27 août 2011

Livre : « Le Hamas » de Khaled Hroub (éditions demopolis) (Al Har)

26 août
 
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Khaled Hroub, d’origine palestinienne, est né dans un camp de réfugiés proche de Bethléem. Il est directeur du programme d’étude des médias arabes à l’université de Cambridge.
Principal mouvement islamique palestinien, la Hamas figure sur la liste des organisations terroristes de l’Union européenne, des États-Unis et d’Israël. Comment ce groupe religieux à vocation sociale a-t-il remporté les élections en 2006 puis pris le contrôle de Gaza en 2007 ?
Khaled Hroub enquête depuis quinze ans sur la Hamas dont il a rencontré les principaux dirigeants politiques et militaires. Il nous fait pénétrer dans les coulisses du mouvement en Cisjordanie, à Gaza et en Syrie. Un livre pour comprendre pourquoi et comment le Hamas s’est installé au cœur du conflit…

On ne peut pas évoquer, aujourd’hui, la scène proche-orientale sans parler du mouvement de résistance palestinien qu’est le Hamas. Arrêtons-nous pendant quelques lignes sur cette organisation.
Qu’est-ce que le Hamas ? Qui est derrière ce parti politique ? Ses membres sont-ils « doctrinalement » violents ? Doit-on aborder cette organisation politique seulement à travers le prisme de ce que l’on appelle vulgairement les « attentats kamikazes » ? Voilà malheureusement les vocables et les raccourcis dans lesquels le mouvement de résistance palestinien est emprisonné. Malgré un important traitement médiatique, ce mouvement reste encore méconnu du grand public qui se contente des clichés habituels abusifs inhérents à cette région « martyre » du monde.Ce mouvement est perçu aujourd’hui comme un protagoniste nouveau sur la scène palestinienne alors que son origine date de plus d’un demi siècle.
Le Hamas puise ses racines du mouvement des Frères musulmans palestiniens, qui a vu le jour en 1946 à Jérusalem, et qui est lui même une émanation des Frères musulmans égyptiens.
A la création de l’État d’Israël en 1948, les Frères palestiniens se sont retrouvés scindés en deux entités géographiquement distinctes. Une branche en Cisjordanie rattachée aux Frères jordanien, et une branche dans la bande de Gaza rattachée aux Frères égyptiens. Après la défaite des Arabes en 1948 la bande de Gaza fut « rattachée » à l’Égypte et la Cisjordanie à la Jordanie.
En 1967 s’opère un changement radical au sein des mouvements « fréristes». La débâcle sans nom des armées arabes pendant la guerre des Six jours a fait basculer la Palestine historique sous contrôle israélien.
Les Frères de la bande de Gaza se retrouvent coupés de l’organisation égyptienne, et les Frères de Cisjordanie se retrouvent quant à eux déconnectés de l’organisation jordanienne. C’est tout naturellement que les organisations de Gaza et de Cisjordanie vont opérer un rapprochement avant de fusionner leurs structures pour n’en faire qu’une.


Dans les années 70-80, les Frères palestiniens s’établissent dans les principales villes palestiniennes notamment par les créations d’institutions comme les Centre (al-mujamma`al-islami) et l’Université islamiques de Gaza (al-jam`iyya al-islamiyya) par exemple. La priorité du mouvement était d’islamiser la société, de « préparer les générations » à résister à l’occupant le moment venu.
La résistance militaire à l’occupation n’était pas du tout leur objectif premier contrairement aux mouvements de gauche palestiniens et nationalistes. L’objectif avoué des Frères était de transformer le peuple palestinien en lui octroyant des bases religieuses solides qui lui permettraient de mener efficacement la résistance armée contre l’ennemi.
Les difficultés et les conditions de vie extrême consécutives à l’occupation, la pauvreté, l’humiliation et l’oppression ont poussé les gazaouis puis les palestiniens de Cisjordanie à se soulever contre la barbarie israélienne. C’est l’Intifida.
C’est le 14 décembre 1987 et cinq jours après le déclenchement de ce soulèvement populaire (pour la dignité), qu’officiellement, sous l’impulsion de Cheikh Ahmed Yassine, Abdel Aziz al-Rantissi, Salah Shehadeh, Muhammad Sham’ah, Isa al-Nashar, Abdul Fattah Dukhan et Ibrahim al-Yazuri (les trois premiers ont été assassinés par Israël) que le mouvement de résistance palestinien Hamas est créé. HAMAS est l’acronyme de harakat al muqawama al islamiya qui veut dire mouvement de résistance islamique.
Ce mouvement, contrairement à sa tradition, décide désormais de prendre, par nécessité impérieuse, les armes pour résister légitiment au colonisateur sioniste.
Qu’est-ce donc le Hamas ? Un regroupement de terroristes fanatiques antisémites notoires assoiffés de sang ? Certainement pas ! C’est un groupe de militants réunis autour de la cause commune et noble qu’est de libération de la terre; leur Terre, un groupe porteur d’un projet stratégique, politique, idéologique et religieux.
Est-il composé de religieux seulement ? Non. Le Hamas n’est pas un bloc homogène, plusieurs sensibilités le composent et y rivalisent. Il a une aile politique et militaire, ou encore des dirigeants de l’ « intérieur » (ceux de Palestine) et de l’ « extérieur » (ceux de l’étranger : Liban, Syrie…), ou bien encore des « nationalistes » et des « religieux ». C’est une organisation équilibrée ou plusieurs tendances se côtoient.
Le Hamas n’est pas un corps exogène à la Palestine mais une partie intégrante. Cinq terrains d’activité ont permis à ce mouvement son ancrage dans la société palestinienne.
  1. Le terrain national : Contrairement au FATAH, le Hamas refuse tout compromis, il apparaît donc comme le défenseur le plus radical des droits des palestiniens.
  2. Le terrain militaire : Avec ses brigades Azzedine al Qassam, le Hamas tente de prendre des initiatives militaires pour affliger des pertes à l’occupant.
  3. Le terrain social : A travers ses activités caritatives, il se soucie des conditions de vie des plus défavorisés et tente de les soulager autant que faire se peut.
  4. Le terrain religieux : Le mouvement se réfère fortement à l’Islam qui est l’expression de l’identité palestinienne.
  5. Le terrain financier : Le Hamas, malgré sa clandestinité a réussi a diversifier ses sources financières et à arracher son autonomie financière. Le Hamas puise ses financements de l’Iran, des pays du Golf, d’Arabie Saoudite, des communautés aisées des USA, du Royaume-Uni, du Maghreb, de la Russie et d’autres.
Ce travail de fond et de longue haleine en fait une force incontournable sur la scène palestinienne. Beaucoup ont été surpris lorsque le 25/01/06 le Hamas est élu « démocratiquement » au Conseil législatif palestinien (élection reconnue comme démocratique selon les observateurs internationaux). Certains ont même mis en avant le déni de démocratie pour dire que les palestiniens ont mal voté, alors qu’il ne s’agissait que d’une juste redistribution des cartes politiques. Les apports du Hamas sur le plan politique, social, et militaire l’ont conduit tout naturellement à prendre la tête de la résistance palestinienne, au grand dam du Fatah à bout de souffle et miné par la corruption.
Depuis juin 2007, plusieurs mois après l’élection du Hamas, Israël et l’Égypte imposent un blocus criminel à la bande de Gaza pour punir les choix gazaouis aux élections de janvier 2006. Israël n’a pas intérêt à avoir face à elle pour interlocuteur le Hamas qui serait beaucoup moins conciliant que le Fatah.
Quant à l’Égypte, le pouvoir en place est lui même en prise avec une opposition similaire au Hamas qui est d’ailleurs très populaire dans la population égyptienne. De ce fait l’idée d’une réussite de gouvernance d’un parti au pouvoir du type Hamas est inacceptable pour l’Égypte dans le monde musulman et encore moins à ses frontières.
« Le Hamas », de Khaled Hroub, aux éditions Demopolis et autres
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Reproduction autorisée en citant la source : http://www.al-har.fr/blog/2011/08/26/livre-le-hamas-de-khaled-hroub-editions-demopolis/

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