08 août 2012

Sayed Nasrallah : « La résistance, seule force de dissuasion contre Israël »

Par Hasan Nasrallah

Le secrétaire général du Hezbollah Sayed Hassan Nasrallah a condamné le crime odieux commis contre des soldats égyptiens à la frontière avec la bande de Gaza, affirmant qu’Israël profite le plus de cet incident horrible et déplorant le fait que Gaza et le peuple égyptien en paient le prix. Dans une allocution prononcée devant des centaines de femmes participant à l’Iftar annuel organisé par le comité des femmes du Hezbollah, Sayed Nasrallah a déploré la dégradation de la situation sécuritaire et humanitaire en Syrie, en Irak, à Bahreïn, en Arabie Saoudite et en Birmanie, accusant les forces étrangères et les régimes arabes complices de semer le chaos et la mort dans ces pays et d’empêcher le dialogue interne dans ces pays.

Sayed Nasrallah : « La résistance, seule force de dissuasion contre Israël »

S’exprimant sur le Liban, le secrétaire général du Hezbollah a réitéré que seule la résistance, forte et équipée d’armes, fait peur à l’ennemi israélien et l’empêche d’agresser le pays. Et de confirmer que le dialogue entre les Libanais est capable de mettre le pays à l’abri des projets des grandes puissances dans la région.

Les principales idées du discours de Sayed Hassan Nasrallah :

« Je salue les chères femmes du comité féminin rassemblées dans la banlieue Sud de Beyrouth, à Tyr, à Nabatiyeh, et à la Békaa en cette rencontre annuelle. J’implore Dieu le Tout puissant que nous puissions préserver les exploits de la résistance et je remercie les femmes du comité de soutien à la résistance islamique pour les efforts et le soutien moral, matériel et psychologique qu’elles apportent à cette résistance.

Avant d’aborder le sujet principal de mon discours, je voudrais commenter les derniers évènements survenus dans le Sinaï et la mort de 30 soldats égyptiens martyrs. Des médias disent même que certains soldats ont été égorgés. Ce qui s’est passé est condamnable et est un véritable crime. Malheureusement on attribue ces actes odieux à l’islam. Je présente mes condoléances à l’administration égyptienne et aux familles des victimes. Sachant que le premier bénéficiaire de ce crime est certes Israël. Cet incident est suspicieux. Malheureusement, la Bande de Gaza, qui s’attendait à des changements majeurs et à la liberté après les évolutions survenues sur la scène égyptienne, a été fermée de nouveau suite à cet attentat. Même les tunnels sont actuellement bloqués. De son côté, le peuple égyptien paie le prix de son aspiration à la démocratie et à la liberté.

Je vous assure que ce type d’incidents et d’attaques n’a rien à voir avec l’islam, ni avec les valeurs et les principes de l’islam, ni non plus avec les lois et les religions divines. Nous avons toujours mis en garde contre les tentatives d’attribuer ces actes à l’islam. C’est cette logique qui adopte la politique de la mort et du meurtre pour de simples divergences au niveau des points de vue. Cet esprit takfiri met en danger la stabilité de la région tout comme le danger sioniste. Des pays régionaux soutiennent et financent cet esprit en versant des millions de dollars par an, alors que des millions de pauvres et de déshérités sont abandonnés à leur sort.

Au Yémen, un homme suicidaire s’est fait exploser dans une cérémonie de deuil dans le but d’assassiner un responsable dans le pays. Des dizaines de personnes innocentes ont été tuées à l’exception de la personne visée.
En Syrie, on assiste tous les jours aux tueries et aux massacres, aux enlèvements des pèlerins libanais et iraniens, à l’expulsion des familles de leurs maisons et leurs terres. En Irak, les explosions se poursuivent, à Bahreïn et à Qatif, les citoyens sont agressés et abattus.
En Birmanie, la population est massacrée. En ces jours bénis, rien ne suscite la joie dans ce climat régional, au moment où les gouvernements observent un silence suspicieux.


De retour à l’affaire de la résistance libanaise, celle-ci occupe le devant de la scène depuis l’an 2000. En effet, on apporte une grande attention à cette cause tant sur le plan local qu’international. Je voudrais cette nuit débattre de quelques idées avancées sur la scène libanaise au sujet de la résistance. Les Israéliens considèrent que la résistance au Liban est la première menace pour leurs intérêts, et ils tiennent des propos en ce sens depuis les douze dernières années écoulées. Dans un dernier rapport sécuritaire américain, on assure que la plus grande menace pour Israël est le Hezbollah. Ceci signifie que les Israéliens ont peur d’agresser le Liban contrairement au reste des pays de la région. Cette conviction est due à la défaite cuisante d’Israël au Liban en 2000 et en 2006. Ils savent bien qu’au Liban il existe une résistance bien armée, forte, capable de protéger le pays.

Pour cette raison par exemple, Israël n’a pas exploité les derniers évènements dans la région pour attaquer le Liban, alors qu’en 1982, il a envahi le Liban, profitant des conflits entre l’Iran et l’Irak et de plusieurs autres facteurs de déstabilisation dans la région. Pourtant aujourd’hui, les motivations israéliennes pour attaquer le Liban sont multiples, à savoir les ambitions israéliennes dans les eaux et la terre libanaises, voire dans son pétrole et son gaz. Israël a peur de la force de la résistance. De nos jours, le marché américain des armes est très actif. Dans la région, on ne peut recenser les quantités d’armes qui parviennent aux groupes armés. Toutefois, Israël n’y affiche pas son opposition. Mais il menace de faire la guerre si une roquette est acheminée de la Syrie vers le Liban. Pourquoi ? Parce qu’Israël n’a pas peur des armées de la région, assujetties à l’administration américaine. Donc, toutes ces armes possédées par les armées arabes ne suscitent pas la peur d’Israël.

Au Liban, nous possédons une force de dissuasion qui est la résistance et c’est une réalité incontestable. Le Liban jouit donc d’une grâce divine qu’on doit protéger.

Le Liban, en tant que peuple et qu’État, sont-ils vraiment convaincus qu’ils peuvent vivre en paix sans la résistance ? Est-ce l’instant convenable pour désarmer la résistance ? Quelle sera la force de dissuasion alternative qui nous rassure face aux agressions et aux aspirations sionistes dans notre pays ? Aujourd’hui nous possédons du gaz et du pétrole dans les eaux libanaises alors que les réserves pétrolières dans les eaux palestiniennes sont à elles seules estimées à 265 milliards de dollars. Que fera Israël dans la région s’il parvient à mettre la main sur ces réserves ? De même, quelle sera la situation du Liban lorsque les revenus de la production et de la vente du pétrole seront évaluées à de dizaines de millions de dollars ? Comment garantir que nos eaux, notre pétrole voire notre population soient à l’abri de toute agression israélienne ?

Je m’adresse à ceux qui prônent le désarmement de la résistance : vous ne proposez que la mise de nos armes à la disposition de l’armée. Mais en effet, il faut que cette armée soit équipée des mêmes armes possédées par Israël pour garantir l’équilibre de la terreur. Nul ne peut démentir que le Liban est en danger et que cette résistance maintient l’équilibre de la terreur. Si vraiment l’existence de la résistance fait peur à certains Libanais, la solution sera avant tout de la protéger et de la soutenir face à Israël et de débattre ensuite entre nous de ces préoccupations.

Dans la région, nous assistons à des changements démographiques. Pour protéger le Liban contre ces changements, nous devons préserver notre facteur de force.

Parmi les prétextes avancés par les forces du 14 mars pour justifier leur opposition aux armes de la résistance, celles-ci prétendent que la présence de ces armes au Liban empêche la tenue des élections libres. En 2005, vous avez remporté les élections alors que les armes existaient. En 2009 de même, des élections ont été tenues alors que nous possédions nos armes. Comment alors ces armes ont influencé le déroulement ou la tenue des élections ? Vous venez de dire que les dernières élections qui ont eu lieu à Koura au Nord Liban sont les plus transparentes de toutes.

Par ailleurs, ces forces du 14 mars disent que la loi électorale de la proportionnalité ne peut être appliquée en présence des armes du Hezbollah. Ceci est illogique.

D’aucuns considèrent que le chaos des armes dans le pays est dû à la présence des armes de la résistance. En préparant mon discours, je me suis rappelé que des milices possèdent des armes au Liban depuis toujours, avant même ma naissance. Tous les Libanais possèdent des armes, ces armes qui provoquent la division et le chaos. Alors que la résistance possède des armes qui font peur à l’ennemi. On peut mettre fin au chaos des armes au Liban lorsque les dirigeants libanais discutent ensemble et se mettent d’accord sur ce point. Venez voir qu’au sud du pays, on ne distingue aucune forme de la présence d’armes dans cette région.

Troisième prétexte présenté par les forces du 14 mars : les armes de la résistance empêchent l’établissement de l’État. Mais avant la formation du Hezbollah, entre 1974 à 1990, y avait-il un État au Liban ? Pourquoi ne vient-on pas expliquer les véritables raisons qui empêchent la mise en place d’un État au Liban ? Parmi ces raisons par exemple, le confessionnalisme. Quand on veut construire un État, il faut mettre de côté les quotas confessionnels.

Autre facteur désavantageux : la corruption politique, financière, et administrative. Comment construire un État dans ce climat ? Certains changent le fusil d’épaule facilement en échange de l’argent. Les administrations de l’État ont besoin de réformes. Mais le problème est que les forces politiques protègent cette corruption. Des fois, on nous menace de guerre civile quand on parle du traitement et de la lutte contre la corruption.

Certains de nos alliés peuvent lutter plus facilement que nous contre la corruption parce qu’ils ne possèdent pas d’armes.

Malheureusement, le confessionnalisme et la corruption grandissent de plus en plus dans le pays. De plus, l’esprit confessionnel augmente de plus en plus chez la population. Dorénavant, nous devons expliquer à nos enfants comment avoir le sentiment de l’appartenance nationale. En tant que résistance, quand je déploie mes efforts pour libérer toutes les terres occupées libanaises, tous les prisonniers des geôles israéliennes, ceci signifie que je représente une résistance patriotique. Celui qui veut construire un État doit avant tout renforcer le sentiment de l’appartenance patriotique. Lutter contre le chômage pour tous, assurer l’eau et l’électricité pour tous. Nous, en tant que Hezbollah, profitons le plus de l’établissement d’un véritable État au Liban, un État qui lutte contre toute incitation à la division. La seule chance devant les Libanais pour établir un État patriotique est la présence de la résistance. Grâce à elle, les Libanais peuvent dire haut et fort aux États-Unis et aux Israéliens que voici nos frontières.

On a peur que ces armes et cette résistance dominent le pays. Nous possédons des armes depuis 30 ans mais nous n’avons pas mis la main sur l’État. Durant ces dernières années, nous avions la possibilité de mettre la main sur le pays. Toute autre force du 14 mars ayant les capacités de la résistance se serait accaparée du pouvoir depuis longtemps, mais nous n’agissons pas de la sorte. J’aurais pu menacer de détruire le Liban lors de mon discours à Bent Jbeil en 2000, mais au contraire, notre résistance est venue offrir cette victoire à tout le peuple, mais à ceux qui ont refusé d’admettre notre victoire.

Lors des évènements du 7 mai, je vous rappelle que le gouvernement s’en est pris au début à la résistance et les incidents ont ensuite éclaté. Une délégation de la Ligue arabe est venue faire une médiation. Un certain ministre arabe m’a contacté au téléphone sans fil pour me demander quelles sont les conditions du Hezbollah pour faire cesser les affrontements. Je lui avais dit que nous avions deux conditions :

1- l’élimination des deux résolutions prises par le gouvernement.

2- Le retour à la table du dialogue. Ce ministre fut stupéfait de ces demandes et c’est lui qui a essayé de me convaincre d’ajouter d’autres revendications. Nous avions la capacité de mettre la main très facilement sur le Liban le 7 mai 2008.


Sur un autre plan, je voudrais assurer à tout le monde qu’au Liban, le principe de la communauté qui dirige les autres n’existe plus. Au nom de tous les chiites, j’affirme aujourd’hui que notre communauté ne veut point régner au Liban. Ce pays ne peut être construit aux dépens de telle ou telle communauté. Celui qui aspire à l’unité du Liban ne doit pas penser à dominer les autres communautés. Un dialogue sérieux est donc la seule issue aux problèmes dans le pays. D’aucuns ne cherchent pas de dialogue sérieux, ils ne s’intéressent qu’à arracher les armes de la résistance. Ils s’opposent à toute amélioration du régime.

Mais en réalité ils ne veulent que 2 choses : désarmer le Hezbollah et accéder au pouvoir. Bon, si vous nous désarmez, pourrez-vous protéger le Liban ? Vous êtes incapables de procurer un missile à l’armée. Si vous accédez au pouvoir, comment allez-vous lutter contre la corruption alors que vous en êtes responsables ? Si les forces du 14 mars accèdent au gouvernement, le nord Liban et la Békaa seront des fronts ouverts contre la Syrie, et les pays de la région et l’occident y construiront des bases militaires contre la Syrie.

Enfin, nous espérons que le dialogue ne sera pas interdit au Liban, et je souhaite que les forces du 14 mars ne soient pas interdites de le faire. En Syrie, le dialogue est interdit à cause du refus des États-Unis et des pays de la région. Israël et l’occident cherchent la destruction de la Syrie, et on y interdit tout dialogue. Peu leur importe les souffrances humanitaires. Le recours à l’option militaire signifie que le bain de sang se poursuivra. La seule solution politique en Syrie est le dialogue. J’espère que les Libanais pourront toujours dialoguer ensemble sans que personne ne leur interdise.

Enfin, grâce à votre soutien, la résistance pourra poursuivre son action et réaliser de nouvelles victoires dans l’avenir.


Source : Al Manar

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