09 mai 2011

Reconnaître l’État palestinien en septembre prochain : une erreur !

samedi 7 mai 2011 - 09h:13
Daniel Vanhove




Comment peut-on se réjouir voire adhérer aujourd’hui à la reconnaissance prochaine de l’État croupion palestinien !? Cela me paraît invraisemblable. 
 
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Le territoire palestinien dans l’histoire

Depuis plusieurs mois, l’actuel et non élu gouvernement palestinien de Cisjordanie emmené par son Premier ministre, l’affairiste Salam Fayyad, se démène au niveau international pour que soit reconnu l’État palestinien lors de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre prochain. Et plusieurs pays ont déjà emboité le pas dans ce sens.
Cela me paraît une manière quelque peu commode de se débarrasser de cet incessant conflit, et au-delà des bonnes intentions que semble traduire une telle approbation, c’est une tentative de liquider ce dossier empoisonné à peu de frais. Outre la légitime aspiration et le fait bien compréhensible que cet État soit enfin reconnu par l’ensemble de la Communauté internationale et admis comme nation au sein de l’ONU, de quel État parle-t-on ? De « l’archipel » actuel, tel que l’illustrait la carte publiée par Le Monde Diplomatique en avril 2009 ?
Pour rappel : depuis la création de l’État israélien et ses détestables pratiques visant à repousser ses frontières sous de fallacieux prétextes idéologiques et sécuritaires, le dépeçage systématique du territoire palestinien par l’implantation de colonies est considéré comme un « crime de guerre » par la Cour pénale internationale. Et de la Palestine historique, il ne reste guère qu’environ 15% morcelés de son territoire, à l’image des bantoustans de l’Afrique du Sud de l’époque - sans parler du mouroir de Gaza où s’entasse une population asphyxiée par l’un des pires blocus mis en place par l’occupant et régulièrement ciblée par sa machine de guerre.
Dès lors, même si ce projet d’État stipule que c’est à l’intérieur des frontières de 1967, avaliser un État palestinien aujourd’hui, c’est :
-  sans le dire, participer à un déroulement de faits inacceptables ;
-  entériner le Mur de séparation qui pénètre profondément en terres palestiniennes ;
-  admettre une partie de la colonisation dont celle de Jérusalem-Est qui est une annexion de facto de la ville, pourtant décrétée capitale du futur État ;
-  accepter que jamais les réfugiés ne pourront revenir chez eux, à savoir en terres conquises, comme le garantit pourtant la Résolution 194 des Nations-Unies adoptée le 11 décembre 1948 ;
-  avaliser la politique raciste d’apartheid par l’occupant sur l’occupé ;
-  se plier à la loi militaire qui prévaut dans toutes les interventions israéliennes et dans la politique mise en place par les différents gouvernements qui se succèdent à la Knesset ;
-  bafouer le souvenir des martyrs qui ont payé de leur vie la défense de leur terre ;
-  tenter de liquider une fois pour toutes la résistance à travers ses mouvements divers ;
-  mais c’est surtout, accepter le découpage opéré après la guerre occidentale de ’39-45, où pour se dédouaner de l’horreur qu’ils avaient infligée aux juifs, les pays vainqueurs ont imposé au peuple palestinien sans même demander l’avis de ses représentants, de payer leur ardoise finale en partageant le pays au profit des juifs fuyant l’Europe antisémite...
Ainsi, croire béatement que l’annonce officielle de la proclamation d’un vague État palestinien aurait pour conséquence le règlement des multiples contentieux qui existent entre les occupants et les occupés est un leurre de plus dans une situation où les mirages tiennent depuis longtemps lieu de réalité. Quantité de décrets, résolutions, et lois internationales des plus officielles n’ont jamais rien changé à la donne : les différents gouvernements israéliens ne s’en embarrassent pas, optant plutôt sur la bien connue loi du plus fort, seule réalité qui préside au cours des choses, comme chacun peut le voir au quotidien à condition de quitter toute analyse idéologique du cours de l’Histoire.
Et en-dehors de quelques vagues protestations, aucun des pays ayant confirmé son soutien à la reconnaissance prochaine de cet État palestinien n’a jamais rien fait de concret pour intimer à Israël l’arrêt de ses exactions répétées afin de le contraindre à respecter le Droit international. Depuis toujours, le gouvernement israélien ment, vole, agresse, emprisonne, mutile, tue, et s’approprie ce qui ne lui appartient pas, impunément, au vu et au su de tout le monde : à part quelques timides indignations, personne ne bouge. Au contraire, chacun à leur manière les USA et l’UE soutiennent ! Par ailleurs, à l’annonce de l’accord récent de réconciliation entre le Fatah et le Hamas - qui reste encore à mettre en place sur le terrain avant de s’en réjouir - les dernières réactions des responsables israéliens indiquent, s’il en était encore besoin, que si certaines choses évoluent dans le courant qui anime les sociétés arabes de la région, il en est une qui ne bouge pas : c’est la position intransigeante d’Israël, figée, momifiée et arcboutée sur les certitudes de sa toute puissance.
Tout ce qui ne rappelle pas inlassablement cette sinistre réalité quotidienne participe au leurre auquel aucun militant de cette cause ne peut participer. Et il faut dire et répéter que la création de l’État sioniste comme réparation de nos crimes odieux perpétrés à l’encontre de la communauté juive pendant les années de guerre ’39-45 est une ardoise qui ne peut être payée par la population de Palestine, sans son accord explicite et clairement formulé. Quelle qu’en soit la raison, quel pays d’entre les nôtres, accepterait-il que l’on procède à la partition d’une partie majeure de son territoire sans même être consulté sur la question, pour solder un conflit qui ne le concerne pas !? Ce que nous ne pouvons tolérer pour nous ne peut être imposé à d’autres, sinon par ce subterfuge du deux-poids deux-mesures dans la loi du plus fort et qui n’a décidément rien à voir avec une quelconque justice.
Suite aux chamboulements auxquels on assiste en pays arabes depuis le début d’année, le moins que l’on puisse exiger de la Communauté internationale ainsi nommée, soit qu’elle revoie sa copie d’antan et se tourne vers les premiers concernés, à savoir le peuple palestinien pour connaître son avis sur une question d’une telle importance.
A l’époque actuelle, informés et outillés comme nous le sommes, revisitant l’Histoire à la moindre occasion afin d’en corriger si possible les erreurs, prônant de plus en plus une démocratie participative, et suite aux soulèvements populaires arabes qui vont indubitablement modifier les équilibres de la région, en lieu et place de cette annonce inadéquate défendue par le Premier ministre palestinien actuel et relayée par nombre d’intervenants - dont certains sont surtout soucieux, en ces temps chahutés, de préserver ce qui peut encore l’être de l’entité sioniste - il serait peut-être plus utile de se demander si la première chose à faire ne serait pas une remise à plat de ce sinistre dépeçage dont on mesure les funestes conséquences chaque jour depuis plus de 63 ans.
Et plutôt que de claironner aux vents l’annonce d’un énième État palestinien mort-né, pourquoi ne pas proposer un grand référendum à tous les citoyens palestiniens, présents et exilés, pour connaître leur avis sur la question : faut-il scinder le pays et reconnaître l’État israélien dans des frontières à confirmer ou faut-il revenir à la Palestine historique où tous les habitants seraient les bienvenus, quelle que soit leur origine, leur religion ou leur appartenance philosophique, à l’instar de tout État démocratique moderne digne de ce nom ?
Cela n’a que trop tardé et ce n’est qu’après le résultat d’un tel référendum que l’on pourrait s’orienter vers la proclamation d’un Etat palestinien dont les contours seront bien la traduction de la volonté de sa population. C’est effectivement une rare occasion à ne manquer sous aucun mauvais prétexte : « maintenant ou jamais » comme d’aucuns l’affirment !

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* Daniel Vanhove est Observateur civil et membre du Mouvement Citoyen Palestine
Il a publié aux Ed. Marco Pietteur - coll. Oser Dire :


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5 mai 2011 - Communiqué par l’auteur

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