01 septembre 2010

Une vie en attente alors que les matériaux de construction sont toujours interdits

mardi 31 août 2010 -

PCHR Gaza


Depuis plus d’un an, Salah Jalal Abou Leila et sa famille de douze personnes vivent dans une tente surpeuplée plantée pas loin d’une grande rue poussiéreuse de Beit Lahia, une ville du nord de la Bande de Gaza.

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Salah Jalal Abou Leila vit sous une tente depuis que sa maison a été détruite il y’ a un an lors de la dernière offensive militaire israélienne. Au chômage depuis qu’on lui a interdit l’accès à son emploi en Israël, il n’a as les moyens de louer un appartement. Il ne peut pas non plus reconstruire sa maison car il n’ y a pas de matériaux de construction.

« Notre maison a été complètement détruite par la guerre. J’avais travaillé seize années en Israël pour la construire et il a suffi d’une seule attaque pour que tout soit réduit à néant ».

Chômeur depuis qu’il a été interdit de rejoindre son travail en Israël en 2002, Salah n’a pas les moyens de louer un appartement et de vivre ailleurs que sous cette tente que le gouvernement a mis à sa disposition. Cette situation est vécue par de nombreuses autres familles qui, comme lui, ont connu la destruction de leur maison lors de l’attaque israélienne de décembre 2008-janvier 2009.

Forcées, comme celle de Salah, à la précarité sur cette petite bande de sable, elles n’ont pas même la possibilité de commencer à reconstruire leurs maisons et de reprendre une vie normale. Israël, en effet, dans le cadre du blocus mis en place en juin 2007, a banni du territoire les matériaux de construction.

Pour Salah et les autres familles, la vie est suspendue dans l’attente de quelque chose qui tarde douloureusement à venir. Plus de 16 000 logements ont été frappés lors de la dernière offensive d’Israël, dont 2114 ont été entièrement détruits. Comme conséquence, 51 000 Palestiniens ont été privés de toit. La plupart ont cherché refuge auprès de proches dans les agglomérations de la Bande de Gaza, ajoutant encore au surpeuplement et la dureté des conditions de vie. Dans une situation où il n’y a ni ciment, ni fer à béton, ni verre, ni bois -matériaux interdits d’entrée par Israël- la plupart des personnes déplacées n’ont pas vu leur situation changer plus d’une année après l’attaque.

Leurs maisons, comme beaucoup d’autres bâtiments civils, devenues décombres, continuent encore- chose dont les Gazaouis se passeraient bien- de témoigner de l’ampleur des destructions causées par la guerre. Voir des milliers de gens privés de la possibilité de reconstruire leurs maison et de rentrer chez elles, de même que vivre au milieu de ces ruines ajoutent par ailleurs, comme on peut s’en douter, à la grande détresse psychologique du million et demi de Gazaouis.

En juin 2007, quand Hamas prit le contrôle de la Bande de Gaza, Israël décida de resserrer son étreinte sur ce territoire, passant d’un blocus sélectif à un blocus qui ne laisse filtrer que l’aide humanitaire minimale -pas beaucoup plus que ce qu’il faut pour couvrir les besoins vitaux. La maison de Salah est toujours en ruine à cause, en grande partie, de l’interdiction des matériaux de construction. Mais les malheurs de cet homme n’ont pas commencé en 2007 avec les nouvelles conditions du blocus. Salah fait partie des 26 000 Palestiniens qui se rendaient chaque jour en Israël pour travailler. Il y avait travaillé comme plombier pendant seize ans. En 2002, le point de passage Eretz fut fermé aux civils palestiniens et Salah perdit cet emploi si précieux pour lui.

Assis à même la terre battue et ne prêtant pas attention à l’animation que poules et enfants faisaient autour de lui, il parle avec nostalgie de ces années en Israël. « Je me faisais vraiment de l’argent à l’époque. Je pouvais nourrir ma famille sans problème et j’avais de très bons rapports avec mes collègues israéliens. Il nous arrivait de nous rencontrer avec nos familles autour d’un repas ou pour célébrer une fête ».

A présent, seulement une moyenne de 100 personnes sont autorisées chaque jour à traverser le point de passage d’Eretz, principalement des travailleurs humanitaires internationaux et des personnes qui ont besoin de soins médicaux d’urgence. Pour Salah, la restriction des déplacements s’est tout simplement traduite par le chômage et la pauvreté.

Quand il perdit son emploi en Israël, il se mit naturellement en quête de travail à Gaza mais là, le taux de chômage est aux alentours de 55%. « Depuis 2002, je n’ai pas pu me rendre en Israël pour travailler. Je suis au chômage depuis de longues années et je n’ai pas d’argent pour pouvoir louer un appartement dans la ville de Gaza comme d’autres. Comment prendre soin de mes douze enfants ? Jusqu’à quand allons-nous vivre aussi nombreux sous une tente ? J’ai demandé aux gens du gouvernement de m’aider mais ils m’ont dit qu’ils ne pouvaient rien faire parce qu’il n’y a pas de matériaux pour construire de nouvelles maisons. Je suis un civil palestinien, pas un politique. Qu’ai-je fait pour mériter un tel sort ? »

Salah est loin d’être seul à vivre cette situation difficile. Juste de l’autre côté de cette rue de Beit Lahia, dans un bureau abandonné qui surplombe une station d’essence fonctionnant par intermittence, habitent Sabah El Attar et sa famille. « Notre maison a été entièrement détruite dès le premier jour de la guerre (le 27 janvier 2007) explique Sabah en illustrant son propos d’un geste vigoureux signifiant que rien n’a été épargné. Depuis, nous vivons dans ce bureau. Mais le gouvernement nous a découverts et nous a ordonné de quitter les lieux parce qu’il est très dangereux de rester ici à cause des réservoirs d’essence qui se trouvent juste au dessous de nous. Ils nous ont dit que si nous ne quittions pas les lieux avant la fin du mois, nous serions condamnés à payer une amende de 10 000 shekels ».

Après la guerre, Sabah et les autres membres de sa famille furent heureux d’avoir survécu. Il faut dire en effet que pendant que leur maison était bombardée et qu’ils tentaient d’évacuer le bâtiment en feu, les soldats israéliens leur tiraient dessus. Constater que tous les membres de la famille sont encore vivants est vécu comme une bénédiction. Mais à côté de cela, il n’ y a rien d’autre, car plus d’une année après l’attaque, ils luttent encore pour recoller les morceaux de leur vie éparpillée et pour cause : « Nous n’avons nulle part où aller. Pas de maison, pas de travail, rien. »

A la faveur des nouvelles dispositions annoncées par Israël- lesquelles font suite à la condamnation internationale de l’attaque meurtrière perpétrée dans les eaux internationales sur la Flottille de la Liberté pour Gaza - une augmentation des flux d’entrée de matériaux de construction sera autorisée. Destinés aux projets approuvés par l’Autorité Palestinienne, ces flux se feront sous la supervision d’organismes internationaux. La plupart de ces projets cependant, ne tiennent pas compte du besoin pressant de reconstruire les logements familiaux qui, comme ceux de Salah et de Sabah, ont été détruits.

Des matériaux essentiels tels que le ciment et les planches continueront d’être interdits à la population civile de Gaza parce que selon Israël, ils constituent des « biens à usage double », c’est-à-dire des biens manifestement aptes à un usage militaire. Ces matériaux pourtant ne figurent nulle part dans les listes internationalement reconnues des « biens à usage double ». Il n’est pas difficile de comprendre alors le pessimisme que Salah ressent face à ces nouvelles mesures. « Je n’ai aucun espoir que ces matériaux fassent leur entrée grâce à la nouvelle politique. J’attends depuis trois ans que le blocus arrive à sa fin mais rien n’a changé. Je n’ai maintenant pas d’autre choix que d’attendre encore. »

Consultez également :

- L’économie sous l’occupation - 27 août 2010
- Gaza : rude épreuve pour les agents de voyage - 5 août 2010
- Gaza : grave insuffisance des traitements sous dialyse - 31 juillet 2010

27 juillet 2010 - PCHR - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.pchrgaza.org/portal/en/i...
Traduction de l’anglais : Najib Alaoui

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