Algérie. Djamila Bouhired : une moudjahida dans la dèche
jeudi 19 avril 2012
Djamila Bouhired, combattante pour l’indépendance de l’Algérie
qui a subi des tortures à son arrestation en 1957 avant d’être condamnée
à mort puis graciée, se trouve dans le dénuement et ne peut pas se
payer des soins à l’étranger.
Djamila Bouhired a été contrainte aujourd’hui jeudi d’annuler un voyage
en France où elle devait subir une opération chirurgicale. « J’ai
essayé de préparer ce voyage en achetant des devises sur le marché
parallèle. Mais à la dernière minute, je me suis rendu compte que je
n’avais en ma possession que 100 euros. J’ai un rendez-vous pour samedi
prochain et je devais partir demain (aujourd’hui, ndlr). Mais je ne pars
pas avec 100 euros. C’est une honte ! », s’est-elle confiée au
quotidien El Watan.
« La CNAS a toujours pris en charge les frais de mon hospitalisation.
Et c’est mon droit, parce que j’ai cotisé à la sécurité sociale.
J’allais dans un hôtel moyen, mais il n’y a pas de restauration. Et
comme j’ai besoin d’un accompagnateur pour me prendre en charge après
l’intervention, il me faut une somme pour régler les frais de
nourriture. Le règlement de la CNAS, selon ce qu’on m’a expliqué, ne
permet pas de donner aux patients de l’argent liquide. En entendant cette réponse, j’ai voulu marcher toute seule à Alger. J’ai préparé des pancartes, mais des amis m’en ont dissuadé », s’est-elle encore offusquée.
Une icône en colère
Cette icône du combat libérateur est très en colère contre les
dirigeants algériens. « Quand il s’agit d’eux et de leurs enfants, les
dépenses se font sans compter. Des femmes sont envoyées pour faire de la
chirurgie esthétique avec une prise en charge totale », dénonce-t-elle.
Elle ne s’explique pas que des Algériens ayant des maladies chroniques
ne soient pas pris en charge par les pouvoirs publics.
« Je veux que les moudjahidines et leurs enfants et ceux des chouhada,
ainsi que tous les Algériens qui vivent avec des maladies nécessitant
des interventions lourdes et coûteuses soient pris en charge par l’Etat
algérien », vitupère-t-elle. « Quand je pense aux martyrs, je me demande
s’ils ne nous en veulent pas de ne rien faire pour ce pays, 50 ans
après l’indépendance ».
En 2009, Djamila Bouhired a lancé un appel aux Algériens pour l’aider à faire face aux frais de son hospitalisation tout en envoyant une lettre-coup de gueule au président Bouteflika pour
l’interpeller sur sa « situation critique » mais aussi celle des autres
moudjahidines. « Je vous demanderais de ne plus nous humilier et de
revaloriser notre dérisoire pension de guerre afin de vivre dans un
minimum de dignité le peu de temps qui nous reste à vivre »,
écrivait-elle, pleine de rage.
Yacine Ouchikh
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