Les 400 000 documents classifiés diffusés par WikiLeaks n’apprennent rien aux Irakiens. Pour eux, la mort rode toujours au coin de la rue ; des hommes, des femmes et des enfants sont assassinés, torturés, mutilés, violés dans des prisons, secrètes ou non. Mais, les Irakiens sont tout de même heureux que leurs malheurs soient enfin sur le devant de l’actualité mondiale. Les rapports internes des autorités militaires américaines ont, en effet, le mérite d’attester, partiellement, ce que de nombreux observateurs dénoncent inlassablement depuis 2003.
Pour le pouvoir :
un complot fomenté à l’étranger
Visiblement sur la défensive, Nouri al-Maliki n’a rien trouvé de mieux que d’accuser WikiLeaks de saboter sa campagne électorale, affirmant que la date choisie pour publier les documents n’était pas neutre. Un de ses proches, Haïdar Al-Jourani, est allé plus loin en parlant de complot fomenté à l’étranger (sans dire de quels pays il s’agit). Il a annoncé que le Premier ministre sortant allait porter plainte contre le site Internet pour diffusion de documents mensongers concernant sa participation à des massacres et à des arrestations. Ce n’est pas l’avis du sadriste Hakim Al-Zamili, ancien ministre de la Santé, pour qui WikiLeaks confirme les violations dénoncées par son mouvement sur les violations des droits de l’homme par les forces irakiennes.
Jawad al-Bolani, ministre de l’Intérieur sortant, particulièrement visé par certains rapports, veut contre-attaquer en créant une commission sur les abus commis par les troupes américaines entre 2003 et 2009. On ne peut que l’approuver. Il est trop facile d’accuser le régime de Bagdad de tous les crimes. Mais ce ne sera qu’une enquête morte-née de plus, les Irakiens ne comptant plus les annonces de ce genre, jamais suivies d’effets.
Les dirigeants irakiens
pourraient être condamnés
pour crime de guerre
Dans l’opposition parlementaire, Oussama Nujaifi, membre important d’Al- Iraqiya, a fort justement constaté que les crimes et les abus documentés par WikiLeaks n’étaient qu’« une petite partie de la réalité de ce qui s'est passé en Irak ». En revanche, il s’est bien gardé d’ajouter qu’Iyad Allaoui, chef de son bloc électoral, est impliqué dans des meurtres qualifiés de crimes de guerre, à commencer par le plus effroyable d’entre eux : le massacre de Fallujah en 2004.
A la différence de George W. Bush et des troupes étatsuniennes, pour l’instant hors d’atteinte de la justice, car exemptés scandaleusement des domaines relevant de la compétence du Tribunal pénal international, les dirigeants irakiens sont passibles d’une condamnation devant cette juridiction. Pour l’administration américaine actuelle, cette menace pourrait être une façon de les tenir en laisse.
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