23 juillet 2010

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Article de Luis Jairo Ramirez


Editorial du numéro 2546 de Voz (hebdomadaire du PC Colombien)



Dans un jugement historique et 16 ans après le meurtre (9 août 1994), la Cour Inter-américaine des Droits de l'Homme a condamné l'État colombien pour l'assassinat du sénateur communiste Manuel Cepeda. Déjà, le 10 décembre 2009, le Conseil d'Etat avait également condamné l'État après avoir constaté une négligence dans la protection du sénateur et leader du Parti communiste. Avec ce verdict, monte la volonté que la démarche collective qui a porté le génocide de l'Union Patrotique (UP) et du Parti communiste colombien (PCC) devant la Commission Inter-Américaine débouche sur la responsabilisation de l'Etat colombien.



La mort de Manuel Cepeda fut froidement planifiée à la demande des services de renseignement militaire dans le cadre de l' « Opération Coup de Grâce », qui a commencé avec l'assassinat de Miller Chacon, secrétaire à l'organisation du Parti communiste colombien, le 25 novembre 1993. Le ministre de la défense d'alors, Rafael Pardo, avait refusé de condamner cette opération militaire. Manuel Cepeda Vargas, fut assassiné par six hommes armés; trois d'entre eux, soldats de l'Armée nationale qui agissaient sous les ordres du chef paramilitaire Carlos Castaño Gil, qui a son tour obéissait aux ordres des supérieurs de l'establishment, appartenant apparemment au « Groupe des 8 », dont faisaient partie des politiciens des partis traditionnels, des Généraux et des personnes influentes du pays et de l'Etat, dont les identités n'ont pas encore été déterminées par la justice nationale



Au cours de l'enquête, on a appris que des sous-officiers de l'Armée avaient affirmé que le général Herrera Luna avait donné l'ordre d'exécuter le sénateur Cepeda. Cette confession, ainsi que d'autres preuves, ont abouti à la détention des sergents Justo Gil Zúñiga et Hernando Medina Camacho du 12ème bataillon d'artillerie de Bogotá pour leur participation au crime. Le général Herrera n'a même pas été inquiété.



Ces crimes s'ajoutent à la mort de plus de 5 000 militants et dirigeants de l'Union Patriotique et du Parti communiste colombien depuis les années 1980. Comme on le sait, avec le génocide de l'UP et du Parti communiste, le pays a perdu une occasion colossale de sortir pacifiquement du conflit interne et la possibilité d'une transition vers un nouveau cadre institutionnel, réellement démocratique et progressiste.

Ce qui s'est passé ensuite en Colombie fut un véritable holocauste. Sous les gouvernements d'Andrés Pastrana et Álvaro Uribe Vélez, s'est consolidée l'alliance étroite qui existait entre hauts fonctionnaires de l'Etat, narco-trafiquants, entrepreneurs, dirigeants politiques traditionnels, hauts gradés de l'Armée régulière et para-militaires pour l'exécution de crimes politiques avec un bilan tragique pour la société colombienne, et en particulier pour l'opposition démocratique et ses organisations.

Le jugement de la Cour Inter-Américaine exige que le Président de la République demande pardon en session plénière du Congrès de la République avec retransmission en direct dans tout le pays. Il devra également s'engager à ce que la justice puisse avancer dans l'identification pleine et entière des auteurs intellectuels de l'assassinat et garantir la vie, la dignité et l'honneur des survivants et des proches des victimes du génocide contre l'UP et le PCC, chose sur laquelle le ministre de l'Intérieur actuel n'est absolument pas clair.

Comme l'ont écrit certains chercheurs et spécialistes du sujet: « Pour ceux qui ont vécu de près tant la violence que l'impunité, trouver une reconnaissance internationale et une sentence qui inscrive dans le marbre la véritable histoire est un fait historique d'une énorme importance et un grand succès ».


De nouveaux résultats des enquêtes sur les crimes contre l'humanité qui ont impliqué de hauts dignitaires de l'État sont à venir. La condamnation à 30 ans d'emprisonnement du colonel Plazas Vega pour la disparition de 11 employés du palais de Justice et les enquêtes en cours contre les anciens généraux Arias Cabrales, Iván Ramírez et Rito Alejo del Rio, entre autres; les procès judiciaires pour faire le jour sur les responsabilités dans l'affaire des « faux positifs » [jeunes civils enlevés et assassinés par l'Armée pour gonfler les chiffres des enlèvements de la guerrilla], pendant que le président élu Juan Manuel Santos était ministre de la Défense; les scandales d'espionnage illégal de la part de la DAS, sont peut-être une des raisons pour lesquelles ceux qui se réclament de l' « Unité Nationale » cherchent à s'en laver les mains et à se défendre contre l'exigence de justice et de fin de l'impunité qui monte dans le pays. Comme cela s'est passé avec la Junte militaire argentine, avec les militaires chiliens et avec Fujimori, les génocides colombiens seront punis par la justice et l'histoire!

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