Le grand et le petit apartheid d’Israël : la signification d’un Etat juif
vendredi 30 avril 2010
Jonathan Cook
Discours prononcé à la 5è Conférence internationale de Bil’in sur la Résistance populaire palestinienne, le 21 avril à Bil’in, Cisjordanie.
Les apologistes d’Israël sont très préoccupés par l’idée qu’Israël ait fait l’objet d’investigations et de critiques particulières. Je voudrais affirmer cependant que dans la plupart des débats concernant Israël, celui-ci s’en tire à bon compte : que bien des aspects de la politique israélienne seraient considérés comme exceptionnels voire extraordinaires dans tout autre Etat démocratique.
Cela n’est pas surprenant parce ce que, comme je vais l’exposer, Israël n’est ni une démocratie libérale ni même un « Etat juif et démocratique », comme ses partisans le prétendent. C’est un Etat d’apartheid, non seulement dans les territoires occupés de Cisjordanie et de la bande de Gaza, mais à l’intérieur même d’Israël. Aujourd’hui, dans les territoires occupés, la nature d’apartheid du régime israélien est irréfutable - et si peu évoquée par les politiciens ou les médias occidentaux. Mais en Israël, elle est en grande partie voilée et cachée. Mon but aujourd’hui est d’essayer de soulever un peu le voile.
Je dis « un peu », parce qu’il me faudrait beaucoup plus que le temps qui m’est imparti pour traiter correctement et à fond le sujet. Il y a, par exemple, quelque 30 lois qui établissent explicitement une discrimination entre juifs et non-juifs - autre façon de se référer au cinquième de la population israélienne composé de Palestiniens censés profiter de la pleine citoyenneté. Il y a aussi beaucoup d’autres lois et de pratiques administratives israéliennes qui conduisent à une ségrégation ethnique, même si ces discriminations ne sont pas aussi manifestes.
Ainsi, au lieu d’essayer de me plonger dans tous les aspects de l’apartheid israélien, permettez-moi de me concentrer plutôt sur quelques-uns de ses traits révélateurs, des questions sur lesquelles d’ailleurs j’ai écrit récemment.
D’abord, examinons la nature de la citoyenneté israélienne.
Il y a quelques semaines, j’ai rencontré Uzi Ornan, un professeur de 86 ans qui enseigne au Technion, une université de Haïfa, et qui est l’une des rares personnes à posséder une carte d’identité en Israël indiquant comme nationalité, « Hébreu ». Pour la plupart des autres Israéliens, leur carte et leurs documents personnels déclarent qu’ils sont de nationalité « juive » ou « arabe ». Pour les immigrants dont la judéité est reconnue par l’Etat mais qui pose question aux autorités rabbiniques, quelque 130 autres classifications de nationalité sont approuvées, la plupart ayant trait à la religion de la personne, ou à son pays d’origine. La seule nationalité que vous ne trouverez pas sur la liste, c’est « Israélien ». C’est précisément pourquoi le Professeur Oran, et quelques douzaines d’autres, se battent devant les tribunaux : ils veulent être enregistrés en tant qu’ « Israélien ». Il s’agit d’un combat extrêmement important - et pour cette seule raison, ils sont quasiment certains de le perdre. Pourquoi ?
Ce qui est en jeu, c’est beaucoup plus que l’étiquette ethnique ou nationale. Israël exclut une nationalité d’ « Israélien » afin que, dans l’accomplissement de son autodétermination en tant qu’ « Etat juif », il soit en mesure d’attribuer des droits de citoyenneté à la « nation » collective des juifs du monde, supérieurs à ceux de la masse des citoyens actuellement sur son territoire, à savoir de nombreux Palestiniens. Dans la pratique, il agit en créant deux classes principales de citoyenneté : une citoyenneté juive pour les « nationaux juifs » et une citoyenneté arabe pour les « nationaux arabes ». Les deux nationalités ont été en réalité inventées par Israël et n’ont aucune signification en dehors d’Israël.
Cette différenciation dans la citoyenneté est inscrite dans la législation israélienne : la Loi du Retour, pour les juifs, rend pratiquement automatique l’immigration pour tout juif dans le monde qui le désire ; et la Loi sur la Citoyenneté, pour les non-juifs, détermine sur une base entièrement séparée les droits de la minorité palestinienne du pays à la citoyenneté. Plus important encore, cette dernière loi abolit le droit des familles de citoyens palestinien, qui ont été expulsées par la force en 1948, de revenir dans leurs maisons et sur leurs terres. Autrement dit, il existe deux systèmes juridiques de citoyenneté en Israël qui différencient les droits des citoyens selon qu’ils sont juifs ou Palestiniens.
Cela, en soit, répond à la définition de l’apartheid, telle que définie par les Nations-Unies en 1973 : « Toutes les mesures, législatives ou autres, destinées à empêcher un groupe racial ou plusieurs groupes raciaux de participer à la vie politique, sociale, économique et culturelle du pays et la création délibérée de conditions faisant obstacle au plein développement du groupe ou des groupes considérés. » Et la clause prévoit les droits suivants : « Le droit de quitter son pays et d’y revenir, le droit à une nationalité, le droit de circuler librement et de choisir sa résidence, le droit à la liberté d’opinion et d’expression. »
Une telle séparation dans la citoyenneté est absolument essentielle au maintien d’Israël en tant qu’Etat juif. Si tous les citoyens devaient être définis uniformément en tant qu’Israéliens, il n’y aurait qu’une seule loi relative à la citoyenneté et des conséquences dramatiques en découleraient. La plus importante serait que la Loi du Retour, soit cesserait de s’appliquer pour les juifs, soit s’appliquerait également pour les citoyens palestiniens, ce qui leur permettraient de faire venir leurs familles exilées en Israël, ce Droit au Retour tant redouté. Dans les deux cas, après une période plus ou moins longue, la majorité juive d’Israël s’estomperait et Israël deviendrait un Etat binational, probablement avec une majorité palestinienne.
Il y aurait beaucoup d’autres conséquences prévisibles à une égalité dans la citoyenneté. Les colons juifs, par exemple, pourraient-ils conserver leur statut privilégié en Cisjordanie quand les Palestiniens à Jénine ou à Hébron auraient des parents en Israël avec les mêmes droits que les juifs ? L’armée israélienne pourrait-elle toujours fonctionner en tant qu’armée d’occupation dans un Etat complètement démocratique ? Et les tribunaux, dans un Etat où les citoyens sont égaux, pourraient-ils continuer à fermer les yeux sur les violences de l’occupation ? Dans tous ces cas, il semble vraiment peu probable que le statu quo puisse être maintenu.
Autrement dit, c’est l’ensemble de l’édifice du régime d’apartheid d’Israël, à l’intérieur d’Israël, qui soutient et fait respecter son régime d’apartheid dans les territoires occupés. Ils tiennent ensemble, ou ils tombent ensemble.
(Voir de l’auteur sur cette question : Pourquoi il n’y a aucun « Israélien » dans l’Etat juif)
Maintenant, regardons la question du contrôle de la terre.
Le mois dernier, j’ai rencontré un couple de juifs israéliens exceptionnels, les Zakai. Ils sont exceptionnels essentiellement parce qu’ils ont développé une amitié profonde avec un couple de Palestiniens, en Israël. Alors que j’écris sur Israël et la Palestine depuis des années, je ne me souviens pas avoir rencontré de juifs israéliens qui aient un ami palestinien exactement comme Natalie et Weisman Zakai.
Certes, il y a beaucoup de juifs israéliens qui prétendent avoir un ami « arabe » ou « palestinien » dans le sens où ils plaisantent avec le gars qui tient la boutique d’humus où ils s’approvisionnent ou qui répare leur voiture. Il y a aussi des juifs israéliens - et c’est un groupe extrêmement important - aux côtés des Palestiniens dans des batailles politiques, comme celles à Bil’in ou à Sheikh Jarrah dans Jérusalem. Dans ces endroits, Israéliens et Palestiniens ont, contre toute attente, réussi à forger des amitiés véritables qui seront essentielles si le régime d’apartheid est vaincu.
Mais la relation des Zakai avec leurs amis bédouins, les Tarabin, n’est pas de ces genres d’amitié. Elle n’est pas basée, ou construite, sur un combat politique, lui-même encadré par l’occupant israélien ; ce n’est pas une amitié timide ; et elle n’a aucune autre raison d’être que la relation elle-même. C’est une amitié - ou du moins elle m’est apparue comme telle - entre des gens véritablement égaux. Une amitié d’une intimité entière. Quand j’ai rendu visite aux Zakai, j’étais conscient que ce que je voyais était incroyablement inhabituel en Israël.
La raison pour laquelle on sépare distinctement les mondes culturels et affectifs des citoyens juifs et palestiniens en Israël n’est pas difficile à comprendre : ils vivent dans des mondes physiques totalement séparés. Ils vivent éloignés dans des communautés distinctes, non par choix mais par des règles et procédures applicables de par la loi. Même dans la poignée de ce que l’on appelle les villes mixtes, juifs et Palestiniens vivent généralement séparés, dans des quartiers distincts et clairement délimités. Et il n’est pas totalement surprenant que ce qui m’a amené chez les Zakai, c’était pour savoir si un Palestinien était autorisé à vivre dans une communauté juive.
Les Zakai voulaient louer leur maison à leurs amis, la famille Tarabin, dans le village agricole de Nevatim, dans le Néguev - actuellement communauté exclusivement juive. Les Tarabin étaient confrontés à un sérieux problème de logement dans leur propre communauté bédouine voisine. Mais ce que les Zakai ont découvert, c’est qu’il existe d’énormes obstacles sociaux et juridiques au départ des Palestiniens de leurs ghettos où ils sont censés habiter. Non seulement la direction locale élue de Nevatim s’est vivement opposée à ce que la famille bédouine entre dans leur communauté, mais les tribunaux israéliens également.
Et Nevatim n’est pas un cas isolé. Il existe plus de 700 communautés rurales semblables - la plupart étant des kibbutzim et des moshavim - qui interdisent aux non-juifs de venir y vivre. Elles contrôlent la plus grande partie du territoire habitable d’Israël, des terres qui appartenaient autrefois aux Palestiniens : soit aux réfugiés de la guerre de 1948, soit à des citoyens palestiniens qui ont eu leurs terres saisies en vertu de lois spéciales.
Aujourd’hui, après ces saisies, au moins 93% d’Israël se trouvent nationalisés - c’est-à-dire, gardés en fidéicommis non à l’intention des citoyens d’Israël mais du monde juif. (Ici, une fois encore, nous devons noter l’une des conséquences importantes d’une citoyenneté différenciée).
L’accès à la plus grande partie des terres nationalisées est contrôlé par des comités d’enquête, et supervisé par des organisations sionistes quasi gouvernementales mais qui n’ont absolument aucun compte à rendre, tels que l’Agence juive et le Fonds national juif. Leur rôle est de veiller à ce que de telles communautés restent inaccessibles aux citoyens palestiniens, justement comme les Zakai et les Tarabin l’ont découvert à Nevatim. Les officiels ont insisté sur le fait que la famille palestinienne n’avait pas le droit de louer, et d’acheter encore moins, une propriété dans une « communauté juive ». Cette position a été confirmée par la plus haute juridiction d’Israël qui a jugé que la famille devait se présenter devant un comité d’enquête, lequel a précisément comme véritable objectif de l’exclure.
Encore une fois, la Convention des Nations unies de 1973 sur le « crime d’apartheid » est instructive : elle inclut les mesures « visant à diviser la population selon des critères raciaux en créant des réserves et des ghettos séparés pour les membres d’un groupe racial ou de plusieurs groupes raciaux... [et] en expropriant les biens-fonds appartenant à un groupe racial ou à plusieurs groupes raciaux ou à des membres de ces groupes. »
Si les citoyens juifs et palestiniens ont été tenus séparés de façon aussi efficace - un système éducatif séparé et de sérieuses limites aux mariages interconfessionnels renforçant la ségrégation affective et physique -, comment les Zakai et les Tarabin ont-ils pu devenir des amis aussi proches ?
Leur cas est un exemple intéressant de mon don de faire des trouvailles, comme je l’ai découvert quand je les ai rencontrés. Weisman Zakai est l’enfant de parents juifs iraquiens qui ont immigré dans l’Etat juif dans les premières années de l’Etat. Quand lui et Ahmed Tarabin se sont rencontrés, gamins, dans les années 60, traînant sur les marchés du quartier pauvre de Beersheva, en plein centre du pays, ils constatèrent que ce qu’ils avaient en commun l’emportait sur les divisions officielles qui étaient supposées les tenir à l’écart et craintifs. Les deux parlaient couramment l’arabe, les deux étaient élevés dans la culture arabe, les deux étaient exclus de la société juive ashkénaze, et les deux partageaient la même passion pour les voitures.
Dans leur cas, le système d’apartheid d’Israël a échoué dans sa tâche à les tenir séparés, physiquement et affectivement. Il a échoué à faire d’eux des jeunes qui aient peur l’un de l’autre, qui soient hostiles l’un envers l’autre. Mais comme les Zakai l’ont appris à leurs dépens, après avoir refusé de vivre selon les règles du système d’apartheid d’Israël, le système les a rejetés. Les Zakai se sont vus refuser la possibilité de louer à leurs amis, et maintenant ils vivent comme des parias dans la communauté de Nevatim.
(Voir de l’auteur : En Israël on ne loue pas aux Arabes ; en français sur : http://soutien-palestine.blogspot.c...)
Enfin, examinons le concept de « sécurité » à l’intérieur d’Israël.
Comme je l’ai dit, la nature d’apartheid des relations entre citoyens juifs et palestiniens est voilée dans les sphères juridiques, sociales et politiques. Celles-ci ne reflètent pas l’ « apartheid mesquin » qui caractérisait l’Afrique du Sud : les toilettes séparées, les bancs séparés dans les parcs et les bus séparés. Mais dans un cas quand même, il se manifeste clairement de cette façon mesquine : c’est quand les juifs et les Palestiniens entrent et quittent le pays, aux passages des frontières et à l’aéroport international de Ben Gourion. Là, la façade tombe et la différence de statut de citoyenneté dont jouissent juifs et Palestiniens se montre en spectacle.
Cette leçon, deux frères palestiniens, d’âge moyen, l’ont apprise, et je les ai interviewés ce mois-ci. Habitant un village proche de Nazareth, ils ont été longtemps sympathisants du Parti travailliste et fièrement ils m’avaient montré une photo jaunie où ils étaient reçus à déjeuner chez Yitzhak Rabin au début des années 90. Mais lors de notre entretien, ils ont juré qu’ils ne revoteraient jamais pour un parti sioniste.
Leur brusque rappel à la réalité s’était produit trois ans auparavant, alors qu’ils étaient allés aux Etats-Unis pour un court voyage d’affaires avec un groupe d’agents d’assurances juifs. Pour leur vol de retour, arrivés à l’aéroport JFK de New York, ils ont vu leurs collègues juifs passer les contrôles de sécurité en quelques minutes [par la compagnie aérienne israélienne El Al]. Quant à eux, ils ont passé deux heures à être interrogés et pour que leurs bagages soient minutieusement inspectés.
Quand finalement on les a laissés passer, on leur a affecté une surveillante qui avait la charge de les tenir sous une surveillance constante - devant des centaines de passagers compatriotes - jusqu’à ce qu’ils montent à bord de l’avion. L’un des frères s’est rendu aux toilettes sans d’abord demander la permission, et la surveillante le lui a reproché, publiquement, et son chef l’a même menacé de lui interdire d’embarquer, sauf s’il s’excusait. Ce mois-ci, le tribunal a consenti aux deux frères une indemnité de 8 000 dollars pour ce qu’il a qualifié de traitement « abusif et inutile ».
Deux choses dans cette affaire sont à noter. La première, c’est que la Sécurité de la compagnie El Al a reconnu devant le tribunal qu’aucun des frères ne présentait un risque d’aucune sorte pour la sécurité. Les seules raisons du traitement spécial qu’ils ont reçu furent leur nationalité et leur appartenance ethnique. Voila manifestement un cas de profilage racial.
La seconde chose à noter, c’est que leur expérience n’est rien d’autre que l’ordinaire de tous les citoyens palestiniens qui voyagent pour entrer ou sortir d’Israël. Des incidents semblables, et des bien pires, se produisent chaque jour lors de ces procédures sur la sécurité. Ce qui a été exceptionnel dans cette affaire, c’est que les deux frères aient engagé une action en justice, longue et coûteuse, contre la compagnie El Al.
Je soupçonne qu’ils l’ont fait parce qu’ils se sont sentis méchamment trahis. Ils avaient commis l’erreur de croire la hasbara (propagande) des politiciens israéliens de tous bords qui déclare que les citoyens palestiniens pourront bénéficier d’un statut égal à celui des citoyens juifs s’ils se montrent loyaux envers l’Etat. Ils avaient supposé qu’étant sionistes, ils deviendraient des citoyens de première classe. En tirant cette conclusion, ils avaient mal compris la réalité de l’apartheid inhérent à un Etat juif.
Pour le citoyen palestinien le plus instruit, le plus respectable et le plus riche, ça se passera toujours plus mal au contrôle sécurité à l’aéroport que pour le moins recommandable des citoyens juifs, même celui qui adhère à des opinions extrémistes, et même encore le citoyen juif avec un casier judiciaire.
Le système d’apartheid d’Israël est là pour maintenir le privilège juif, dans un Etat juif. Au point que ce privilège amène les juifs ordinaires à se sentir viscéralement vulnérables, dans la vie et dans la mort, planant à des milliers de pieds au-dessus du sol, croyant que le statut des citoyens palestiniens doit les montrer comme l’étranger, comme l’ennemi, où qu’ils se trouvent et quoi qu’ils aient fait, ou pas fait.
Le régime d’apartheid, comme je l’ai affirmé, s’applique aux Palestiniens tant en Israël que dans les territoires occupés. Mais cet apartheid n’est-il pas pire dans les territoires qu’à l’intérieur d’Israël ? Ne devrions-nous pas nous préoccuper plus du grand apartheid en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, que de cet apartheid moins dur ? Un tel argument exprime une idée fausse et dangereuse sur la nature indivisible de l’apartheid d’Israël à l’encontre des Palestiniens, et sur ses objectifs.
Certes, il est vrai que l’apartheid dans les territoires est beaucoup plus agressif qu’en Israël. Il y a deux raisons à cela. La première, c’est que l’apartheid sous occupation est surveillé de beaucoup moins près par les tribunaux civils israéliens que celui en Israël. Vous pouvez, pour parler franchement, vous en tirer avec une peine plus sévère ici en Israël. La seconde, et la plus significative cependant, c’est que le système d’apartheid israélien dans les territoires occupés est contraint d’être plus agressif et plus cruel - et ceci parce que la bataille n’est pas encore gagnée dans les territoires. Le combat de la puissance occupante pour voler vos ressources - votre terre, votre eau et votre travail - est en cours, mais son issue reste encore à être déterminée. Israël est confronté à des pressions considérables en termes de temps et d’une légitimité qui s’estompe, pendant qu’il œuvre à vous déposséder. Chaque jour de votre résistance lui rend cette tâche plus difficile.
En Israël, en revanche, le régime d’apartheid est bien établi - il a eu sa victoire il y a de cela des décennies. Les citoyens palestiniens ont la troisième ou la quatrième classe de citoyenneté : presque toutes leurs terres ont été prises ; ils ne sont autorisés à habiter que dans leurs ghettos ; leur système éducatif est contrôlé par les services de sécurité ; ils peuvent travailler dans quelques emplois, différents de ceux des juifs et dont ceux-ci ne veulent pas ; ils peuvent voter mais ils ne peuvent pas participer au gouvernement ou agir pour un changement politique ; et ainsi de suite.
Sans doute, un destin similaire est-il envisagé pour vous aussi. L’apartheid voilé auquel les Palestiniens en Israël sont confrontés mène tout droit à une sorte d’apartheid voilé - et plus légal -, planifié pour les Palestiniens dans les territoires occupés, au moins pour ceux qui seront autorisés à rester dans leur bantoustan. Et pour cette raison même, dénoncer et vaincre l’apartheid à l’intérieur d’Israël est vital pour la réussite de la résistance contre l’apartheid qui a pris racine ici.
C’est pourquoi nous devons combattre l’apartheid israélien où qu’il soit - à Jaffa et à Jérusalem, à Nazareth et à Naplouse, à Beersheva et à Bil’in. C’est le seul combat qui peut apporter la justice aux Palestiniens.
* Jonathan Cook est écrivain et journaliste basé à Nazareth, Israël. Il est membre du comité de parrainage du Tribunal Russell sur la Palestine dont les travaux ont été présentés le 4 mars 2009.
Son site : http://www.jkcook.net/
Son courriel : jcook@thenational.ae
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26 avril 2010 - The Palestine Chronicle - traduction : JPP
Pour plus d’informations sur Bil’in et la conférence : Bil’in
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