24 décembre 2010

Le fondateur de WikiLeaks passe à l’offensive à sa sortie de prison

mercredi 22 décembre 2010
Patrick Martin - WSWS



Lors d’interviews effectués jeudi soir et vendredi matin, le fondateur de WikiLeaks Julian Assange a affirmé que son organisation avait été renforcée après avoir essuyé les attaques des autorités politiques suisses, britanniques et américaines et que les publications dans Internet de télégrammes diplomatiques secrets des États-Unis continueraient indéfiniment. 
 
(JPG)
Julian Assange
 
Assange a fait ces déclarations dans les 24 heures suivant sa libération de la prison de Wandsworth à Londres, une prison datant de l’époque victorienne où il a été incarcéré durant neuf jours sur la base d’un mandat d’extradition de la Suède où il fait face à de fausses accusations d’agression sexuelle.
S’adressant à des journalistes jeudi soir à Londres, après avoir été libéré sous caution, Assange a qualifié l’enquête de la Suède de « campagne de diffamation ».
« C’est ce qui arrive à quiconque est à la tête d’une organisation qui dévoile les secrets des grandes puissances et qui fait face à une grande opposition : il sera attaqué et chaque aspect de sa vie sera examiné de près », a-t-il déclaré.
« Je ne veux pas dire par là, car nous n’avons pas de preuve, que tout ceci a été sciemment conçu pour attaquer l’organisation, mais, une fois que l’affaire a été mise en branle, elle a été utilisée, très agressivement, pour attaquer l’organisation. »
Il a parlé du « sourire méprisant du secrétaire à la Défense Gates lorsqu’il a appris mon arrestation, comme s’il venait de gagner quelque chose... »
Assange a affirmé ensuite : « L’une des choses qui nous inquiètent depuis que je suis au Royaume-Uni est de savoir si les procédures d’extradition vers la Suède, qui se déroulent de manière très étrange et inhabituelle, viseraient en fait à me faire déplacer dans une juridiction où il serait ensuite plus facile de m’extrader vers les États-Unis. »
S’adressant à des journalistes au manoir de campagne dans le comté de Suffolk, où il est quasiment assigné à domicile, Assange a commenté que des tentatives d’extradition venant des États-Unis « sont de plus en plus sérieuses et probables ».
Il a de plus déclaré que les attaques prenaient d’autres formes. WikiLeaks fait face à « ce qui semble être une enquête illégale... certaines personnes, que l’on présume être affiliées à nous, ont été détenues, suivies, se sont vu confisquer leurs ordinateurs, et ainsi de suite. » Il a dit que l’organisation devait consacrer plus de 85 pour cent de son temps et de ses ressources pour repousser les attaques technologiques et légales.
Les appels publics aux États-Unis pour son arrestation et même son assassinat étaient « très sérieux », a-t-il dit. « Les États-Unis ont démontré récemment que leurs institutions ne semblent pas respecter la loi. Et faire face à une superpuissance qui semble ne pas respecter la loi est quelque chose qui doit être pris très au sérieux. »
Interviewé à deux émissions de télé du matin aux États-Unis, le Today Show à NBC et Good Morning America à ABC, Assange a défendu son innocence face aux accusations de la Suède, indiquant que les autorités suédoises n’avaient jamais présenté de preuve contre lui, ni au tribunal, ni à ses avocats suédois.
Il a prévenu que le seul but des accusations était de fournir un prétexte à son incarcération et à son extradition vers les États-Unis, où un jury d’accusation l’a peut-être déjà inculpé sur la base de l’Espionage Act.
« Toute cette foutue affaire est gardée secrète », a-t-il lancé au Today Show. « Il doit y avoir quelque chose de malsain aux États-Unis pour qu’une telle enquête contre moi, et en fait contre mon organisation... doive être menée en secret. »
Il s’est aussi dit inquiet du traitement réservé à Bradley Manning, le soldat de l’armée des États-Unis qui est détenu par l’armée, car on le soupçonne d’être la source d’au moins une partie du matériel dévoilé à WikiLeaks. (Voir, « Accused WikiLeaks source Bradley Manning held in solitary confinement »)
Lorsque l’intervieweur du réseau ABC, George Stephanopoulos, a fait référence à un article publié dans le New York Times du vendredi, indiquant que le gouvernement américain pourrait accuser Assange d’avoir conspiré avec Manning pour obtenir des documents militaires et diplomatiques des États-Unis, Assange a répondu, « Je n’avais jamais entendu le nom de Bradley Manning avant qu’il ne soit publié dans les journaux. La technologie de WikiLeaks a été conçue dès le départ pour assurer que nous ne connaissions jamais l’identité ou le nom de la personne qui nous soumet du matériel. » C’était la seule façon de garantir à nos sources qu’elles allaient être protégées, a-t-il ajouté.
Lorsque Stephanopoulos lui demanda si les accusations en Suède étaient le résultat d’un coup monté, Assange répondit : « J’ai appris que des textos entre les deux femmes qui auraient été interceptés confirmeraient que c’est un coup monté, mais la police suédoise a refusé de les rendre publics. » Questionné s’il avait eu une relation sexuelle avec les deux femmes sans leur consentement, il a répondu : « Absolument pas. »
Lors des deux émissions de télé américaines, quand les intervieweurs ont suggéré que les documents révélés par WikiLeaks mettaient en danger la vie de diplomates ou « sabotaient la paix », Assange a répondit en brandissant l’édition du vendredi de Guardian, le quotidien britannique ayant eu accès à la totalité des précieux télégrammes diplomatiques, et en lisant l’article à la une du journal sur le recours systématique à la torture par les forces indiennes au Cachemire.
Ce type de révélation allait se poursuivre indéfiniment, a-t-il indiqué, rappelant à ABC que seulement 2000 des 250.000 télégrammes secrets avaient été rendus publics sur le site de WikiLeaks.
À une audience du Congrès jeudi à Washington, une demi-douzaine de juristes et d’avocats du domaine des libertés civiles ont affirmé qu’accuser Assange d’après l’Espionage Act était peu probable, car aucun jury n’a condamné, selon les clauses de cette loi, de journaliste ou autre personne qui auraient obtenu des informations secrètes.
Le congressiste John Conyers, président sortant de la commission des affaires judiciaires de la Chambre, qui avait convoqué l’audience, a indiqué que le prochain Congrès allait certainement réviser l’Espionage Act, laissant entendre qu’une intervention du législatif pour fournir une nouvelle base légale dans l’objectif de criminaliser WikiLeaks était probable.
Le même jour, lors d’une conférence de presse dans la capitale américaine, Daniel Ellsberg, qui avait dévoilé les papiers du Pentagone au New York Times en 1971, s’est porté à la défense d’Assange et de Bradley Manning. Ellsberg, qui a maintenant 79 ans, a parlé de Manning comme d’un « frère » qui, s’il a vraiment fourni les documents à WikiLeaks, a agi de façon « très admirable ».
Il a déclaré que les actions de Manning et d’Assange ne justifiaient pas plus la poursuite de ces derniers que celles du Times lorsqu’il avait publié les papiers du Pentagone ou du Washington Post en révélant la conspiration du Watergate.

21 décembre 2010 - World Socialist Web Site - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.wsws.org/francais/News/2...


Aucun commentaire: