des Etats
membres. La moindre tentative de
s’opposer à ces crimes contre l’humanité
est bloquée par un véto étatsunien. De
plus, ce pays menace les gouvernements
et les agences des Nations Unies qui
oseraient s’opposer à lui de
restrictions d’aides et de budget.
Cependant, les Nations Unies sont tenues
d’assurer l’aide humanitaire,
indispensable à la survie de millions de
Palestiniens, réfugiés dans leurs «
bantoustans » dont le plus grand est la
Bande de Gaza, véritable prison à ciel
ouvert. Elles paient ainsi le prix de
l’occupation et de la colonisation
illégale des terres palestiniennes sans
mesures de rétorsion contre l’occupant.
Cela fut aussi dénoncé au tribunal par
un ancien commissaire des Nations Unies,
Peter Hansen et par des juristes
spécialisés dans le droit humanitaire et
celui des réfugiés.
La révolte des
citoyens du monde
Conclusion du
Tribunal Russell sur la Palestine:
devant cette paralysie des instances
internationales, une mobilisation plus
importante encore de l’opinion publique,
des médias, des réseaux sociaux est
indispensable, la campagne BDS (boycott,
désinvestissement, sanction) en est un
exemple remarquable.
Un autre moyen de
pression consiste à porter plainte
contre ces violations des droits des
Palestiniens devant les juridictions
pénales nationales. Plus urgent encore
serait une plainte du Conseil de
sécurité devant la Cour Pénale
Internationale ou l’acceptation par
cette Cour d’une plainte du gouvernement
palestinien qui a accepté sa compétence.
Tout cela est juridiquement possible
mais bloqué politiquement.
Le TRP souligne
donc qu’il faut impérativement réformer
le fonctionnement du Conseil de sécurité
pour supprimer le système de véto,
foncièrement antidémocratique car
symbole de la loi du plus fort. Ou
alors, il faut que l’assemblée générale
des Nations Unies décide d’élargir le
nombre de membres de ce conseil dans
l’espoir d’une démocratisation accrue.
Cela correspondrait à l’évolution
actuelle des rapports de forces :
l’Empire US est vacillant, des pays
puissants émergent, comme la Chine,
l’Inde, le Brésil à côté de la Russie.
Un monde multipolaire qui succède au
bipolaire du temps de la guerre froide
et à l’empire US en déclin actuellement.
Les Nations Unies redeviendraient alors
les protecteurs des peuples, ainsi qu’il
est précisé dans sa Charte fondatrice et
spécialement des plus faibles. Voilà
pourquoi le problème palestinien est
exemplaire : il représente un défi pour
la démocratie mondiale telle que voulue
par de plus en plus de citoyens du
monde. Le défi de la justice et de la
paix.
Gabrielle
Lefèvre
Journaliste
(1) Les membres
du jury de la session de New York :
Michael Mansfield (avocat GB), Alice
Walker (écrivaine US), John Dugard
(juriste sur-africain et ancien
rapporteur des N.U. sur les Droits de
l’Homme dans les territoires
palestiniens), Stéphane Hessel
(ambassadeur de France et président
honoraire du TRP), Dennis Banks
(défenseur des droits des « natives »
américains), Roger Waters (musicien US,
cofondateur du groupe Pink Floyd),
Mairead Corrigan Maguire (Irlande du
Nord, Prix Nobel de la Paix), Angela
Davis (activiste politique US,
enseignante universitaire), Miguel Angel
Estrella (pianiste argentin et
ambassadeur à l’Unesco), Cynthia
McKinney (ancienne membre du Congrès US
et membre du Parti Vert),Ronald Kasrils
(écrivain sud-africain, politicien et
activiste).
L’enregistrement
des quatre sessions du Tribunal Russell
sur la Palestine est visible sur le site
www.russelltribunalonpalestine.com
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