05 juin 2012

Liberté pour Mahmoud Sarsak, victime de la guerre que livre Israël au football palestinien

mardi 5 juin 2012 - 16h:02
Ramzy Baroud




Le dimanche 3 juin, Mahmoud Sarsa, un joueur de l’équipe nationale palestinienne de football, a passé le cap des 80 jours d’une épuisante grève de la faim. 
 
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Manifestation de soutien aux grévistes de la faim à Gaza le 25 mai 2012 - Photo : Joe Catron/ISM-Gaza)

Il a poursuivi sa grève de la faim bien que près de 2000 détenus palestiniens aient décidé il y a quelques semaines de cesser leur propre grève après 28 jours de refus de nourriture.
Bien que l’histoire des prisonniers palestiniens en Israël représente une réalité très commune de détentions illégales et de mauvais traitements, le destin de Sarsak peut également être considéré dans son propre et unique contexte. Ce footballeur qui par le passé a cherché à porter le nom et le drapeau de sa nation sur les scènes internationales, a été arrêté par les soldats israéliens en juillet 2009 alors qu’il était en route pour rejoindre l’équipe nationale palestinienne en Cisjordanie.
Sarsak a été stigmatisé comme « combattant illégal » par le système judiciaire militaire israélien et emprisonné sans aucune accusation ni procès.
Sarsak n’est pas le seul à être en grève de la faim illimitée. Akram Al-Rekhawi, un prisonnier diabétique qui nécessite des soins appropriés, refuse de s’alimenter depuis plus de 50 jours. Au moment où cet article est rédigé, les deux hommes paraissent dans une situation de santé dramatique. Sarsak, autrefois d’une constitution athlétique inégalée, est maintenant décharné au point de plus pouvoir être reconnaissable. Quant à Al-Rekhawi, il est mourant.
Selon les groupes de défense des droits des prisonniers, une cour israélienne a accordé le 30 mai aux médecins de la prison un délai de 12 jours supplémentaires avant de devoir permettre à des médecins indépendants de rendre visite aux prisonniers, prolongeant d’autant leur douleur et leur isolement. L’association Médecins pour des Droits De L’homme - Israël (PHRI), qui a réalisé un travail remarquable en se battant contre les règles draconiennes des tribunaux militaires israéliens, continue à interpeller la cour israélienne de justice pour pouvoir rencontrer Al-Sarsak et Al-Rekhawi, selon l’agence Ma’an News.
Le récit devient ici tristement habituel. Le PHRI, avec d’autres groupes de défense des droits des prisonniers, fait tout ce que les organisations de la société civile peuvent faire dans une situation juridique et politique si oppressive. Les familles prient. Les militants dans les médias sociaux envoient systématiquement les dernières informations et affichent leur solidarité. En attendant, le reste du monde semble ne pas y accorder d’attention - ce qui n’est pas dû à un possible manque de considération pour les droits de l’homme, mais à la sympathie sélective des gouvernements et des médias occidentaux.
Pensez au tumulte fait par les médias des États-Unis sur le sort du militant politique chinois aveugle Chen Guangcheng. Quand il s’est réfugié dans l’ambassade des États-Unis à Pékin, une quasi-crise diplomatique s’est produite. Guangcheng s’est finalement embarqué pour les États-Unis le 19 mai et il a récemment accordé une interview à New York devant une assistance ébahie.
« Le militant âgé de 40 ans et aveugle déclara que sa détention prolongée (de sept ans) démontre que l’arbitraire est toujours la norme en Chine, » a rapporté le New York Post daté du 31 mai. « Y a-t-il une justice ? Y a-t-il la moindre logique dans tout cela ? » a demandé Chen. Peu de médias aux États-Unis contesteraient sa déclaration. Mais il n’est alors plus question de raison quand l’auteur de l’injustice est Israël et que la victime est palestinienne. Al-Rekhawi n’est pas aveugle mais il souffre de plusieurs maladies. Il est enfermé dans la clinique de la prison de Ramle depuis le début de sa détention en 2004, recevant des soins médicaux très insuffisants.
Sarsak qui a été le témoin de beaucoup de tragédies, est maintenant en train d’en devenir une lui-même. Le jeune homme âgé de 25 ans avait par le passé rêvé de propulser son équipe nationale à une position honorable. Si les Palestiniens ont jamais mérité d’être qualifiés de « fanatiques », c’est en référence au football. Quand j’étais enfant à Gaza, je me rappelle avoir joué au football même pour quelques minutes, bravant les couvre-feux militaires israéliens, risquant les arrestations, les blessures et même la mort. D’une certaine manière, dans un camp de réfugiés surpeuplé, le football devient l’équivalent de la liberté.
La Palestine est au 164e rang mondial et ce n’est pas par manque de passion pour ce jeu, mais à cause des tentatives israéliennes constantes de détruire même cette aspiration nationale.
Les exemples de la guerre israélienne contre le football palestinien sont trop nombreux pour être comptés et la plupart d’entre eux ne reçoivent peu ou pas du tout de couverture médiatique. En 2004 Israël a bloqué plusieurs joueurs importants qui voulaient accompagner l’équipe nationale hors de Gaza pour un deuxième match contre Taïwan (la Palestine avait gagné le premier match par 8 à 0). Les obstacles ont culminé avec le bombardement en mars 2006 du stade de football palestinien à Gaza, où le champ d’herbe a été transformé en un profond cratère. Puis dans la guerre contre Gaza, l’hiver 2008-2009, les agressions sont devenues sanglantes quand Israël a assassiné trois footballeurs de niveau national : Ayman Alkurd, Shadi Sbakhe et Wajeh Moshtahe. Il a également bombardé à nouveau leur stade.
Sarsak était un nouveau visage prometteur du football palestinien. Dans une période de division et de sectarisme entre Palestiniens, l’équipe nationale a su maintenir une unité symbolique entre Gaza et la Cisjordanie - et entre les Palestiniens où qu’ils soient. Ces jeunes hommes sont la preuve vivante que des temps meilleurs peuvent un jour exister. Mais à présent, l’étoile de Sarsak se fane de même que sa vie. Sa mère qui ne l’a pas vu depuis son arrestation, a déclaré à Ma’an News qu’elle pensait à son fils chaque minute de chaque jour. « Pourquoi n’y a-t-il personne qui agisse pour sauver sa vie ? » demande-t-elle.
Écrivant dans le journal Nation daté du 10 mai, Dave Zirin a écrit : « Imaginez qu’un membre de l’équipe de Basket-ball des États-Unis, par exemple Kobe Bryant, se retrouvait enlevé par un gouvernement étranger alors qu’il se rendait à un tournoi international, et gardé en prison pendant trois années sans procès ou même sans avoir connaissance des raisons pour lesquelles il a été emprisonné... Il y aurait des chances que de puissantes organisations de sports au niveau international - l’IOC, la FIFA - traiteraient le pays à l’origine de l’emprisonnement comme un paria jusqu’à ce que Kobe soit libéré. Et il y a de fortes chances que les Laker-haters (équipe de Los Angeles) porteraient des auto-collants qui diraient : « la liberté pour Kobe ».
Sarsak est le Bryant de son peuple. Mais interrogez n’importe quel commentateur politique et il vous dira pourquoi Mohmoud Sarsak n’est pas Kobe Bryant et pourquoi Al-Rekhawi n’est pas Chen. C’est la même logique déversée par le puissant lobby pro-israélien basé à Washington. Pourquoi les institutions sportives internationales ne manifestent-elles pas une solidarité totale avec Sarsak qui se meurt ? Pourquoi les matchs de football n’incluent-ils pas un moment de recueillement pour les joueurs palestiniens assassinés, et le jeune homme mourant qui n’a fait que vouloir rejoindre ses équipiers une fois de plus sur le stade ? Pourquoi Israël n’est-il pas tout simplement et totalement boycotté par chaque organisation sportive internationale ?
« Tant que Sarsak restera indéfiniment détenu et tant qu’Israël prendra pour cibles légitimes de guerre les infrastructures sportives et même les athlètes, la FIFA ou l’UEFA, sans même parler d’une partie de la communauté sportive au niveau international, doivent s’abstenir de toute compromission », écrit Zirin.
Ce serait une initiative tardive mais sans aucun doute urgente, car les sportifs palestiniens sont littéralement en train de mourir.

*Ramzy Baroud (http://www.ramzybaroud.net) est un journaliste international et le directeur du site PalestineChronicle.com. Son dernier livre, Mon père était un combattant de la liberté : L’histoire vraie de Gaza (Pluto Press, London), peut être acheté sur Amazon.com.

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4 juin 2012 - Press TV - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.presstv.ir/detail/2012/0...
Traduction : Info-Palestine.net - Naguib

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