29 février 2012

À Tunis : Conférence ou complot barbouzard contre Assad ?
 
C’était un des titres de la une du Canard enchainé ce matin dans les kiosques en France. « La semaine dernière à Tunis, les responsables de plusieurs services secrets ont examiné les possibilités d'un coup d'état. »
Il y avait deux réunions à Tunis, s'amuse un haut fonctionnaire du Quai d'Orsay. La première, la conférence dite « des amis de la Syrie », regroupait des représentants d'une soixantaine de pays, dont Hillary Clinton ou Alain Juppé. Le bilan n'est pas glorieux.
Une autre se voulait plus discrète et réunissait des gens en principe mieux armés que les diplomates, les hommes des services secrets. « On leur souhaite bon vent pour dégommer Bachar..» Réaction sur le même ton d'un officier d'état-major : « C'est la meilleure solution. On ne peut pas refaire le même coup qu'avec la Libye et bombarder une armée syrienne autrement plus solide que celle de Kadhafi et dont les blindés se baladent tranquillement dans des villes insurgées. Et puis, cette fois, l'ONU ne donnera pas son feu vert. »
Putschistes à convaincre vite
Exact. Russes et Chinois y mettraient leur veto. Reste alors la méthode déjà utilisée en Libye : fournir des armes efficaces aux insurgés, voire des conseillers en guérilla urbaine. Des livraisons sont prévues, dit-on au Quai d'Orsay et à la Direction du renseignement militaire (DRM), via des pays arabes, comme le Qatar. Mais il y a mieux, et c'est aujourd'hui d'actualité, selon les connaisseurs : « préparer un coup d'État ». Encore faut-il trouver, sur place, des interlocuteurs valables, discrets, courageux. Et cela suppose de sacrés efforts de persuasion.
A Tunis, la semaine dernière, des représentants des services secrets de plusieurs pays : Qatar, États-Unis, Grande-Bretagne, France, Turquie, Arabie Saoudite, notamment - ont envisagé cette solution. L'idée est d'exploiter d'éventuelles divergences au sein des forces de sécurité et du clan Assad. A en croire un officier de renseignement, des militaires syriens, jusque-là plutôt loyaux, considèrent désormais qu'il n'y a pas d'autre issue à la crise actuelle qu'une rupture avec Bachar et sa famille. Selon lui, les princes saoudiens sont prêts à mettre de l'argent sur la table pour aider à la conversion de ces futurs rebelles.
Quant à l'opposition syrienne, « elle est fragmentée, divisée sur le plan ethnique, idéologique ou stratégique », constate un analyste de la DRM. D'un côté, le Conseil national syrien, « un faux nez des Frères musulmans », dit-on. De l'autre, le Comité de coordination nationale, qui regroupe des intellectuels et des opposants favorable une solution entre Syriens. Sans compter les déserteurs de l'Armée syrienne libre. Et pas forcément tous d'accord sur les ingérences étrangères et sur l'avenir du pays, une fois Bachar écarté.
Ce n'est pas joué, et les comploteurs réunis à Tunis savent que le régime peut encore tenir avec ces quelque 40 000 militaires du clan alaouite (branche du chiisme) - trois divisions blindées la Garde nationale, les Forces spéciales - et grâce à des services de sécurité omniprésents. Face sunnites, leur loyauté est aussi une question de survie dans cette guerre civile entre musulmans, sans armistice ni pacifistes à l'horizon.

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