06 juin 2012

Quand Israël se moque des prisonniers palestiniens

Malgré un accord, Tel-Aviv poursuit sa politique d’isolement et de reconduite des détentions administratives.
Le 17 avril, les prisonniers palestiniens détenus en Israël – ils sont 4 700 – débutaient une grève de la faim pour dénoncer les conditions de détention et les brimades dont ils sont l’objet de la part de l’administration israélienne. Un mouvement d’une ampleur sans précédent depuis au moins une vingtaine d’années et largement relayé au niveau international. Un mouvement victorieux puisque, le 14 mai, les détenus et l’administration pénitentiaire signaient un accord. Israël accédait aux trois principales revendications des prisonniers : levée de la détention illimitée sans jugement, de l’isolement carcéral et autorisation des visites pour les prisonniers originaires de Gaza, en échange d’un engagement signé à « s’abstenir de tout acte de terrorisme » ainsi que de toute nouvelle grève de la faim. « Tous les détenus administratifs seront libérés à l’issue de leur période de détention en cours, à moins que de nouvelles preuves ne soient présentées contre eux », indiquait même le Shin Bet, les services de renseignements intérieurs israéliens. Mark Regev, le porte-parole du premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, disait « espérer que ce geste servira à établir la confiance entre les parties et conduire à la paix ». Voire ! En réalité, Israël ne respecte pas l’accord passé. Deux prisonniers, Dharar Abou-Sisi et Awad Zaki Assaïdi, de la bande de Gaza, sont toujours maintenus en isolement contrairement aux termes de l’accord qui stipule leur transfert dans les soixante-douze heures avec les autres détenus dans des cellules « normales ». Selon Mona Nadaf, avocate d’Addameer (association pour les droits de l’homme et le soutien aux prisonniers), qui a pu les visiter, sept Palestiniens, en grève de la faim, sont toujours détenus à la prison hôpital de Ramleh. Ils sont victimes de négligences médicales. L’envoyé spécial du quartet pour le Proche-Orient (États-Unis, Russie, Union européenne, ONU), Tony Blair, s’était félicité de l’accord. Il saluait « la décision importante de limiter le recours à la détention administrative », une disposition héritée justement du mandat britannique sur la Palestine qui permet l’incarcération sans inculpation ni jugement pour des périodes de six mois renouvelables indéfiniment. En mai, les procureurs militaires israéliens ont renouvelé la détention administrative de quatre députés du Conseil législatif palestinien. Riad Al Ashkar, chercheur, spécialiste dans les affaires des prisonniers, a révélé que les procureurs militaires israéliens prétendent ne rien savoir sur l’existence de l’accord signé. En réalité, le gouvernement israélien voulait faire cesser le mouvement et éviter la mort de détenus en prison (en général les malades en phase finale sont libérés quelques semaines avant leur mort). C’est ce que le gouvernement israélien appelle « établir la confiance entre les parties » pour « conduire à la paix » !

Pierre Barbancey
L'Humanité

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