26 octobre 2010

Iraq : La mort à un check-point

mardi 26 octobre 2010
Andrew Wander
Al Jazeera

L’histoire tragique de Nabiha Jassim, jeune femme irakienne enceinte, tuée par les troupes US alors qu’elle se rendait en urgence à la maternité pour accoucher. 
 
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Au cours du conflit, près de 700 civils ont été tués au cours de plus de 14 000 incidents
sur les check-points US.
 
C’est le dossier, dans les archives de l’armée US, de la mort d’une femme prête d’accoucher, abattue par les soldats à un check-point alors qu’elle se rendait à la maternité pour donner le jour à son enfant.
Nabiha Jassim avait 35 ans quand elle a été tuée à Samarra, ville à 110 km au nord de Bagdad, capitale de l’Iraq. Son frère Khalid l’emmenait d’urgence à l’hôpital quand leur voiture arriva sur un check-point et poste d’observation militaire que les Américains venaient d’installer. Ce voyage, cette famille ne l’a jamais terminé.
D’après les archives de la guerre d’Iraq, les soldats US qui tenaient le check-point ont estimé que la voiture de Nabiha représentait une menace. Alors, quand le véhicule qui transportait la famille s’est approché du check-point, ils ont ouvert le feu.
Nabiha a été tuée par une grêle de balles qui arrosa toute la voiture, faisant éclater le pare-brise et occasionnant de graves coupures à Khalid. Sa cousine, Saliha Hassan, 57 ans, a, elle aussi, été tuée dans la fusillade qui laissa la route pleine de sang et de verre brisé.
Le corps de Nabiha fut alors transporté d’urgence à l’hôpital pour tenter de sauver le bébé, mais l’enfant qui devait naître était mort dans le ventre de sa mère. Serait-elle arrivée en vie à l’hôpital qu’elle aurait donné le jour à un petit garçon.
Son histoire n’est que l’une des centaines de tragédies humaines recensées dans les registres de la guerre en Iraq qui révèlent qu’au cours du conflit, près de 700 civils ont été tués au cours de plus de 14 000 incidents violents sur les check-points de l’armée américaine.
Ces incidents, inscrits dans une prétendue « escalade de la force », suivent le même schéma répétitif et meurtrier. Un civil iraquien s’approche d’un check-point US, il comprend mal les soldats qui lui demandent de stopper, et il est abattu parce qu’il constitue une menace pour les soldats qui tiennent le check-point.
Tout comme est répétitive la réaction de l’armée US à de tels incidents qu’elle considère tout simplement comme des dommages collatéraux qui sont un coût inévitable dans ce conflit. Des victimes d’accidents du fait du brouillard de la guerre en quelque sorte.
Après le décès de Nabiha, l’armée déclara que le véhicule était entré dans « une zone interdite clairement délimitée » quand les soldats ont tiré sur lui.
Mais les dossiers militaires ne font état d’aucune mise en garde qui en aurait prévenu Khalid alors que celui-ci conduisait sa sœur et sa cousine vers leur mort, et celui-ci a bien indiqué qu’aucun avertissement n’avait été donné.
« Je conduisais à toute vitesse parce que je ne voyais aucun panneau ni avertissement des Américains. Ce n’est que lorsque ils ont tiré les deux balles qui ont tué ma sœur et ma cousine que je me suis arrêté, » a-t-il dit à Associated Press, peu après les faits.
Une déclaration laconique a été publiée par les autorités militaires dans l’après-midi de l’incident, qui disait : « Les forces US ont tué deux femmes par erreur... alors qu’elles se rendaient à la maternité. »
Au moment de la mort de Nabiha, les soldats US en Iraq étaient confrontés à des attaques intenses et régulières sur les routes du pays. Les check-points étaient la cible d’hommes armés et de kamikazes, régulièrement. Personne n’a laissé entendre que sa mort pouvait être autre chose qu’une erreur mortelle.
Mais pour les amis et les familles de ces Iraquiens innocents tués par erreur sur les check-points de l’armée américaine, savoir que leur mort n’était pas voulue n’est qu’une piètre consolation quand de telles erreurs se renouvellent encore et encore.
Les expressions de regrets de l’armée américaines, aussi bien intentionnées soient-elles, ont bien peu de valeur pour les Iraquiens ordinaires si aucune leçon n’est tirée de ces erreurs qui ont de telles conséquences dévastatrices.

Sur ce thème, de Gregg Carlstrom - Al Jazeera :

24 octobre 2010 - Al Jazeera - traduction : JPP

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