31 août 2012

Dans quel monde vit sayed Hassan Nasrallah?
  

Par Nasri Sayegh
 

Ce sayed n'est point de ce monde. Il vit sur une planète isolée de celle du Monde Arabe.
Étrange est cet homme tout comme ceux qu'il représente. Il parle de la Palestine. Il parle d'Al-Qods comme si elle était prochainement de retour, après qu'elle a été délaissée par les Arabes croyant aux Etats-Unis, au pétrole et à l'efficacité des médias. Il prépare au jour du remords, de la crainte et de la terreur israéliens, si cette entité ose agresser le Liban, ce plus petit et plus faible Etat de la région voire du monde.

Quelle belle folie reflète cette attitude, cette promesse et cette Palestine! Ce sayed n'est point de ce monde… Notre monde s'est dissocié de la Palestine. Il a préféré l’abandonner à son sort… Il a renoncé à la terre sainte en échange du pouvoir. Un pouvoir qu'il sauvegarde par la pratique de l'oppression et de la violence, transformant ses peuples en champ de tir et en terrain d'expérience pour la répression et ses conséquences, le pillage et ses effets, la décadence et ses niveaux, l'animalisation et la théorie de Pavlov.
Sayed Hassan Nasrallah adopte une feuille de route claire: la Palestine avec al-Qods pour capitale appartient aux Palestiniens.
Les capitales des autres sont en dehors de la carte du monde arabe. Washington, capitale des Arabes par excellence, est leur Trésor, le centre de la prise des décisions, la directrice de leurs médias. Elle est celle qui équipe les armées arabes, qui détient les sceaux du pardon et qui livre les certificats d’exemption de toute maladie liée au sentiment nationaliste. 
Sayed Hassan Nasrallah, et ceux qu'il représente, les croyants à la cause Palestinienne, dans le fond et dans la forme, au passé et dans l'avenir, étaient-ils sunnites, chiites, laïques, ou athées, sont toujours attachés à leur cause et à la lutte pour remporter la victoire… Ils ont trouvé la bonne voie et ils la suivent toujours.
Les autres (les régimes arabes) sont archaïques… Depuis la naissance de la cause palestinienne et depuis l'effritement de la nation en entités, régimes, communautés, clans et tribus; Et depuis l'arrivée au pouvoir des émirs, des monarques, des militaires et des voleurs. Ceux-là ont exploité la cause palestinienne dans leurs politiques locales et dans leur commerce rentable. Ils sont allés en Palestine en 1948 pour abuser de cette terre, s'il était impossible de la posséder toute entière…certains y ont mis la main sur des terrains; d'autres y ont pris des noms et sont devenus des maréchaux et des généraux.
Les autres, même ceux qui ont commandé leurs armées pour combattre "Israël", ont perdu la bataille après la lutte. Ils ont perdu la bataille même après un semblant de victoire dans la guerre d'octobre. "Israël"- qui devait craindre les armées équipées et cent millions d'arabes- était redoutable. Au moment où "Israël" accélérait, sans arrêt, l'armement de sa troupe, les Arabes promouvaient le réalisme, comptaient sur la paix, et pointaient les armes de leurs troupes vers leurs peuples. Ils mettaient leurs armées à la disposition d'un occident qui menaient ses guerres en Afghanistan et en Irak, substituant leur hostilité à "Israël", par l'animosité à l'Union soviétique et l'inimité à l'égard de l'Iran.

Cet homme est un aventurier. Le monde qui l'entoure lui est hostile, cependant il ne le craint point. "Israël" le craint. Il n'a jamais essuyé un échec dans une bataille contre "Israël". Les résultats de l'offensive de 1993 furent en sa faveur. "Israël" a gouté en 1996 l'amertume de la parité; le 25 mai 2000, "Israël" a fui le Liban sud, déplorant la perte de la zone de sécurité qu'il avait établie aux frontières. En juillet 2006, la frayeur israélienne a dépassé toutes les attentes… l'État régional superpuissant, soutenu et parrainé par les États Unis, l'occident et les Arabes (gouverneurs, émirs et présidents), a essuyé une défaite. La malédiction de juillet poursuit "Israël" jusqu'à ce jour et le poursuivra dans l'avenir.
La résistance islamique est-elle une exception à la règle ou un prodige d'un autre monde, ou puise-t-elle sa puissance de ses attitudes et pratiques fermes, de la certitude de la victoire et de sa cause juste? Ou bien les autres  dérogent-ils à la règle, préférant bâtir leurs espoirs à la base de leur défaite ? Le régime officiel arabe, dans ses deux aspects réactionnaire et modéré, est-il étranger à la région ou mis en place par l'étranger ? Pourtant, la résistance et les régimes arabes émanent des mêmes sociétés, mais la résistance est issue du peuple et opère en sa faveur, alors que les régimes de modération sont issus du peuple, mais oeuvrent contre lui.
La  Palestine a connu des personnes qui se sont engagées à sa cause…Elles n'ont pas nécessairement réussi, mais elles ont lutté jusqu'à ce que les régimes arabes les aient abattues  avant qu'Israël ne le fasse. La résistance palestinienne est née depuis un siècle, depuis le début des vagues d'émigrations sionistes. Elle ne s'est arrêtée  qu'à la suite des défaites. Souvent,  le Palestinien combattait seul. L'aide que lui fournissaient les régimes arabes lui coutait cher. Les calculs de la pérennité au pouvoir étaient plus convaincants que ceux de la confrontation d'Israël, à l'exception du cas  d'Abdel Naser qui a démissionné après la défaite de 1967 (même s'il est revenu au pouvoir). D'autres présidents se sont attachés au pouvoir à l'issue de la déroute et parmi les homologues d’Abdel Nasser existent des présidents qui ont  recouru à la force, et à  la reddition, pour maintenir le pouvoir.
La majorité des dirigeants arabes  soutenaient la Palestine dans leurs discours mais agissaient concrètement contre les intérêts des Palestiniens… "Israël" les a expatriés et les régimes arabes les ont emprisonnés. Ils habitèrent dans les camps (grandes prisons) et dans les lieux d'incarcération. Il est rare de trouver un responsable palestinien qui n'a pas enduré l'arrestation, ou un activiste palestinien qui n'a  pas souffert de la torture. Il est rare de trouver un citoyen arabe qui n'a été objet de poursuite, s'il appuyait, défendait ou luttait pour la Palestine.
Pourtant, ces régimes ne sont point étrangers à nos sociétés, même s'ils n'émanaient pas d'elles. Ils sont nés avec les entités engendrées par le génocide de Maysaloun et l'hécatombe de Sykes-Picot. Ces régimes datent depuis le début du suivisme à l'occident qui les a mis en place, a orchestré leur sous –développement, leur régression, le pillage de leurs ressources. Cet occident qui a donné à leurs peuples les leçons sur les droits du pouvoir et non sur les droits de l'homme.
La Résistance pour sa part  ne nous est point étrangère. Elle émane de nous et agit en notre faveur. Elle date depuis la fondation de partis et la naissance de dirigeants patriotiques nationaux, qui ont combattu contre l'ennemi sans toutefois parvenir à la victoire.
Les fondements de cette résistance ont été jetés avec Sultan Pacha Al-Atrach, commandant de la révolution syrienne. Ses sources ont commencé avec les révolutions de "Hanano", de "Saleh" et d'Ezzeddine el-Kassam. Cette révolution fut abandonnée à son sort. Ses sources remontent à Guevara de Gaza, à Saïd el-Aass et à Faouzi Laoukji... Et la liste des noms de telles organisations est assez longue.
La Résistance ne s’est jamais conciliée avec les États nationaux, ni avec leurs autorités. La résistance s'oppose à la logique de l'État qui préfère la stabilité au lieu de payer le prix de la lutte et de l'engagement. Pour ces raisons, partout où l'État était puissant, la résistance était réprimée. L'État se durcit à l'égard de son peuple et affiche sa faiblesse en face d'"Israël", en  qualifiant sa faiblesse de sagesse.
La Résistance a réussi au Liban car l'État était faible. S'il était puissant, la naissance de la Résistance aurait été ratée. La vertu du Liban réside dans sa faiblesse. Il a permis aux communautés religieuses de le contrôler,  de le piller et a permis à la Résistance de le placer parmi les forts de la région. Ces communautés l'ont détruit et cette Résistance l'a rendu victorieux. L'Évangile aurait pointé du doigt le cas du Liban en parlant de la pierre rejetée par les maçons et qui est devenue la pierre angulaire. Le Liban est devenu la pierre de base. Sa faiblesse est un mot de passe pour les communautés pour contrôler l'État, et un permis à la Résistance pour le libérer de l'occupation étrangère.
Voici la Résistance menaçant l'ennemi par la voix de sayed Hassan Nasrallah: n'osez pas agresser le Liban…il est plus fort…Les propos de sayed sont tranchants, puisqu'il ne fait pas partie des intellectuels pacifistes qui ont avancé "des idées constructives" durant la période d’Oslo, afin de convaincre Israël  d'accepter la paix… Ces derniers lui ont proposé la sécurité. Ils étaient prêts à transformer le régime arabe en gardien de la sécurité israélienne, selon des conditions draconiennes garanties par les pays et peuples de la région arabe allant du Golfe et jusqu'à l'océan… "Israël" réclamait une sécurité totale.
Les propos de sayed sont différents. Les leurs comprennent des concessions, refusées par "Israël". Cette entité exige une reddition parfaite. Elle veut éliminer la Palestine et son peuple et imposer son hégémonie sur la région…Les Arabes ont accepté d'être le backyard  pour "Israël". Un jardin gardé par les bases militaires américaines et les chiens de garde israéliens.
Les propos de sayed Nasrallah sont différents. Nous devons toujours les répéter et les prendre en compte, car ils sont le fer de lance de la Nation, vers l'avenir.
Sayed Nasrallah a dit: nous vivons dans un monde qui ne respecte que les forts, et tout pays arabe qui veut être à l'écart des agressions israéliennes doit être fort''. En réponse aux menaces lancées contre le Liban et l'Iran il a répliqué: au Liban, il y a un facteur nouveau c'est que nous sommes capables de transformer la vie des milliers d'Israéliens en enfer, nous sommes capables de changer la face d'"Israël". La guerre avec le Liban est très coûteuse. Certaines cibles en Palestine occupée peuvent être frappées par quelques missiles à haute précision. C'est ainsi que la vie des centaines de milliers d'Israéliens deviendra un enfer. Les Israéliens doivent savoir que le coût de cette guerre sera très cher et qu'il ne peut être comparé à la guerre de juillet 2006. En effet, les commandants militaires israéliens vivent toujours sous le choc des résultats de la guerre de juillet 2006. Hélas, dans le monde arabe, au lieu de débattre des modalités pour profiter des armes, on cherche à se débarrasser de la force de la résistance. Je vous assure que lorsque notre pays est agressé, nous n'attendrons le feu vert de personne(…)".

La journée d'Al-Qods, lors de la prononciation du discours, était une journée mondiale. Au moment où Samir Geagea était à la recherche de l'Etat parmi les décombres, où Walid Joumblat bloquait les ponts provisoires avec des parties libanaises et recousait la politique par le repositionnement dans plusieurs directions, et au moment où les régimes arabes flétris cherchaient les moyens de combattre l'Iran au Liban, en Syrie, en Irak et dans le Golfe, "Israël" examinait scrupuleusement les propos de sayed Nasrallah. Des propos auxquels Israël croit. Des propos qu'il craint et qu'il prend en compte.
La planète de la partie officielle arabe tient à rassurer "Israël", et s'emmure avec cette entité  dans une coalition contre l'Iran et le Hezbollah. Alors que la planète de la résistance suscite la crainte des dirigeants israéliens, confrontés à des choix difficiles, amers et dangereux, imposés par la Résistance Islamique du Liban. Quelle différence entre les deux camps!!!
Cette résistance, le choix de l'Oumma et son avenir, est en dépit de sa puissance, de sa détermination, de son dévouement dans la lutte contre "Israël", de son entrainement et de ses équipements, passe par des moments délicats.
Le Liban faible est une grâce pour elle, une grâce exploitée dans le bon sens. Le Liban pourri est une infortune, la détérioration étant contagieuse.
La Résistance participant au pouvoir, a prouvé qu'elle ne sait danser avec le "boiteux". Elle est partout guettée. On l'attire vers les arènes, on la cible de toutes les directions et l'objectif dépasse la politique… Le but est de confisquer son arsenal. La partie de la modération arabe, formée en majorité de sunnites, n'a pas de problème avec le chiisme, mais plutôt avec la Résistance. Elle cherche le chiisme dépourvu de fusils.
Le printemps arabe de Damas a porté atteinte à la Résistance, et les tensions confessionnelles au Liban l'ont accablée. Les clans, les Al-Assir, les Al-Mokdad et toutes les autres familles…La Résistance est incapable de traiter de tels problèmes par la logique de l'arrogance. En tant que partie chiite, elle est obligée d'exercer la politique à la manière libanaise.
Le réseau de sécurité de la Résistance n'est pas assuré par le chiisme, mais est plutôt de dimension nationale. Pourquoi alors a-t-elle négligé cette dimension et s'est-elle contentée du quorum chiite!
Ceux qui croient en la justice des principes du "printemps arabes" et en ses objectifs et ceux qui s'attachent aux libertés, à la justice, à la dignité et aux droits de l'homme espèrent que le discours de sayed Nasrallah est  bien saisi pour que la cause palestinienne soit inscrite sur l'agenda des révolutions du printemps arabe (…). La révolution défend une cause noble, telle la cause palestinienne et elle doit être protégée des complots.

La logique de la résistance et de la liberté ne peut être conciliée avec la logique de la répression et de  la tyrannie…
 

Source: Assafir, traduit par: moqawama.org

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