30 mai 2011

Une année passée en prison mais notre aspiration à la Liberté reste aussi vivante que jamais

dimanche 29 mai 2011 - 06h:01
Amir Makhoul




Prison de Gilboa - Une année est passée depuis mon emprisonnement, une année très longue. 
 
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Amir Makhoul
Mais qu’est-elle comparée aux trois décennies que beaucoup de prisonniers palestiniens ont vécues et qu’ils continuent de vivre dans les prisons israéliennes ? Aucune comparaison pourtant ne doit être faite entre les militants palestiniens, ni entre les peines que leur infligent des juges qui ne sont après tout que des instruments au service de l’oppression. Ces peines sont toutes injustes et cruelles, car leur seul but est de nous subjuguer par la terreur. Mais il faut toujours garder à l’esprit une chose essentielle : quelle que soit leur durée, elles passent.
Ce qui se passe en Palestine obéit à une loi inexorable : à mesure qu’ils intensifient le terrorisme d’Etat et son cortège de persécutions et de déportations, notre détermination dans la lutte devient plus forte et plus ferme. Aucune force ne pourra arrêter la lutte que nous menons pour rester sur cette terre, pour préserver notre identité et restaurer les droits dont nous avons été spoliés. Ils voudraient réduire notre cause en des fragments épars qui obéissent à leurs décrets, mais nous, le Peuple Palestinien, sommes en train de nous relever plus forts que jamais, conscients que notre cause est une et indivisible.
Ils sont enfermés dans la reproduction de l’oppression alors que nous produisons sans cesse la liberté, la liberté du peuple et de la patrie, capable de briser leur cercle vicieux et de faire de leurs actions de simples réactions aux nôtres. Que nous soyons dans notre patrie ou en exil, notre droit à la Palestine est un : le retour chez nous, l’autodétermination, la fin de l’occupation, la libération des prisonniers, le recouvrement des terres volées, le démantèlement des colonies et du mur d’apartheid, la préservation de Jérusalem, du Néguev et de la Galilée de la côte des entreprises d’expulsion et de judaïsation, la fin du blocus de Gaza. Toutes ces cause ne font qu’une.
La machine de répression israélienne découle de l’essence même de l’Etat d’Israël et conditionne le système et l’ensemble des lois de cet Etat : la justice, l’éducation, l’enseignement supérieur, l’aménagement, la législation, ainsi que les institutions sécuritaires. Tous ces outils sont à la disposition d’un seul système central, d’un centre politique unique et d’une seule nature répressive, raciste et coloniale.
On peut envisager d’utiliser ce système, chaque fois que cela est possible, mais on ne peut pas trop y compter ni se faire d’illusions. L’expérience nous a enseigné que le seul moyen d’atteindre nos objectifs et de recouvrer nos droits est la lutte. C’est uniquement par notre combat que les prisonniers seront libérés. Les règles israéliennes de ce jeu répressif ne seront remises en cause et nous ne pourrons nous libérer que par la lutte populaire et internationale.
Sans doute que le prix à payer sera élevé, tant au niveau personnel et familial qu’institutionnel. Mais la détermination d’un captif libre prouve que ce qui le guide, c’est sa propre liberté et celle de tous les prisonniers, c’est son refus de reconnaître toute légitimité aux tribunaux de l’occupant car ceux-ci, garnis de juges pantins costumés et beaux parleurs, n’usurpent le nom de « tribunaux » que pour mieux servir l’institution sécuritaire dont ils ne sont qu’une simple extension. Ce sont précisément ces juges-là qui sont, non pas libres mais bien les prisonniers de l’Institution, de la sécurité et des concepts sécuritaires. Ils se situent à l’opposé des valeurs de la justice. Ce sont des prisonniers assoiffés de revanche.
Il faut dire que notre lutte pour la libération n’est pas menée uniquement par nous, les Palestiniens, elle est fortement appuyée par les révoltes dans le monde arabe et le mouvement BDS à l’échelle de la Planète. Ces actions ne sont rien d’autre que le prolongement du mouvement palestinien visant à priver le régime colonial raciste de toute légitimité, à l’isoler, à nous conforter nous-mêmes et à restituer le droit palestinien.
Au nom du mouvement des prisonniers, je dois mettre en garde contre les dangers de la soi-disant coordination sécuritaire entre, d’une part, Israël et, d’autre part, des Palestiniens et autres parties arabes quelles qu’elles soient. Les victimes d’une telle coordination ne sont autres que les combattants et les prisonniers de la liberté, ainsi que les combattants Palestiniens et Arabes pour la Palestine. Nous appelons les peuples arabes à mettre fin à la complicité de certains régimes arabes avec Israël, complicité qui se traduit par la compromission dans cette soi-disant coordination. Nous appelons, dans ce sens, au lancement d’une vigoureuse campagne arabe et palestinienne.
Passer une année en prison est un prix très élevé à payer à un ordre oppresseur mais la volonté libératrice de notre peuple a réussi à faire de cette année une année de résistance, de défi et de lutte. Je transmets ici un message de gratitude et d’amour à tous ceux qui activent en vue de ma libération et notamment au comité populaire pour ma défense ainsi qu’au Comité Populaire pour la Défense des Libertés Politiques lequel a lancé une campagne pour ma libération dès le moment de mon arrestation. Depuis ma cellule, j’envoie mon affection à ma famille laquelle m’a toujours entourée de son amour et de son soutien ainsi qu’à tous ceux qui soutiennent notre cause, individus ou organisations, qu’ils soient ici ou à l’étranger.
Ces gens sont constamment en contact avec nous. Ce sont nos compagnons dans notre lutte pour la Libération. Ce que nous nous voulons, nous mouvement des prisonniers politiques, n’est pas de compter les années qui passent en détention mais de conquérir la liberté. Cette liberté est accessible car les humains sont nés libres, elle est un droit et on a le devoir de la faire valoir.
Le 15 mai, nous avons commémoré le 63ème anniversaire de la Nakba palestinienne, Nakba que nous vivons encore. Notre force a toujours pour sources la justesse de notre cause et le caractère inaliénable de nos droits. Ceux-ci ne peuvent être réalisés que par la lutte. Lutter pour notre libération ainsi qu’œuvrer en vue de nous bâtir nous-mêmes et de bâtir nos institutions sont pour nous un droit et un devoir. Le prix à payer, qu’il soit individuel ou collectif, est douloureux, mais il ne nous détournera jamais de notre objectif de la libération de l’individu, du peuple et de la terre.
Leur domination quant à elle, quelle que soit sa durée, passera alors que notre liberté est inscrite dans le mouvement même de notre destinée.


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http://electronicintifada.net/conte... - Traduction : Najib Aloui


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