24 mars 2010  (MO) -          Hana Al-Bayaty fait des  documentaires.          Elle ecrit aussi des pièces d’opinion pour          l’hebdomadaire égyptien Al Ahram. Elle a          vécue à Bruxelles pendant quelques années et a          aidé à organiser le BRussells         Tribunal lors de l’invasion en Irak.          En ce moment elle vit au Caire. Le MO* l’a          rencontrée a l’occasion du septième anniversaire          de l’invasion mais aussi pour la parution du          livre “Cultural Cleansing in Iraq- Why          museums were looted, libraries burned and          academics murdered”. 
         Ce livre  démontre que la guerre en Irak avait pour but          de détruire le pays
         Hana Al Bayaty: Je pense que le  projet de détruire l’Irak remonte à          1990 et aux sanctions imposées contre ce pays.          Elles avaient pour but de le démanteler, mais          comme cela n’a pas vraiment marché, ils ont          alors décidé d’occuper l’Irak. Ce n’est pas un          processus qui a commencé en 2003. Le traitement          préférentiel du Nord (majorité kurde) dans les          années 90 était aussi une tentative de diviser          le pays. L’invasion avait pour but de détruire          les institutions étatiques. C’était seulement          pour annihiler l’Etat. C’est alors que          l’occupation a introduit le sectarisme. Les          irakiens ne s’identifiaient pas en tant que          chiites ou sunnites mais plutôt comme          nationalistes, communistes ou éventuellement          islamistes, y compris le parti Baath-parti de          Saddam Hussein non sectaire- qu’on peut blâmer          de beaucoup de choses, mais sûrement pas de          sectarisme. On a découvert par la suite que 58%          du parti Baath était de confession chiite. 
         Avant l’Irak  était un partenaire de l’Occident.          Pourquoi cette invasion?          
         Hana Al Bayaty: Il y a plus  d’une raison. L’idée de dominer l’Irak et          les autres pays arabes vient de la menace qu’ils          représentent pour Israël. L’Irak était très          riche et a toujours été un carrefour entre          l’Europe et la Chine, entre la Turquie et le          Golfe et entre l’Iran et l’Egypte. Et donc          naturellement celui qui contrôle l’Irak peut          avoir une immense influence sur les marchés          mondiaux. Les États-Unis voulaient avoir ce          pouvoir. C’était donc logique de commencer par          l’Irak. Un deuxième point est que l’Irak était          un pays prospère et donc avait le plus de chance          de devenir un pays démocratique. 
         Cette  possibilité n’était pas en vue sous Saddam          Hussein? 
         Hana Al Bayaty: il y avait une  large classe moyenne qui était très          éduquée. Le gouvernement avait nationalisé le          pétrole, investissait dans l’éducation et la          santé, et avait une armée forte, ... Ils avaient          tout pour devenir un leader du          monde arabe. Dans tous les cas il y          aurait eu naturellement une transition. En Irak,          le rôle de la femme avait été amélioré et elles          étaient les plus libres dans la région. Le crime          de l’Irak a été de nationaliser le pétrole.          C’est la raison pour laquelle l’Occident a          détruit l’Irak. Ca n’avait rien à voir avec          Saddam Hussein. 
         Quand Saddam  Hussein est arrivé au pouvoir il y avait          beaucoup de sympathie pour le parti Baath,          surtout depuis que le parti communiste avait          suivi la position de l’Union Soviétique et ainsi          reconnu l’existence d’Israël. Le peuple a          considéré          cette décision comme une trahison. C’est          donc de la faute des partis de gauche, cela          n’avait aucun lien avec le fait d’être          pro-américain ou non. 
         Saddam est quand  même en partie responsable pour le          déclin de l’Irak? 
         Hana Al Bayaty: Ca a commencé  par la purge que Saddam a entrepris dans          son propre parti. Evidement il y a le Koweït.          Récemment la partie orthodoxe du Baath a reconnu          que l’invasion du Koweït avait été une erreur.          Sur la guerre Iran-Irak (1980-1988) les avis          sont encore partagés. L’Iran et l’Irak ont été          en conflit permanent dans l’histoire. A l’époque          contemporaine, le principal problème était le          caractère expansionniste de la Révolution          Islamique en Iran qui ne reconnait pas la          souveraineté des Etats. Ca a été un facteur très          déstabilisant dans un pays avec autant de          chiites qu’en Irak. Mais l’Irak est tellement          laique que les chiites irakiens ont combattus          l’Iran pendant huit ans. Même lors des élections          de ces dernières années les irakiens ont          démontrés qu’ils étaient laiques. 
         Mais il y avait  de sérieuses oppositions entre les          kurdes et les arabes, les habitants du sud de          l’Irak et l’élite au pouvoir proche de Saddam          Hussein...
         Hana Al Bayaty:  Dans les années 90 des pouvoirs          occidentaux ont entrainés des milices dans le          nord qui voulaient s’engager dans une invasion          de l’Irak.          Ils espéraient aussi un soulèvement populaire          pro-occidental, mais ils n’ont pas pris en          considération la longue histoire des mouvements          nationaux qui ne menaçaient pas l’unité de          l’Irak. On ne peut pas comparer l’Irak à la          Yougoslavie car ce dernier a toujours été un          état fédéral alors que l’Irak est depuis          longtemps unifié. Peut-être il y a un besoin de          plus de décentralisation ou de démocratie          locale…
         L’Irak est  héritier de différentes civilisations, c’est          une très vieille société avec beaucoup de          diversités et de couches. Les milices soutenues          par l’occupation qui ont installées la violence          après l’invasion veulent précisément morceler          tout ce qui rassemble ou unifie les irakiens.          Ils détruisent les symboles et tuent          l’intelligentsia. Les américains ont dépecer          l’armée nationale et veulent créer une nouvelle          armée basée sur ces milices -                           qui elles aussi s’opposent          à un Irak unifié. Elles croient à un  confédéralisme ou à une sorte          d’autonomie, mais aucune ne peut représenter          l’idée d’un Irak uni. 
         Le morcèlement  de l’Irak ne s’est en tous les cas pas          produit. Mission échouée pour les Etats-Unis? 
         Hana Al Bayaty:  Je ne pense pas qu’ils s’attendaient à          tant de résistance. Leur réponse à cette          résistance a été très violente avec comme          résultat, au minimum: deux millions de morts et          cinq millions de réfugiés. Si le but  était de privatiser à nouveau le pétrole          alors c’est un échec. Si le but était de          transformer l’Irak en une fédération faible          alors c’est aussi un échec. Les médias          occidentaux disent que la situation est          maintenant stabilisée, qu’il n’y a plus de          résistance. Mais ceci n’est absolument pas vrai.          Les considérations stratégiques de diminuer les          attaques contre l’occupation et le gouvernement          actuel n’étaient qu’une question de timing. A ce          moment là, c’était les élections américaines:          les derniers mois du mandat de Bush et les          premiers mois d’Obama, il n’y avait aucune          raison de sacrifier des combattants puisque cela          n’aurait pas mener à un changement de politique. 
         Est-ce que la  résistance est irakienne? Quel est          l’importance de la participation étrangère? 
         Hana Al Bayaty:  “La participation étrangère” est          risible.          Même l’armée américaine dit qu’il s’agit de          seulement 2% des combattants. En Afghanistan          c’est la même chose. Et, malheureusement, la          solidarité internationale n’a pas joué un grand          rôle pour soutenir la résistance. 
         Vingt ans après  la première Guerre du Golfe et sept ans          après l’invasion par les troupes          anglo-américaines il faut encore imaginer un          futur . Comment peut-il être vu? 
         Hana Al Bayaty:  Une amélioration ne viendra qu’à partir          du moment où l’occupation prendra fin et lorsque          toutes les troupes étrangères seront parties. Il          faut que le gouvernement actuel soit remplacé          par un gouvernement intérimaire et que des          élections libres soit organisées. La base du          gouvernement intérimaire devra être formée avec          le soutien de la résistance et un espace pour          d’autres patriotes. Par exemple le  mouvement anti-occupation a donné, lors          des dernières élections, son soutien à la          coalition autour d’Ayad Allawi. Cela prouve que          tout et tout le monde ne doit pas forcément          venir du noyau dur de la résistance.
 


 
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