01 avril 2010

Les USA envoient des femmes au front

Article placé le 31 mar 2010, par Mecanopolis

Il fallait «libérer les femmes» – c’était le grand argument pour envoyer contre l’un des pays les plus pauvres du monde la plus puissante machine de guerre de la planète, qui depuis cela, inflige chaque jour d’indi­cibles souffrances aux femmes et aux enfants. Maintenant qu’il est évident que l’armée US et ses alliés de l’OTAN sont à bout de souffle et que la prétendue reconstruction n’est en vue nulle part, on a recours au «facteur féminin»: des Marines femmes sont chargées – une idée des généraux US – de gagner la confiance des femmes afghanes, au moyen de queues de cheval, jeux avec les enfants et bavardages, afin «d’obtenir des informations».

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Dans un cours récent sur la «conscience culturelle» les membres de l’infanterie de marine US ont pris des notes très précises sous la dictée d’un instructeur qui les formait aux règles à respecter lors des conversations avec les villageois afghans: Ne commencez pas à les mitrailler de questions! Brisez la glace en jouant avec leurs enfants! Ne laissez pas l’interprète monopoliser la conversation!

Et n’oubliez pas: «Si vous vous coiffez avec une queue de cheval», leur a expliqué Maria Kelpinski, instructrice, «faites-la dépasser sous votre casque pour qu’on voie que vous êtes une femme.»

Ici, au camp Pendleton, dans les sau­vages sous-bois californiens, ce ne sont plus les marines de papa que l’on forme à intervenir en Afghanistan, mais 40 jeunes femmes qui préparent une expérience d’avenir de l’armée US.

Elles seront le mois prochain les premiers membres du «commando d’intervention féminin» – c’est le nom que les militaires donnent aux unités de 4 à 5 personnes qui accompagneront les hommes en patrouille dans la province d’Helmand afin de mettre de leur côté les campagnardes afghanes, tabou pour les hommes venus de l’extérieur.

Les équipes chargées de rencontrer les femmes dans leurs maisons, d’évaluer leur besoin d’aide et de collecter des informations, constituent un élément de la campagne du général Stanley A. McChrystal pour gagner les «esprits et les cœurs» (hearts and minds) afghans.

Ses officiers disent qu’on ne peut gagner la confiance de la population afghane en ne parlant qu’avec une moitié d’entre elle. «Nous savons que nous pouvons faire quelque chose», dit la Captain Emily Naslund, officier en chef de son équipe et sous-chef du commando.

Comme les 39 autres femmes, la Captain Naslund s’est portée volontaire pour ce programme et fait preuve d’une rayonnante pétulance, mais pas d’une ignorance naïve des frustrations et dangers qui la guettent. La moitié de ces femmes a déjà servi, la plupart en Irak.

«Nous savons toutes que ce que nous espérons ne sera pas, en général, ce que nous obtiendrons en définitive», nous a dit le Sergent Melissa Hernandez, 35 ans, qui s’est proposée parce qu’elle aspirait à autre chose que son job de bureau à Camp Victory, le Q.G. de l’armée US à Bagdad.

Les équipes devraient travailler comme des politiciens qui vont de porte en porte pour s’informer des préoccupations des électeurs. Les équipes doivent aller dans les villages et obtenir du plus âgé des hommes le droit de parler aux femmes, dresser un camp, distribuer du matériel scolaire et des médicaments, boire du thé, parler avec les gens et dans l’idéal obtenir des informations sur le village, les revendications locales et les talibans.

Quoi qu’il advienne: ces équipes reflètent le degré d’adaptation auquel a dû se plier l’armée US en neuf ans de guerre, et non seulement dans la conduite des opérations, mais aussi dans la redistribution des rôles entre hommes et femmes dans ses propres rangs. Le corps des Marines, réputé pour être celui qui fonctionne le plus à la testostérone, ne compte que 6% de femmes, et toujours officiellement exclues des unités combattantes.

Mais bien que les femmes aient déjà été chargées de tâches très dangereuses telles que le déminage ou l’espionnage, les commandos féminins, grâce à des tours de prestidigitation bureaucratiques utilisés aussi bien par l’armée US que les Marines en Irak et Afghanistan, sont «attachés» à des unités exclusivement masculines de la First Marine Expeditionary Force, ce qui constitue pour les femmes une source de fierté et les stimule. «Quand j’en ai entendu parler, j’ai dit: «Oh, d’accord, allons-y!», nous dit le Caporal Vanessa Jones, 25 ans.

L’origine de ces équipes remonte au «programme des lionnes», en Irak, où l’on avait eu recours à des Marines femmes pour fouiller les femmes irakiennes aux barrages routiers. L’an dernier l’armée et les Marines avaient créé des commandos féminins ad hoc, mais les femmes avaient été détachées précipitamment de leurs postes de cuisinières ou d’ingénieurs.

Les femmes de Pendleton sont parmi les premières à avoir été formées exclusivement pour ce type de missions. «Tous les Marines voudraient sortir de l’enceinte de barbelés», selon la caporale Michele Greccho-Lucchina, 22 ans (elle entend par là: être chargés de tâches à l’extérieur des bases). «Les raisons de notre engagement sont diverses, mais cela c’est le principe de base des Marines.»

Les femmes disent qu’elles n’aiment pas combattre et travaillent dans des zones largement nettoyées (des activistes). Mais face à une guerre sans lignes de front, elles ont suivi une remise à niveau approfondie d’entraînement au combat qui les a préparées à tendre des embuscades et leur a donné une formation de snipers.

Lorsqu’elles patrouilleront, les femmes seront armées de fusils M-4, plus courts et plus maniables que les M-16 réglementaires des hommes, mais – c’est ce qu’on leur a dit à l’instruction – si elles se trouvent dans un camp afghan protégé extérieurement par des sentinelles – on leur conseille, si elle se sentent en sécurité, de déposer leurs fusils et ôter leur attirail intimidant de casques et de gilets pare-balles.

On leur a également enjoint de faire preuve de compréhension pour les coutumes locales et de porter un foulard sous leur casque ou, si elles ont trop chaud et sont gênées, de le porter autour du cou pour se couvrir la tête dès qu’elles retirent leur casque.

Des Marines qui ont travaillé avec les équipes ad hoc en Afghanistan, ont déclaré que les campagnardes, que les gens de l’extérieur ne voyaient pratiquement jamais, avaient plus d’influence que les chefs masculins ne pouvaient se l’imaginer et qu’en gagnant la bienveillance des femmes afghanes on réduirait la méfiance des femmes et des hommes à l’égard des troupes américaines.

Le Captain Matt Pottinger, un employé des services secrets stationné à Kaboul et qui a collaboré à la création et à la formation du premier commando féminin, a écrit récemment qu’un homme à la barbe grise a ouvert sa porte à un commando de femmes qui s’était rendu dans un village du Sud de l’Afghanistan en leur disant: «Vos hommes viennent ici pour se battre, mais nous savons que les femmes viennent pour nous aider.» Avec em­barras il avait aussi avoué, a écrit le Captain Matt Pottinger dans le Small Wars Jounal, une publication en ligne, que les femmes étaient «un beau spectacle pour [ses] yeux plus très jeunes.»

Les femmes des campagnes afghanes, qui se rencontrent à la fontaine et se racontent les nouvelles du village, sont souvent des mines d’informations sur l’organisation sociale d’un district ainsi que sur les activistes et personnages influents – des données essentielles pour les combattants américains.

En plusieurs occasions les femmes auraient, selon un mail du Captain Pottinger, fourni des informations fondamentales sur certains rebelles ou fabricants de bombes.

Au cours de leurs entretiens avec les femmes afghanes les Marines doivent leur poser des questions fondamentales, par exemple quel est le plus gros problème du village. Les réponses alimenteront une banque de données qui servira de fil conducteur aux personnels militaires et humanitaires. Madame ­Kielpinski, l’instructrice, a par exemple déclaré: «Si la population déclare que l’irrigation est son plus gros problème, et que votre unité aide à l’améliorer, c’est un énorme succès.»

Pour l’instant les femmes s’inquiètent encore de ce qu’elles auront à affronter d’inconnu. La Captain Clair Henry, 27 ans, commandante d’une équipe, dit que, comme tout officier, elle se fait du souci pour ses subordonnées.

«On est en train d’engager les Marines dans une voie périlleuse», dit-elle, «et en définitive on aimerait bien être sûr qu’on les a correctement formées et qu’elles sont bien préparées, au physique et au moral.» •

Source: The New York Times et Horizons et Débats

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