Gaza envoie la facture à l’Occident
dimanche 17 janvier 2010 - 05h:58
Juan Miguel Muñoz - El Païs
Il y a seulement cinq ans, la nouvelle qu’une université, un syndicat ou une entreprise occidentale encourageaient le « boycott » à Israël, était un événement sporadique qui ne suscitait pas plus qu’une certaine gêne chez les dirigeants juifs, tandis qu’il ne manquaient pas des sionistes « pro » convaincus qu’un boycott comme celui qui avait fait tomber l’apartheid sud-africain, était le seul moyen pour qu’Israël freine et fasse marche arrière dans l’occupation des territoires palestiniens.
Depuis un an et à peine conclue l’agression contre Gaza qui a causé 1400 morts, la boule de neige grossit. Les initiatives de boycott poussent comme des champignons et les dirigeants d’Israël commencent à souffrir des incidents du genre de ceux que subissent les dirigeants les plus méprisés.
Avec une circonstance aggravante : les mauvaises surprises se présentent dans les pays alliés. Vous pouvez le dire à l’ancien premier ministre israélien et principal responsable du massacre de Gaza : Ehud Olmert, qui a dû entendre cet automne des cris de « criminel » lors de son tour dans les salles de conférence de plusieurs universités aux Etats-Unis.
Une vague expansive dans le domaine militaire, économique et diplomatique de l’éternel conflit israélo-arabe est évidente et atteint des coins insoupçonnés. Les ravages causés dans la Bande de Gaza a été l’un des éléments déclencheurs qui ont incité le Jordanien Humam Jalil Abu Mulal al Balaui à perpétrer le 30 Décembre l’attaque contre la base qui se trouve en Afghanistan et qui a tué sept agents de la CIA, ainsi l’expliquait son frère mercredi à un journal arabe.
Cette vague expansive qui vient de Gaza, a provoqué des réactions moins nocives dans d’autres lieux, mais constitue un véritable casse-tête pour le gouvernement de Benjamin Netanyahu qui insiste à accuser des organisations pro - palestiniennes d’orchestrer une campagne pour délégitimer l’État sioniste.
Des établissements d’enseignement de Norvège et des Etats-Unis ont décidé de rompre leurs liens avec les universités israéliennes.
Oslo a retiré ses investissements des entreprises israéliennes qui sont liées à l’occupation.
Des syndicats français et britanniques ont rejoint le boycott contre les produits manufacturés dans des colonies juives en Cisjordanie.
L’Université d’Ariel, qui se trouve également dans les territoires occupés, a été exclue d’un concours portant sur l’utilisation de l’énergie solaire organisé par le gouvernement espagnol.
Turquie, seul pays musulman à avoir signé un accord de coopération militaire avec l’Etat d’Israël, a décidé de suspendre la participation de l’armée israélienne dans des manœuvres conjointes.
Londres vient d’exhorter les commerçants à étiqueter les produits lorsqu’ils proviennent de colonies juives. La joueuse de tennis israélienne Sahar Peer, a dû s’habituer aux huées qui l’accompagnent à chacune de ses sorties du terrain.
Les exemples sont abondants
La tension la plus stridente est celle qui met Israël face au Royaume Uni : Au milieu du mois de décembre dernier, Tipzi Livni, chef de l’opposition, a dû repousser sa visite a Londres par peur d‘être arrêtée. La même décision a été prise il y a quelques jours par quatre commandants militaires.
Gaza a été le fusible de cette spirale d’initiatives visant à discréditer Israël. Les étouffer serait une tâche trop ardue et il reste encore à résoudre au Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies la question épineuse du rapport de Goldstone, présenté par le juge sud-africain et dans lequel Israël est accusé d’avoir commis des crimes de guerre.
Alors que le gouvernement d’Olmert avait opposé son véto aux journalistes d’informer depuis Gaza, il a été impossible de cacher la destruction massive qu’ont provoqué les opérations militaires.
Il existe des dizaines d’avocats qui recueillent des renseignements en Espagne, Belgique, Royaume-Uni, Afrique du Sud, la Hollande et la Norvège pour engager des poursuites pour crimes de guerre contre les auteurs d’actes de guerre dans des pays dont les lois prévoient la compétence universelle.
Des informations sur les militaires impliqués ont été recueillies sur Facebook, « L’Intifada informatique nous a attrapés avec nos culottes à terre » écrivait récemment l’analyste Doron Rosenblum et il ajoutait : « Sous les gouvernements de ces hommes brutaux [en référence à Shimon Peres, Ehud Barak, Ariel Sharon et Olmert], qui parlent l’anglais avec un accent si fort, Israël était reçu les bras ouverts partout au monde. »
Le ressentiment de Tel-Aviv envers plusieurs capitales est notoire : Est-ce que la Suède est un pays responsable, raisonnable ? Non, d’après le gouvernement de Netanyahu, qui a réagi avec colère à la proposition de la présidence suédoise de l’UE de reconnaître Jérusalem comme la capitale d’un éventuel Etat palestinien.
Les mots de la nouvelle responsable de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, provoquent des réactions allergiques : « Jérusalem-Est est un territoire occupé ainsi que le reste de la Cisjordanie », a t elle déclaré 30 décembre dernier.
Avec Washington, ce ne sont plus non plus des jours de vin et de roses. Certains ministres de Netanyahu ont qualifié d’ « affreuse » l’administration de Barak Obama.
Enfin, sur les organismes internationaux, ils ont des critiques encore plus empoisonnées. « Un pays qui croit à la moralité de ses actions ne devraient pas avoir à se comporter en permanence comme un suspect ni avoir à boycotter des institutions qui appliquent le droit international ».
« Rejoindre la Cour internationale de Justice mettrait Israël du côté de pays progressistes ... » déclarait le quotidien Haaretz mercredi.
Puisqu’Israël n’a jamais ratifié le traité de la Cour Internationale ni le Traité de non-prolifération nucléaire. ..
L’ONU ne jouit pas de sa sympathie. Ben Gourion se moquait déjà de l’organisme : « UN Shum » la surnommait-il : « Les Nations Unies, c’est Rien. »
Israël s’attache au drapeau de l’antisémitisme pour contredire le déluge de récriminations, et a engagé de nouveaux champs de bataille.
Outre la promotion du gouvernement d’une campagne pour que les touristes israéliens aident à améliorer l’image du pays, le vice-ministre des Affaires étrangères, Danny Ayalon, a déclaré :
« Nos ennemis ont essayé de nous battre militairement économiquement au moyen d’un boycott, puis recourant au terrorisme, et maintenant ils se servent des structures internationales pour essayer de nous vaincre. Les tranchées sont actuellement au Conseil des droits humains à Genève, dans la Cour Internationale de La Haye, et au Conseil de Sécurité de Nations Unies à New York ».
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Traduction de l’espagnol : Inés Molina V.
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