24 septembre 2011

Soutien des Affaires étrangères d’Israël aux procès contre BDS aux États-Unis

vendredi 23 septembre 2011 - 05h:37
Richard Silverstein




La Chaîne 10 israélienne confirme, par le biais d’une interview avec le vice-ministre israélien des Affaires étrangères Danny Ayalon, que le gouvernement israélien lui-même est prêt à sponsoriser ces procès et probablement à en assurer les coûts. 
 
(JPG) Electronic Intifada et moi avons écrit sur le procès contre la Olympia Food Coop pour son vote en faveur du BDS, intenté par cinq des membres de la Coopérative qui prétendent que l’entreprise n’a pas respecté son propre règlement en approuvant le boycott de neuf produits israéliens dans ses magasins. Jusqu’à présent, nous savions que Stand With Us (organisation qui appelle à acheter les produits israéliens et qui veut contrer l’action BDS - ndt) et le consul général israélien, Akiva Tor, agissaient dans le processus de lancements de procès, le site de SWU indiquant qu’ils participent à des réunions clés au cours desquelles des décisions sont prises à propos des dossiers juridiques, notamment pour le recours à des avocats.
Mais aujourd’hui, le programme d’informations Tzinor Layla, sur la Chaîne 10 de la télévision israélienne (vidéo en hébreu) confirme, par le biais d’une interview avec le vice-ministre israélien des Affaires étrangères Danny Ayalon, que le gouvernement israélien lui-même est prêt à sponsoriser ces procès et probablement à en assurer les coûts. Franchement, je trouve étonnant qu’un gouvernement étranger intente des procès à des entreprises américaines sur de telles infractions présumées. D’abord, je n’ai jamais entendu dire qu’un gouvernement étranger poursuivait des entreprises à l’étranger en raison de leur soutien à un boycott ; et je n’ai jamais entendu dire non plus qu’un gouvernement intentait des procès contre une entreprise étrangère pour des raisons politiques, au lieu de pécuniaires.
Dans les interviews qu’ils ont données à Electronic Intifada, Rob Jacobs, de SWU, et Akiva Tor, consul général israélien dans le Pacific NW (région nord-ouest de l’Amérique du Nord) ont menti quand le premier a affirmé ne pas savoir d’où venait le financement du procès et le second quand il a prétendu qu’il n’avait, et par extension son gouvernement, rien à voir avec le procès. Tout semblait comme si Tor et Jacobs s’étaient coordonnés au mieux avec leurs patrons de retour à Tel Aviv. Voyons comment Tor et Jacobs vont se sortir de ce qui suit.
Dans mon précédent billet, j’ai appelé cela la version pro-Israël de la guerre juridique, ce concept délétère loué par Alan Dershowitz pour tourner en dérision les militants des droits humains qui ont le culot de demander à Israël de rendre compte de ses actes. Il s’agit d’une tentative délibérée de perturber, détruire les entreprises américaines qui sont prêtes à prendre des positions qui fâchent l’État israélien. Je dis que c’est anti-américain et que cela viole les droits fondamentaux à la liberté d’expression. En plus d’une guerre juridique, ceci est un exemple parfait de procès SLAPP (poursuites stratégiques contre la participation publique : intimidation judiciaire - ndt). Autrement dit, une utilisation abusive du système judiciaire dans une stratégie visant à limiter la participation publique sur une question qui fait partie légitimement du discours social. Sur le fond, les tribunaux de Washington devraient rejeter cela. Mais le problème, comme je l’ai constaté, est que les juges parfois peuvent mal juger ou souhaiter accorder satisfaction à un demandeur ou une demanderesse à leur niveau. Alors, ils refusent de faire appliquer le droit comme ils le devraient.
S’agissant de l’implication de Stand With Us dans ce procès, un journaliste israélien qui suit les activités de ce groupe en Israël et à l’étranger, m’a dit : « SWU est un bras officieux du gouvernement israélien ». Sur ce blog, vous m’avez vu intervenir souvent sur des groupes comme ONG Monitor, Im Tirzu, Middle East Forum, The Israeli Project et Stand With Us, comme quoi ils faisaient ce que leur demandait le gouvernement israélien. Vous m’avez vu affirmer qu’ils coordonnaient étroitement leurs activités avec le gouvernement et qu’ils étaient effectivement devenus la voix de leur maître. Mais aujourd’hui c’est la première confirmation directe que SWU, à tout le moins, colle littéralement au derrière des Affaires étrangères israéliennes. Dans la vidéo, Ayalon confirme spécifiquement le « partenariat » du gouvernement avec d’autres organisations juives et non juives américaines. Pas le moindre sens de la discrétion ici. Israël, en vertu du projet Lieberman/Ayalon, qui lance tout son poids partout dans le monde, tente même d’écraser les coopératives alimentaires de l’État de Washington.
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Personnellement, cela ne me dérange pas d’avoir des organisations, type lobby israélien, mettant en avant leur agenda politique. Après tout, c’est la liberté d’expression et la façon de faire en Amérique. Mais là où je commence à avoir un problème, c’est que ces groupes se font les agents d’un gouvernement étranger. Bien sûr, les gens comme Rob Jacobs et Roz Rothstein en oublient complètement les conséquences, parce que pour eux, loyauté à Israël et loyauté aux USA, c’est la même chose. Les intérêts des deux sont quasiment les mêmes. Tel est le poison de cette idée de pro-israélisme qui ne laisse aucun libre arbitre ou indépendance de la part des juifs américains et leur direction.
J’espère faire comprendre aux cinq plaignants qui poursuivent la Olympia Food Coop, qu’ils sont des façades du gouvernement israélien dans cette affaire. Peut-être ne changeront-ils pas d’avis, mais j’espère qu’au moins cela les incitera à réfléchir.
Il y a un aspect dans la stratégie juridique des plaignants que je trouve étrange. Étant donné qu’ils sont membres de la Coopérative, ils déposent plainte EN TANT que Coopérative. Ils prétendent représenter réellement la Coopérative et ses intérêts, alors que le Conseil d’administration et le personnel, et tous les autres qui ont voté pour approuver le boycott ne seraient que des imposteurs ou des transgresseurs du règlement intérieur de la Coopérative. Gardons à l’esprit que ces cinq-là ont été candidats au Conseil d’administration et qu’ils ont échoué avec une marge importante.
Un autre aspect qui mérite d’être noté dans la logique juridique de cette affaire, c’est qu’il n’est avancé aucun argument sur les mérites ou les démérites du BDS (Boycott, Désinvestissements et Sanctions contre Israël). Les plaignants savent que non seulement ils vont échouer s’ils mettent la question au vote, mais ils savent aussi qu’un tribunal américain rejettera une plainte contre une entreprise sur des motivations purement politiques. La seule argumentation juridique possible pour eux est de dire que le Conseil d’administration a enfreint son propre règlement intérieur en votant le BDS. Gardons à l’esprit que tout ce brouhaha, c’est pour neuf produits israéliens qui ont été retirés des rayons.

Voir aussi :
19 septembre 2011 - Richard Silverstein - traduction : JPP

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