Les restrictions aux mouvements en Cisjordanie font des ravages sur les budgets des humanitaires internationaux
mercredi 8 juin 2011 - 06h:50Amira Hass - Ha’aretz
Les contribuables européens et états-uniens qui soutiennent les groupes humanitaires paient au moins 4,5 millions de dollars de dépenses en plus, par an, pour surmonter les restrictions israéliennes.
Un employé d’une ONG avec une femme au check-point de Qalandya.
Photo : J Griffin, EAPPI
Les contribuables européens et américains qui soutiennent la tâche de l’humanitaire international et des organisations de développement dans les territoires occupés doivent les financer à hauteur d’au moins 4,5 millions de dollars de dépenses supplémentaires par an, en raison des conséquences des restrictions israéliennes à la liberté de mouvement, selon un nouveau rapport publié aujourd’hui par l’Association des agences de développement international (AIDA).
Le rapport, qui couvre plus de 50 agences européennes et américaines travaillant sur le terrain tant dans la bande de Gaza qu’en Cisjordanie, a été commandé dans le but d’estimer à combien précisément les limitations imposées par Israël aux déplacements pénalisaient financièrement les organisations.
Une enquête menée parmi ces organisations en janvier et février arrive à la conclusion qu’un tiers des organisations a dû embaucher un poste supplémentaire à plein temps pour s’occuper exclusivement, auprès des autorités israéliennes, de la question des autorisations de déplacements en Cisjordanie, vers et depuis la bande de Gaza, et vers Jérusalem.
Quatre-vingt-douze pour cent des membres d’AIDA qui ont besoin d’une autorisation pour aller de Cisjordanie dans la bande de Gaza disent être souvent refoulés ou mis en attente ; 79 % disent être confrontés à des difficultés pour obtenir des autorisations pour aller à Jérusalem-Est.
Plus de 73 % des organisations disent que leurs équipes internationales sont confrontées à des difficultés pour obtenir l’autorisation de se rendre dans la bande de Gaza et près de 25 % déclarent que leur demande pour entrer dans la bande de Gaza est refusée ou mise en attente pendant un temps considérable. Très souvent, l’autorisation n’arrive qu’une fois que la raison qui la motivait n’est plus valable.
Un tiers de toutes les organisations, et près de la moitié d’entre elles ayant un budget annuel de plus d’un million de dollars, disent être obligées de financer un bureau parallèle pour faire le même travail, en différents endroits espacés seulement de dizaines de miles les uns des autres, pour surmonter les restrictions aux déplacements. Dans un pourcentage similaire, les organisations constatent qu’elles sont forcées d’embaucher des employés étrangers à un coût plus élevé, au lieu de prendre des travailleurs palestiniens beaucoup plus adaptés.
Le temps perdu à attendre les autorisations ou à faire la queue aux check-points, les emplois supplémentaires, les appels en vidéo conférence et tous les autres moyens mis en œuvre pour faire face aux restrictions aux déplacements montent à coût d’au moins 4,5 millions de dollars, chaque année.
AIDA est une organisation de tutelle pour 84 ONG de développement et humanitaires, des ONG qui emploient au total quelque 2000 Palestiniens et 320 ressortissants étrangers. Selon AIDA, les deux tiers de ses organisations gèrent des budgets annuels de plus d’un million de dollars. La plupart sont enregistrées par le ministère israélien des Affaires sociales, certaines par le ministère de l’Intérieur, et beaucoup le sont aussi par l’Autorité palestinienne.
La plupart des organisations au sein d’AIDA travaillent avec la population palestinienne la plus marginalisée. Dans la bande de Gaza, il s’agit surtout de familles d’agriculteurs vivant dans la zone tampon, de plusieurs centaines de mètres, qui longe la frontière avec Israël, ou de familles de pêcheurs dont le secteur de pêche est considérablement réduit par la marine israélienne. En Cisjordanie, ce sont principalement des communautés de gardiens de troupeaux ou autres dans les zones C, dans les régions les plus affectées par le mur de séparation et dans Jérusalem-Est.
D’après le coordinateur israélien des activités gouvernementales dans les territoires, le rapport n’a pas encore été transmis pour examen, alors que des sources gouvernementales indiquent que de nombreuses organisations au sein d’AIDA ne sont pas reconnues par le ministère des Affaires sociales israélien, et que le rapport n’a pas pris en compte les réclamations détaillées sur des cas spécifiques.
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Adresse courriel d’Amira Hass : amira@haaretz.co.il
Rappel sur l’auteur :
Octobre 2009
L’israélienne, Amira Hass reçoit le "Prix du Courage en Journalisme 2009"
Quatre femmes journalistes, originaires du Belarus, du Cameroun, d’Iran et d’Israël, ont été récompensées cette semaine à New York, pour leur courage dans l’exercice de leur profession, face aux menaces de mort et d’emprisonnement, aux attaques et aux violentes intimidations exercées à leur encontre.
La Fondation internationale des femmes dans les médias (IWMF) a remis le "Prix du Courage en Journalisme 2009" [...] à l’Israélienne Amira Hass, journaliste du quotidien Haaretz, qui décrypte l’actualité politique israélienne et palestinienne depuis 20 ans, basée à l’intérieur des « territoires palestiniens ». Amira Hass, née en 1956 à Jérusalem.
Elle a étudié l’histoire à Jérusalem et à Tel-Aviv. Après avoir enseigné, elle a commencé à exercer la profession de journaliste en 1989 à la rédaction de Ha’aretz. Elle est une journaliste et auteur très connue pour ses colonnes dans le quotidien Ha’aretz. Elle vit en Cisjordanie après avoir habité à Gaza et elle rapporte les événements du conflit israélo-palestinien depuis ces territoires disputés. Elle a débuté sa carrière à Ha’aretz en 1989, et a commencé à informer depuis les territoires en 1991. En 2003, elle était la seule journaliste israélienne juive à vivre parmi les Palestiniens, à Gaza depuis 1993 et à Ramallah depuis 1997.
Deux ouvrages ont été tirés ses expériences successives : l’essai Boire la mer à Gaza et Correspondante à Ramallah, une compilation de ses articles depuis la Cisjordanie, tous deux parus en France aux éditions La Fabrique.
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