21 janvier 2012

Des profanateurs de tombes bien officiels dans l'Etat colonial sioniste

Fadwa Nassar


Jeudi 17 novembre 2011

Dans la majorité des pays normalement constitués, les profanateurs de tombes sont soit des groupes clandestins qui en veulent à la religion des morts, à l’Etat ou la société, soit des groupes marginaux qui suivent des pratiques démoniaques ou autres. Leurs crimes sont dénoncés par leur société et leur Etat, par les médias et les parlementaires, etc.. Et ces groupes sont souvent recherchés par la police et les services sécuritaires, ils agissent dans l’ombre et craignent leur arrestation et condamnation.
Mais ce n’est pas le cas dans la colonie sioniste qui s’appelle Israël. Les profanateurs de tombes sont payés par l’Etat pour accomplir ces crimes, ce qui veut dire que c’est l’Etat colonial qui conçoit, dirige et protège la profanation des tombes… pourvu qu’elles soient palestiniennes ! Si jamais la « communauté internationale » ou les peuples du monde souhaitent distinguer un Etat normalement constitué, donc légitime, même si son régime est injuste, d’un Etat malade dont la fondation même est illégitime, ils doivent prendre en considération comment cet Etat se comporte avec les morts, qui constituent normalement l’histoire profonde du pays, le patrimoine humain qui a fait l’histoire du pays, ces hommes et femmes dont le labeur quotidien ou les exploits ont donné sens à la communauté vivant dans le pays. A partir de ce critère, ils peuvent comprendre qu’ « Israël » n’est pas un Etat, mais une colonie de peuplement et qu’il ne peut devenir un Etat normalement constitué, puisqu’il fut fondé sur les massacres et le mensonge, l’injustice et la spoliation. Un Etat qui finance et gère la profanation des tombes est un Etat malade, psychiquement et moralement, et est voué à la disparition.
Lorsque les profanateurs du cimetière de Ma’manullah, dans al-Quds, agissent, ils se cachent non de l’Etat, mais des Palestiniens en posant des barrières tout autour du lieu où ils mènent leurs activités criminelles. Parce que les Palestiniens et les autorités religieuses musulmanes de la ville surveillent de près le crime de la destruction du cimetière, les sionistes sont contraints de dresser autour d’eux ces barrières pour les empêcher de voir comment les os de leurs morts sont déterrés pour être ensuite emmenés, personne ne sait où.
Ce n’est pas le premier cimetière palestinien que les occupants sionistes profanent et détruisent.  Depuis 1948, des dizaines de villages et de bourgs, et même des villes comme Haïfa ou Yafa, ont vu leurs cimetières profanés par les autorités bien officielles ou par les colons, à la solde des autorités. Des tombes fracassées et des écrits racistes témoignent du passage de ces hordes sauvages contemporaines que le monde soi-disant civilisé enfante spécialement pour peupler la colonie sioniste en Palestine. Ils se disent religieux ou croyants, ou tout simplement attachés aux valeurs humaines, mais en observant leurs actes criminels, et en se rappelant toutes les horreurs qu’ils ont commises depuis qu’ils ont colonisé le pays, on commence à douter de ce que signifient religion, croyance et valeurs humaines.
Il y a quelques semaines, le cimetière de Yafa a été le théâtre de ces criminels. Tombes musulmanes et chrétiennes, parce que c’est là où sont ensevelis des Palestiniens, ont été profanées. La municipalité sioniste a dénoncé le crime, sans cependant essayé de trouver les responsables, mais il s’agissait d’un acte « provocateur », qui ne répondait à aucune raison d’Etat, sauf celui de dire aux Palestiniens, en profanant leurs tombes, qu’ils sont indésirables dans leur propre pays.
Mais par contre, que ce soit dans les villages d’al-Naqab ou d’al-Jalil, ou des villages situés le long de Wadi Ara, les cimetières palestiniens sont profanés et détruits par les autorités coloniales officielles, un jour pour élargir une route, un autre jour pour construire une autoroute, là pour installer une colonie, et ailleurs pour des travaux quelconques. L’essentiel demeure, ce sont les cimetières palestiniens qui en sont les victimes.
La profanation et la destruction des cimetières palestiniens ne sont pas des actes gratuits, dans la mentalité coloniale sioniste, caractérisée par sa volonté de déraciner les Palestiniens et de falsifier l’histoire du pays. En s’attaquant aux tombes, ces envahisseurs venus d’ailleurs et qui savent bien qu’ils ne possèdent rien dans le pays, tentent par tous les moyens de couper les racines des Palestiniens et de les priver de cette assise fondamentale de la continuité démographique d’un peuple.
La profanation des cimetières s’élève au rang de crime contre l’histoire et la civilisation lorsque ces colons s’attaquent au cimetière historique de Ma’manullah, datant de plusieurs centaines d’années (avant les Croisades), où furent ensevelis, autres autres, des dignitaires et des pélerins musulmans, à l’époque où la ville d’al-Quds était une des principales villes musulmanes dont les écoles accueillaient les musulmans du monde entier. Les musulmans ont continué à y ensevelir leurs morts jusqu’à l’année 1927, lorsque le conseil musulman de la ville jugea qu’il y manquait de place.
Dès 1948, lorsque l’Etat de l’occupation s’empare de la partie occidentale d’al-Quds, où se trouve le cimetière, les profanations officielles du cimetière commencent : une partie du cimetière est transformée en jardin public, après avoir déterré les morts et rasé le sol, et en 1985, un parking y est construit. En 2002, la municipalité sioniste déclare vouloir utiliser une partie du cimetière pour y construire le siège du tribunal municipal, mais sheikh Ikrima Sabri, le mufti d’al-Quds, résiste et mène une campagne pour empêcher cette nouvelle profanation qui vise la partie encore intacte du cimetière.
A présent, ce serait pour construire un musée « de la tolérance », que les sionistes envisagent de détruire l’histoire et le patrimoine palestiniens en détruisant la partie encore non profanée du cimetière. En réalité, leur musée de la tolérance, leur tribunal, leur parking et tout ce qu’ils peuvent inventer, ne sont que des prétextes pour détruire la Palestine et la mémoire palestinienne et falsifier l’histoire de la Palestine. C’est dans ce sens qu’ils détruisent la ville d’al-Quds et surtout ses anciens quartiers, c’est dans ce sens qu’ils s’attaquent à la ville d’al-Khalil, en Cisjordanie, comme ils s’attaquent, à la ville de Yafa, sur la côte. C’est dans ce sens qu’ils s’attaquent à la pierre et à l’humain, comme au végétal et à l’olivier qui a vécu dans ce pays, alors qu’ils n’y étaient pas.
Ce nouveau crime sioniste n’est pas encore dénoncé par les organisations internationales, dont l’UNESCO, qui refusent d’intervenir pour protéger le patrimoine humain palestinien. Jusqu’à présent, l’UNESCO a fait preuve d’une lâcheté exemplaire, refusant de prendre en compte la demande de protéger le cimetière historique de Ma’manullah, lancée par des familles palestiniennes maqdisies dont les aïeux sont enterrés dans le cimetière Ma’manullah, et parmi elles, la famille Khalidi. Est-ce parce que ce sont des familles musulmanes, ou des familles palestiniennes et arabes, ou est-ce parce qu’en face, ce sont les protégés des puissances occidentales qui continuent à exercer un chantage à l’antisémitisme chaque fois qu’une voix dans le monde réclame la justice ?  

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