28 février 2009

Le Liban fait la chasse aux espions israéliens


Une affiche dans la banlieue sud de Beyrouth, le quartier chiite, bastion du Hezbollah.
Crédits photo : Jenny MATTHEWS/Panos/REA


L'arrestation de plusieurs agents à la solde de l'État hébreu amène le Hezbollah à redoubler de vigilance.

DANS la banlieue sud de Beyrouth, forteresse du Hezbollah, la suspicion règne. Un agent de la circulation, dont l'appartenance partisane ne fait aucun doute, prétend ignorer où se trouve le bureau de presse de la « résistance », situé pourtant à quelques mètres de son carrefour, et signalé par une pancarte discrète. Hassan, un jeune résident du quartier, se plaît à raconter comment, un soir, il a suivi discrètement le conducteur d'un véhicule garé inhabituellement devant chez lui… « N'oubliez pas que cette zone a été l'objet d'un plan de destruction systématique, elle reste une cible pour Israël », explique-t-il pour justifier ses accès de prudence.
L'efficacité éprouvée du système de sécurité du Hezbollah, qui repose sur le soutien de la communauté chiite et une organisation très stricte, a pourtant été ébranlée très durement il y a un an par l'assassinat à Damas de l'un des principaux chefs du parti, Imad Moghniyé. L'annonce de l'arrestation récente d'un « réseau d'espions israéliens » alimente aussi les rumeurs concernant une nouvelle brèche dans cette carapace.

Selon la presse libanaise, ces découvertes auraient obligé le Hezbollah à entamer un grand chantier de remise à plat des mesures de sécurité dont il s'entoure. Le coup de filet le plus récent a été annoncé ce mois-ci. Il concerne un certain Marwan Faqih, propriétaire d'une station-service à Nabatiyé, dans le sud du Liban, qui aurait été recruté en France par les services israéliens dans les années 1990. En l'absence d'informations officielles, les journaux regorgent de révélations à son propos. Selon le quotidien Al Balad, il était le principal fournisseur en véhicules du Hezbollah et les équipait de transmetteurs satellites.

Les supputations vont bon train
En novembre, les autorités libanaises ont publié la photo d'un autre espion, Ali Jarrah, qui aurait été démasqué avec son frère Youssef. Ils opéraient depuis 1983 dans un autre fief du Hezbollah, la vallée de la Bekaa. Il s'agit des deux prises les plus importantes depuis celle de Mahmoud Rafeh, en juin 2006, qui aurait confessé l'assassinat un mois plus tôt, pour le compte du Mossad, des frères Majzoud, deux dirigeants du Jihad islamique palestinien au Liban. Sa cellule aurait également tué deux chefs du Hezbollah en 1999 et 2003, ainsi que, en 2002, le fils d'Ahmed Jibril, le leader du FPLP-CG, une autre organisation palestinienne.

Les supputations vont aussi bon train à propos de la disparition ce mois-ci dans le quartier de l'aéroport (contrôlé par le Hezbollah) d'un certain Joseph Sader, présenté comme un autre espion potentiel. Certains jugent possible son arrestation par le « parti de Dieu », qui a déjà agi dans les précédentes affaires en amont des forces de sécurité libanaises.

Interrogé par Le Figaro (voir ci-dessous), le numéro deux du Hezbollah conteste la réalité du problème. « Aucun de ceux qui ont été démasqués ces derniers mois n'a réussi à infiltrer le Hezbollah et nous n'avons jamais acheté de voitures à Marwan Faqih. Les informations qu'ils ont communiquées au Mossad relèvent du domaine public », affirme le cheikh Naim Kassem. Il dément aussi que le Hezbollah ait été contraint de réorganiser son système de sécurité.

Pour Omar Nashabé, responsable des pages judiciaires du quotidien Al-Akhbar, une chose est sûre : « Depuis le conflit de l'été 2006, les services israéliens ont renforcé leurs opérations au Liban, car leur incapacité à atteindre leurs buts de guerre, à savoir l'élimination du Hezbollah, est en grande partie imputable à l'échec de leur renseignement. C'est d'ailleurs l'une des recommandations de la commission Winograd », chargée de tirer les leçons du conflit en Israël.

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