Armes, dictatures… :
quand les banques pactisent avec le diable
Photo : dans « L'Associé du diable », Al Pacino dirige
un cabinet d'avocats spécialisé dans la défense de firmes
moralement corrompues (DR)
Par Augustin Scalbert | Rue89 | 08/11/2009 | 11H31
Quand on arrive sur le site Secretsbancaires. fr, on est accueilli par une page sombre et une musique anxiogène.
Un décor adapté, puisqu'on y découvre une collection d'investissements moralement contestables que réalisent les banques françaises.
Parmi les entreprises ainsi financées, des fabricants de bombes à sous-munitions,
détruisant l'environnement ou soutenant des régimes répressifs.
Ce site a été lancé en juin par une coalition européenne d'organisations non gouvernementales, représentée en France par les Amis de la terre.
« Ce qu'on y montre est la partie émergée de l'iceberg », estime Yann Louvel, chargé de campagne finance privée dans l'ONG.
Les six ONG européennes du réseau Banktrack engagent des consultants ayant accès à des bases de données financières pour déterminer où les banques de ces pays (France, Espagne, Allemagne, Italie, Royaume-Uni et Belgique) prêtent de l'argent à des entreprises, ou gèrent ou commercialisent des produits financiers pour elles ou leurs clients :
« Nos consultants travaillent par thèmes : une semaine, ce sera les banques européennes finançant les agrocarburants en Amérique latine ; la semaine suivante, le financement d'activités nucléaires par des banques françaises. »
La Société Générale et la mine plus polluante du monde
Le résultat est parfois très choquant. Ainsi, on réalise que les trois grandes banques françaises présentes sur le site (BNP-Paribas, Société Générale et Crédit Agricole) ont des liens avec Textron, une entreprise américaine produisant des bombes à sous-munitions. La palme revient au Crédit Agricole, qui « détient ou gère pour compte de tiers des actions dans cette compagnie pour un montant de 9,83 millions de dollars ».
La Société Générale a « octroyé des prêts et émis des obligations » d'un montant proche pour Freeport McMoran, qui gère la mine la plus polluante du monde, en Indonésie. Quant à BNP-Paribas, elle a « émis des obligations et détient ou gère pour compte de tiers » environ… 260 millions de dollars chez Total, dont on connaît l'activité en Birmanie.
Comment réagissent les banques à ce déballage de leurs pratiques ? « En mars, elles s'étaient déjà engagées par rapport au fabricant de bombes à sous-munition, mais je n'ai pas de nouvelles », relate Yann Louvel.
Pour lui, tous les exemples publiés sur ce site montrent que « les banques n'ont pas de politique précise vis-à-vis de l'éthique de leurs investissements, et qu'elles peuvent se retrouver, volontairement ou non, dans ce genre de projets ».
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