23 mai 2010


Cérémonie en hommage à ceux qui travaillent au comité de soutien à la résistance

Discours du secrétaire général du Hezbollah Sayed Hassan Nasrallah au cours de la cérémonie en hommage à ceux qui travaillent dans le cadre du comité de soutien à la résistance.


Dans ce discours, Sayed Nasrallah a évoqué tous les sujets de l’heure, notamment les propos de plus en plus nombreux sur une guerre prochaine dans la région. A ce sujet, le secrétaire général du Hezbollah a affirmé que s’il existe un projet politique pour la région, la guerre aura lieu. Mais pour l’instant, les contours d’un tel projet ne sont pas visibles. Il a donc invité les Libanais à se détendre et à participer aux élections municipales, tout en exprimant leur appui à la résistance et leur volonté nationale, car, a-t-il ajouté, l’unité et la solidarité font partie des moyens de dissuasion pour pousser l’ennemi israélien à renoncer à ces projets guerriers
Au sujet des armes que le Hezbollah détiendrait, Nasrallah a affirmé que son parti ne sent nullement obligé de nier ou de confirmer la possession de certains types d’armes. « C’est notre politique et nous la confirmons », a-t-il déclaré, ajoutant : « Posséder des armes de toutes sortes relève de notre droit légal, moral, religieux et humain. Car nous voulons ces armes pour défendre les êtres nobles, menacés ou opprimés par l’existence quasi cancéreuse de l’Etat d’"Israël". Là où nous pourrons exercer ce droit, nous le ferons sans hésiter, ni reculer ».
Au sujet des élections municipales, Sayed Nasrallah a souhaité qu’il y ait une unanimité autour des listes d’entente formées par le parti et le mouvement Amal. Mais il a ajouté que cela ne signifie nullement que ceux qui souhaitent s’engager dans l’action municipale en dehors de ces listes ne peuvent pas le faire. « Il n’est pas permis que des divergences de ce genre se transforment en conflit politique dans n’importe quelle localité, a précisé le sayed, et que l’on dise ensuite celui qui n’était pas dans les listes d’entente est contre la résistance…». Evoquant le scrutin municipal dans la capitale, Sayed Nasrallah a relevé le fait que depuis quelques jours certains affirment que la capitale se dirige vers une bataille et le discours confessionnel a recommencé à apparaître. Le chef du Hezbollah a donc rappelé que le parti appuie l’entente dans la capitale et travaille dans ce sens, tout en souhaitant la formation d’une liste dans laquelle toutes les parties sont représentées. « Si nous ne parvenons pas à former une telle liste, nous aurons le choix entre plusieurs options et nous étudierons alors laquelle prendre ».

Voici le texte du discours:


Bismillah al Rahmane al Rahim (Au nom de Dieu miséricordieux…), je voudrais d’abord exprimer ma joie de vous rencontrer mes frères et mes sœurs qui sont là. Comme vous, j’étais impatient de tenir cette rencontre que nous attendons et que nous préparons depuis longtemps, et que nous avons été contraints à reporter à plusieurs reprises à cause des développements. Cette rencontre a finalement lieu en ce début du mois de mai, mois de la victoire de la résistance islamiste ; en cette année précise où nous célébrons le dixième anniversaire de cette victoire.
Lorsque nous parlons de la résistance, nous parlons aussi naturellement du comité de soutien à cette résistance, tant la relation est organique entre les deux. Et lorsque nous parlons de sa victoire, celle-ci est aussi la vôtre, car vous en faites tous et toutes partie.
Nous souhaitons que la victoire de la résistance soit célébrée dignement cette année, sur le plan national, officiel et populaire, tant il s’agit d’une fête grandiose pour le Liban et pour la Oumma. En insistant pour célébrer dignement la fête de la libération et de la résistance, nous cherchons à ce que nos enfants et nos petits enfants, ainsi que nos peuples et nos générations vivent des jours de victoire dans notre histoire contemporaine. Depuis 1962, l’anniversaire de la nakba est commémoré chaque année, ainsi que l’invasion israélienne du Liban en 1982 et la défaite qui l’a suivie. Comme si nos jours et notre mémoire étaient marqués par les défaites, les exodes et les massacres. La résistance au Liban a donné la journée de la victoire et le spectacle de cette victoire, transformant cette journée en jour fête de la dignité, une journée de joie et de bonheur. Malgré cela, certains cherchent à occulter cette journée, ainsi que la victoire historique qu’elle célèbre. Dans les prochains jours, mes frères et moi auront l’occasion de revenir sur cette victoire et sur sa signification, ainsi que sur la responsabilité qu’elle entraîne.
Je voudrais toutefois rappeler que la victoire de 2000 est la réalisation d’une promesse divine, selon le verset du Coran qui dit : « Si vous rendez justice à Dieu, il vous rendra justice et consolidera vos pas ».
Au cours de notre rencontre, j’aborderai trois sujets : le premier concerne le comité de soutien à la résistance et ses activités, le second porte sur les élections municipales et le troisième sera consacré au tapage provoqué par les déclarations américaines et israéliennes depuis quelques semaines au sujet des armes et des missiles ainsi que sur les menaces qu’il génère.
Concernant le premier sujet, il est incontestable que le comité de soutien créé dans les années 80 est partie intégrante de la résistance. A nos yeux, la résistance est une action complète et diversifiée qui englobe les secteurs militaires, politiques, culturels, sociaux, logistiques, relationnels et moraux. Certes, la dimension militaire est la plus importante dans la résistance et elle en constitue le fer de lance et la concrétisation finale, mais elle est aussi le fruit des efforts culturels, de la mobilisation religieuse et nationale, de l’action sur le terrain, de l’organisation, des entraînements, du financement, de l’action sociale et de l’action politique. La résistance, c’est toutes ces actions ensemble, c’est pourquoi le comité de soutien en est partie intégrante au même titre que l’action culturelle, structurelle et d’entraînement et au même titre que l’action militaire. Depuis le début, donc, l’action du comité de soutien, sur le plan moral, politique social et médiatique, tout comme sur le plan financier et matériel a été importante, nécessaire et efficace dans l’action et le jihad de la résistance. Je me souviens d’ailleurs qu’après la victoire de mai 2000, un débat a eu lieu entre les frères au sujet du sort qu’il faudra réserver à certaines structures de la résistance ou qui la soutiennent : fallait-il les supprimer ou les intégrer à d’autres structures. A cette époque, la réponse avait été la suivante : avant de dire si nous avions encore besoin du comité de soutien à la résistance, il fallait se demander si nous avions encore besoin de la résistance. Si la réponse, le comité de soutien est alors nécessaire, dans sa dimension morale et matérielle. Je voudrais ainsi dire aux frères et aux sœurs que Dieu a honorés en les amenant à travailler au comité de soutien que tant qu’il y aura une résistance, il y aura aussi un comité de soutien.
Tant qu’il y aura une résistance, celle-ci aura besoin de personnes et de groupes qui porteront son message, sa culture et sa pensée, ainsi que la pureté de son sang et de l’âme de ses martyrs et l’ampleur de son sacrifice, aux autres. Vous devez donc continuer à remplir votre mission. Tant qu’il y aura une résistance, il faut laisser une porte ouverte aux gens pour qu’ils puissent donner de l’aide et de l’argent. Ici, je voudrais m’étendre un peu sur la question de l’aide financière. Lorsque le Coran, les Prophètes et le prophète dans ses propos évoquent le Jihad, ils le situent contre l’ennemi. Il y a naturellement le grand jihad, celui de l’âme contre les forces qui veulent entraîner l’homme dans le feu de l’enfer et dans ce cas, le jihadiste se défend, résiste et empêche ces forces de contrôler son esprit et ses sentiments le poussant à commettre le mal. Il y aussi l’autre jihad contre un ennemi extérieur et celui-là est de deux sortes, avec l’âme et avec l’argent. De nombreux versets du Coran parlent de ces deux formes de Jihad.
Concernant le jihad financier, je voudrais préciser ceci : lorsqu’une armée étrangère et hostile occupe un pays, toute la population de celui-ci doit le défendre. Si une partie le fait avec les armes et aux prix de sa vie, l’autre doit l’aider. Le jihad financier est donc un devoir lorsqu’il existe un besoin d’argent et un acte souhaité lorsque l’argent n’est pas une priorité. Je le dis franchement : nous remercions tous ceux qui nous font des dons en argent ou en biens, mais nous tenons à leur dire que ces dons ne doivent pas être considérés comme des actes de bienfaisance. S’ils le font dans cet esprit, nous préférons qu’ils accordent leurs dons aux pauvres, aux orphelins ou aux miséreux. L’argent donné à la résistance est utilisé pour acheter des armes, organiser des entraînements, trouver des équipements et assurer les bases de la résistance. Il n’est pas donné aux pauvres et aux nécessiteux.
Ce qui est donné à la résistance s’inscrit sous le titre du jihad financier. Il a ses règles, ses niveaux et sa place auprès d’Allah.Certains disent que la résistance a de grands moyens et de puissantes institutions, par conséquent, elle n’a pas besoin de l’argent donné par les pauvres ou ceux dont les revenus sont limités. Je dirais indépendamment du fait de savoir si la résistance a besoin ou non de cet argent, ces dons sont nécessaires parce qu’ils permettent à tous de participer à la défense de leur pays, à la libération de leur terre et à la préservation de leur dignité et ils obéissent ainsi aux instructions de Dieu qui leur impose de faire le jihad financier et le jihad de la vie.
Par ailleurs, je considère que la présence de petites tirelires dans les maisons, dans lesquelles les enfants peuvent mettre des pièces pour la résistance est de la plus haute importance, car elle a une dimension éducative et culturelle. Si les parents donnent à leurs enfants l’habitude de mettre chaque matin une pièce dans la tirelire ayant la forme de la mosquée sainte, Jérusalem et la mosquée sainte seront présentes dans chaque maison et grandiront dans les mémoires des enfants. Je voudrais encore préciser une chose : l’argent donné par quelqu’un qui en a besoin et qui se prive pour faire un don à la résistance sera utilisé pour acheter un obus qui, j’en suis sûr atteindra sa cible car cette personne obéit aux instructions de Dieu. Quant à l’argent donné avec des intentions qui ne sont pas aussi pures (par exemple pour obtenir en contrepartie l’aide de la résistance dans les élections municipales), il sera utilisé pour l’achat d’un obus qui, lui, pourrait rater sa cible. Je suis convaincu –et cette conviction est basée sur des données- que les sommes même peu importantes, données avec des intentions pures, ont un effet grandiose, alors pourquoi priver la résistance de ces sommes-là ?
Cette porte-là doit donc rester ouverte. Ce qui nous importe, c’est que les gens dépensent leur argent en songeant à leur mort. S’ils font des dons aux pauvres ou pour construire une école ou une mosquée, nous serons heureux. Et s’ils font des dons pour que la résistance puisse triompher de l’ennemi, nous le serons aussi. Mais en fin de compte, ils dépensent pour leur mort et c et argent sera compté au moment de la résurrection ; le comité de soutien à la résistance n’est qu’un intermédiaire.
L’importance du comité de soutien est devenue claire et je voudrais remercier tout le monde, du directeur général, l’ami et le frère hajj Hussein Chami, ainsi que tous les membres des différentes sections dans les régions, tous les volontaires et tous ceux qui contribuent au succès de ce comité. Je voudrais aussi dire que ce qui compte, c’est l’intention. Si celle-ci est bonne, l’action portera ses fruits, sinon, elle pourrait donner un résultat dans ce monde, mais elle n’en aura pas dans l’autre. Je vous invite donc à poursuivre votre action et vous êtes devenus des spécialistes, avec sincérité et sérieux. Car ce qui va se produire et que je vais développer n’est pas moins important, sur le plan des prévisions et des responsabilités que ce que nous avons vécu au cours des précédentes décennies.
Je vais aborder maintenant le second sujet relatif aux élections municipales, toujours sous l’angle de la résistance. Je voudrais préciser ce que tout le monde sait : nous faisons partie de ceux qui disent la même chose en privé et en public. Lorsque l’échéance électorale s’est rapprochée, j’ai prononcé un discours télévisé dans lequel j’ai demandé un report de six mois ou d’un an. Naturellement et nul ne peut croire le contraire, nous ne faisons pas cette demande parce que le Hezbollah craint les élections municipales ou leur résultat dans certaines localités. Nous avions simplement en tête la situation générale du pays et dans la région ainsi que les menaces et les hypothèses envisagées. Nous pensions que l’esprit électoral allait placer le pays dans une situation de confrontation et de conflit, même si nous disons que ces élections ont une dimension villageoise et familiale. C’est vrai mais pas totalement car toutes les parties politiques participent aussi aux élections municipales. En organisant ces élections, le pays allait entrer dans un climat de rivalités dont il aurait préféré faire l’économie. D’ailleurs, il y a eu des tiraillements et il y a eu un examen sérieux de la possibilité du report. Finalement, les élections ont été décidées à la date prévue et s’il faut voir un élément positif dans ce qui se passe, on pourrait dire que le délai limité entre la décision et la tenue des élections pourrait avoir des répercussions positives en poussant les protagonistes à privilégier les ententes et à ne pas aiguiser les conflits entre eux.
Sur la scène qui intéresse directement le Hezbollah, le choix a été décidé. L’alliance avec Amal est une décision prise depuis des années et elle est toujours en vigueur, indépendamment du délai pour les campagnes ou du report éventuel. Lorsque le rendez-vous des élections a été fixe, il ne nous a fallu que quelques jours pour signer un accord entre nous, après les réunions des équipes respectives. Je l’ai signé moi-même ainsi que le président de la Chambre Naibih Berry et il a été aussitôt communiqué à toutes les régions. Il ne laisse aucune possibilité d’interprétation, ni aucune place au conflit.
Après la conclusion de cet accord, une tendance vers l’entente est apparue dans le pays, certaines municipalités ont été élues d’office et la rivalité aura lieu dans un nombre relativement petit de localités. Ce qui est positif car la bataille municipale n’exige pas le déploiement de grands moyens ni la présentation d’enjeux considérables comme veulent le présenter certains.
Je voudrais préciser qu’à travers l’entente avec Amal, les deux formations n’ont pas voulu imposer leur volonté aux citoyens et aux familles dans les villages. Au contraire, en intervenant, nous avons voulu réduire la tension et empêcher une rivalité ou un conflit familial de prendre une envergure plus grande. Car certaines personnes pour devenir président d’une municipalité dont prêtes à ouvrir des dossiers vieux de dix ans ou plus et de raviver les conflits familiaux. Ce qui se passe dans les municipalités est d’ailleurs une image réduite de ce qui se passe sur le plan national. Pour devenir ministres députés ou même présidents, certains sont prêts à faire régner le chaos dans le pays, en utilisant les susceptibilités confessionnelles et en poussant vers la discorde. Dans les municipales, ce genre de personne n’utilise peut-être pas la confession, mais la famille. Ces personnes mettent en avant les arbres généalogiques et déterrent les vieux conflits.
En réalité, l’alliance entre Amal et le Hezbollah n’est pas seulement souhaitée, elle est un devoir car elle vise à renforcer l’immunité des villes et villages les plus exposés. Il s’agit en fait de préserver l’atmosphère née pendant et après la guerre de 2006. Si Amal et le Hezbollah ne s’étaient pas entendus, ils auraient eu à répondre de cette question le jour de la résurrection. Même les gens leur auront demandé : comment pouvez-vous entrer en conflit sur des sièges municipaux alors que le pays et la région toue entière sont à la veille d’événements graves et dangereux ? Contrairement à ce que certains écrivent dans les médias –ceux-là adorent critiquer, c’est leur métier-, l’entente entre Amal et le Hezbollah a été bien accueillie par la population qui n’en est nullement dérangée. Nous vivons avec les gens et nous connaissons bien le terrain.
Je voudrais dire aujourd’hui aux électeurs participez massivement aux élections municipales et ne dites surtout pas à quoi cela sert puisque les résultats sont connus d’avance. Au contraire, la participation à ce scrutin est une participation dans les responsabilités et une participation dans la vie politique. Tout comme elle permet d’avoir des conseils municipaux plus forts face à l’adversité. Certains diront ce choix se fera aux dépens du développement et je répondrai : c’est totalement faux. Dans les villages où les listes d’entente entre Amal et le Hezbollah l’emporteront, il y aura un meilleur développement car toutes les forces en place mettront leurs efforts en commun pour assurer le développement de ces localités. Le conseil municipal issu de l’entente sera plus fort et n’aura pas à prendre en considération telle ou telle autre partie pour exécuter ses projets. Il sera donc plus en mesure d’assurer le développement des localités.
Une dernière précision au sujet des municipales : je voudrais rappeler que nous avons essayé d’englober toutes les parties en présence dans les listes d’entente, mais dans certains cas, nous n’avons pas pu trouver une place pour tout le monde, notamment de petites formations ou des familles dont plusieurs membres sont candidats. A nos partisans au Hezbollah et à Amal, je voudrais dire que ceux qui ont présenté leurs candidatures dans des listes incomplètes ou individuellement, en dehors des listes d’entente, ne sont pas nos ennemis ou nos adversaires. Ce sont des personnes libres qui ont le droit de se présenter aux élections. Nul ne peut les priver de ce droit. Nous pouvons tous être d’accord sur les grands principes et sur la résistance en particulier et être en désaccord sur des points secondaires notamment la formation du Conseil municipal. Il ne faut pas que ce genre de conflit se transforme en rivalité et animosité.
Certes, je le répète, nous préférons le succès des listes d’entente et nous poussons dans cette voie, mais cela ne signifie pas que nous devons empêcher ceux qui se présentent en dehors de ces listes d’exercer leur droit, ni surtout transformer ces divergences en conflit politique. Je vous en conjure, dans le domaine municipal, laissons la résistance de côté. Aussi bien ceux qui sont dans que ceux qui hors des listes d’entente sont avec la résistance. En tant que forces politiques, nous avons préféré ne pas pousser les municipalités vers les conflits. Nous avons choisi de coopérer, d’être présents et efficaces. Nous ne voulons entrer en conflit avec personne. Ces derniers jours, certains ont affirmé que Beyrouth se dirige vers une bataille et le discours confessionnel a commencé à réapparaître. A Beyrouth, nous sommes avec l’entente et nous avons œuvré pour la formation d’une liste au sein de laquelle toutes les parties seraient représentées. Cette option ayant échoué, nous avons plusieurs autres options. Nous choisirons celle qui convient le mieux. Mais en résumé je peux dire que ce que nous voulons de ces élections c’est que les villes et localités libanaises soient dotées de nouveaux conseils municipaux au moindre coût politique et social, avec le moins possible de conflits entre les familles, les courants politiques et les forces sociales.
Concernant le sujet le plus important, vous savez que depuis quatre ou cinq mois, les responsables sionistes multiplient les menaces contre le Liban. Il s’agit tantôt de détruire la banlieue sud et tantôt l’infrastructure, puis d’envahir le Sud et encore d’envahir tout le Liban. Bref, tous les scénarios ont été développés dans les médias, plus précisément depuis le 16 février date de la commémoration de nos martyrs. Ce jour-là, nous avons prononcé des propos clairs et le lendemain, Shimon Pérès a affirmé qu’Israël ne veut pas lancer une guerre contre le Liban. Netanyahu, Barak et Achkénazy ont repris la même thèse, assurant qu’ils n’ont aucune intention de mener une guerre contre le Liban.
Chacun peut faire l’analyse de son choix, mais il est certain qu’il y a désormais un avant et un après 16 février, qui est devenue une date cruciale. Ce jour-là, en votre nom et au nom des martyrs, nous avons dit aux Israéliens que leurs menaces ne nous font pas peur et que nous sommes prêts à leur infliger une nouvelle défaite humiliante et à défendre nos villages et nos villes, notre infrastructure et notre dignité. Les israéliens ont lu attentivement ces propos et ils savent que nous ne plaisantons pas avec ce sujet. Je le répète aujourd’hui : c’est vrai que je cherche à travers mes discours à mener une guerre psychologique, mais celle-ci est basée sur des données objectives. Nous ne menons pas une guerre psychologique avec de la ruse et des mensonges, même si sur le plan théorique on peut discuter de la légitimité de ruser avec l’ennemi. Malgré cela, nous n’utilisons pas ce procédé et notre guerre psychologique est basée sur des données réelles et l’Israéliens le sait. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle son discours a changé depuis le 17 février.
Il y a quelques jours, l’affaire des Scuds est apparue dans la presse. Elle a été attribuée aux Américains par un quotidien du Golfe. Shimon Pérès s’en est emparée et a soulevé la question en France. Les médias israéliens ont repris l’affaire et à leur tour, les Américains en ont fait leur pain quotidien jusqu’à ce jour. En gros, l’histoire consiste à dire que la Syrie a remis au Hezbollah des missiles de type scud. Mme Clinton en parle tous les jours en s’adressant à la Syrie et à l’Iran et l’affaire prend de plus en plus d’ampleur. Je voudrais simplement demander à ceux qui accusent la Syrie d’avoir remis ces missiles au Hezbollah : quelles sont les preuves que vous détenez pour avancer de telles affirmations ? Nul n’a donné la moindre preuve et une bataille longue et importante est menée sans la moindre preuve.
Je voudrais aussi dire en second lieu que la Syrie a démenti catégoriquement avoir remis ces missiles au Hezbollah. Troisièmement, le Hezbollah ne se sent nullement obligé de confirmer ou de démentir la possession d’un type précis d’armes. C’est notre politique et nous la confirmons. Certains ont dit puisque les pressions sont aujourd’hui très fortes, peut-être serait-il bon de modifier cette politique et nous disons non. Notre politique reste la même, nous restons dans les généralités, dans ce qui touche à l’ensemble de la force. C’est aux Israéliens de chercher à interpréter, à analyser et à recouper les informations. Nous autres, nous ne faisons pas le moindre commentaire. De plus, si nous devions infirmer ou confirmer aujourd’hui la possession de scuds, cela voudrait dire que tout ce que nous n’avons ni confirmé ni infirmé n’existe pas. Nous préférons donc en rester à notre politique habituelle de ne pas donner d’indications.
Quatrièmement, nous refusons que quelqu’un discute notre droit de détenir des armes. A nous de les utiliser ou non. Lorsque le secrétaire d’Etat américain à la Défense Robert Gates affirme que le Hezbollah possède un arsenal plus important que ceux de beaucoup de gouvernements dans le monde, je ne dirais pas si c’est faux ou vrai. Par contre, je rappellerais que lorsqu’il a tenu ces propos, Gates se trouvait à côté de Batak qui possède un arsenal que peu de gouvernements dans le monde ont. Il possède des armes chimiques interdites internationalement que peu de gouvernements ont. Il exerce un terrorisme d’Etat, tue les femmes et commet des massacres au Liban et en Palestine comme peu de gouvernements dans le monde le font. Gates se tient donc aux côtés d’un homme dont l’Etat est surarmé, viole les souverainetés des autres pays et verse le sang des innocents, mais cela ne semble pas le déranger. Mais qu’au Liban, en Syrie, en Palestine ou en Iran quelqu’un possède des armes pour défendre son peuple, son sang, sa dignité et sa souveraineté, il mérite d’être condamné et critiqué. Nous rejetons cette logique.
Je voudrais donc dire : que nous détenions tous genres d’armes –et là vous pouvez laisser courir votre imagination- est notre droit légal, humain, moral et religieux. Car ces armes, nous les destinons à défendre les nobles gens et les opprimés, menacés par la présence quasi cancéreuse d’Israël. Là où nous pourrons utiliser ces armes, nous le ferons et je vous le dis, je ne crois pas que l’affaire des scuds soit un prélude à une guerre. Si Dieu le veut, je serai dans le vrai…
A mon avis, toute cette campagne et tout ce bruit est destiné à exercer des pressions sur la résistance, sur les Libanais, sur la Syrie, la Palestine et l’Iran, pour leur dire qu’il y a des lignes rouges. Il y a des types d’armes que vous n’avez pas le droit de détenir, car il modifie l’équilibre des forces. Certains types d’armes peuvent donc provoquer une guerre. Le but est donc de nous empêcher de devenir plus forts. Et avec tout ce tapage, l’Iran, la Syrie, le Liban, le Hezbollah ou la résistance en Palestine vont réfléchir à deux fois avant de se procurer certains types d’armes. Le but principal est donc de faire peur et d’empêcher « les pays qui résistent » de vouloir se doter d’une plus grande puissance, car l’intérêt des Etats-Unis exige qu’il n’y ait pas d’Etat puissant dans la région et celui des Américains et des Israéliens consiste à empêcher l’émergence de forces de résistance puissantes. Ce qui est demandé c’est que la région arabo-musulmane reste faible et humiliée pour qu’elle puisse rester sous l’hégémonie des Américains et accepter en définitive une paix avec les Israéliens aux conditions de Netanyahu.
Je vous le dis, cet objectif ne sera pas atteint et le tapage autour des scuds aura un effet contraire. Il fera plus peur aux habitants de Tel Aviv et de Bir Sabeh. En parlant des scuds, nous parlons aussi Eilat, qui constitue la ville palestinienne occupée la plus éloignée de nos frontières. De leur côté, nos gens penseront : la résistance possède des scuds, c’est magnifique car cela signifie que l’équilibre de la dissuasion sera réel et si Israël songe à lancer une guerre, il devra réfléchir à deux fois. C’est dire que la politique suivie a atteint un objectif contraire.
De plus, l’objectif de la campagne des scuds est de détourner l’attention de la divergence entre les Etats-Unis et Israël. Entre les deux, il n’y a pas une convergence à cent pour cent. Il existe un accord total et un plafond commun sur le plan général, qui consiste à protéger la sécurité d’Israël. A ce sujet, Barak Obama, Hillary Clinton et George Bush ont la même politique : garantir la sécurité et la suprématie d’Israël. Ce sont là des lignes rouges. Le reste est une divergence tactique dans la perception des intérêts. Les Américains disent à Netanyahu, comme l’a fait Mme Clinton à la conférence de l’Aipac : votre intérêt consiste à signer un compromis aujourd’hui, car nul ne sait si vous pourrez le faire dans l’avenir. La situation démographique dans la région est en train de changer, la résistance est en train de se renforcer ses moyens sont en train d’augmenter. L’avenir est donc porteur de grands dangers. Aujourd’hui, vous trouvez quelqu’un qui accepte de signer avec vous. Ce ne sera peut-être pas le cas plus tard… C’est le point de vue des Américains, mais les Israéliens préfèrent ne pas faire de concessions, même mineures.
La divergence est donc dans la tactique et porte sur des détails. Et tous les deux se réfugient dans le tapage pour régler leurs divergences dans la discrétion.
Un des objectifs- et nous devons en être conscients pour ne pas aller dans ce sens- est de présenter Israël comme s’il était menacé de disparition. En d’autres termes, il s’agit de crier au loup et de montrer Israël comme une victime persécutée et opprimée, lui donnant ainsi le droit de s’accrocher à sa violation des territoires, à son refus de réintégrer les réfugiés et à sa volonté de lancer des guerres contre les Etats et les populations de la région.
Les Américains et les Israéliens affirment que la Syrie a remis des missiles scuds au Hezbollah. Combien ? Ils n’avancent pas de chiffres. Mais ces missiles menacent-ils l’existence d’Israël ? Non, mais la possibilité de se défendre est considérée par eux comme une ligne rouge. Dans leur optique, Gaza avec sa population et ses missiles est devenue une menace pour Israël et celui-ci a le droit de faire ce qu’il fait dans cette bande.
Au Liban, beaucoup ne lisent pas attentivement les déclarations israéliennes. Certes, les responsables israéliens ont parlé des scuds mais ils ont aussi dit qu’ils ne veulent pas lancer une guerre contre le Liban. Pourquoi dans ce cas nous poursuit-on avec l’idée d’une telle guerre ? Les dirigeants israéliens n’ont même pas affirmé que les missiles scuds sont de nature à modifier les équilibres militaires. Ils ont dit : Le Hezbollah a désormais des missiles scuds. Nous rejetons ce fait, mais nous ne voulons pas lancer une guerre au Liban. Quant à savoir si nous les croyons ou non, c’est une autre affaire…
De toute façon, les Israéliens ne considèrent pas qu’un missile de plus ou de moins est de nature à modifier les équilibres militaires. Sinon, cet équilibre aurait été brisé depuis longtemps. Non, pour eux, ce qui compte, c’est la défense anti-aérienne. Ils l’ont déclaré à plusieurs reprises : si le Hezbollah détient des armes en mesure d’empêcher l’aviation israélienne de détruire et de tuer alors ils considèreront que l’équilibre militaire a été rompu.
Le climat général n’est pas un climat de guerre. Si les Israéliens voulaient lancer une guerre, ils ne créeraient pas une telle atmosphère. Avant l’invasion de 1982, le calme régnait au sud Liban. La région semblait d’ailleurs dans un autre monde, sur le plan médiatique. Il y a eu ensuite un plan politique pour le Liban et la région et l’invasion a eu lieu. Même scénario en 2006. Le calme régnait. Nous avions même capturé des prisonniers à Chebaa et il n’y avait pas eu de réaction. Nous avions aussi riposté contre le survol des avions israéliens en lançant des roquettes au-dessus des colonies de peuplement et il n’y avait pas non plus eu de réaction. Des Palestiniens avaient traversé les frontières pour mener des attaques dans le nord de la Palestine occupé, et encore une fois, les Israéliens n’avaient pas réagi. Mais le 12 juillet, parce qu’il y avait un plan politique général, sous le nom de « nouveau Moyen Orient », la guerre a eu lieu. Ce ne sont donc ni les scuds, ni d’autres missiles, ni les armes de la résistance en général qui provoqueront une guerre. Seul un nouveau projet politique pour la région peut entraîner une guerre.
Pour l’instant, les contours d’un tel projet ne sont pas clairs. En juillet 2006, certains ont dit que nos estimations ont échoué. Je dirais qu’effectivement, nous avons souffert d’un manque d’informations relatives au projet politique. Nous lisions dans un endroit et un vaste complot doté de grandes complicités a eu lieu ailleurs. Nous ne pensions pas qu’il y aurait un tel de gré de complicité et de si grand complots. Aujourd’hui, nous sommes conscients de tous les risques et nous surveillons toutes les pistes. En face, il y a un projet qui a échoué…
Je dirais même plus, lorsque les Israéliens se tairont et que les Américains sont calmes et qu’il n’y a plus de tapage, à ce moment-là, nous aurons toutes les raisons d’être inquiets. Mais lorsqu’ils crient, tempêtent et menacent, c’est qu’ils n’ont rien d’autre. Depuis 1948 à nos jours, chaque guerre israélienne a été précédée d’un grand silence de la part d’Israël. Que personne ne cherche donc à nous effrayer. J’invite les Libanais à se calmer, à se reposer et à s’occuper des élections municipales, tout en restant solidaires avec leur résistance et en exprimant leur unité nationale et leur solidarité. Car cette unité et cette solidarité constituent un des éléments qui poussera Israël à réfléchir avant de lancer une agression. C’est un facteur de dissuasion.


Traduction: Soraya Hélou

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