03 juillet 2010

Blocus « allégé » alors que les Gazaouis meurent de faim plus lentement

samedi 3 juillet 2010

Jonathan Cook
The Electronic Intifada


Comme Israël a annoncé cette semaine « l’assouplissement » du blocus de Gaza qui dure depuis quatre ans, un responsable a expliqué la nouvelle règle du jeu : « les biens civils pour les civils. »

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Sud de la bande de Gaza - Des Palestiniens transportent l’aide alimentaire reçue - Photo : Hatem Omar/MaanImages

Les restrictions sévères et apparemment arbitraire sur les denrées alimentaires entrant dans l’enclave - non au coriandre , oui à la cannelle - prendront fin. Les 1,5 million d’habitants à Gaza ont toute la coriandre qu’ils veulent.

Ce « rajustement », comme le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu l’a appelé, vise uniquement à limiter les dégâts. Avec Israël comme responsable d’avoir tué neuf civils à bord d’une flottille d’aide dirigée vers Gaza il y a trois semaines, le monde a enfin commencé à se demander à quel but sert le siège. Est-ce que ces neuf personnes avaient vraiment besoin de mourir, pour arrêter la coriandre, du chocolat et des jouets d’enfants d’atteindre Gaza ? Et, comme Israël s’attend à d’autres flottilles, faudra-t’il qu’ils en tuent d’autres afin de pouvoir faire respecter la politique ?

Face à ce contrôle importun, Israël - ainsi que les États-Unis et les pays européens qui ont été complices de l’état de siège - veut désespérément détourner l’attention de la demande que le blocus soit levé entièrement. Au lieu de cela il préfère faire valoir qu’un blocus de Gaza plus libéral servira à distinguer de manière efficace entre les nécessaires mesures « sécuritaires » et un blocus « civil » blocus injuste. Israël s’est donné le rôle-titre de chirurgien qui, confronté à des jumeaux siamois, trouve la maîtrise de l’opération miraculeuse nécessaire pour les dissocier.

Netanyahu a dit à son cabinet que le résultat serait un « resserrement du blocus de sécurité parce que nous avons enlevé la capacité du Hamas de dénoncer Israël pour nuire à la population civile. » Ecoutez les responsables israéliens et il semble que des milliers d’articles « civils » sont prêts à pleuvoir sur la bande de Gaza. Aucune roquette Qassam du Hamas, mais bientôt, si nous voulons y croire, les magasins de Gaza seront aussi bien garnis qu’un Wal-Mart ordinaire.

Certes, cela n’arrivera jamais.

Même si de nombreux articles ne sont plus interdits, ils doivent encore trouver leur chemin d’entrée dans l’enclave. Israël contrôle les points de passage et détermine le nombre de camions qui sont autorisés dans le quotidien. Actuellement, seul un quart du nombre, une fois autorisés, sont en mesure de livrer leur cargaison, et ce niveau ne changera pas de façon considérable. En outre, dans le cadre du blocus de « sécurité » , on s’attend à ce que l’interdiction continue sur des éléments tels que le ciment et l’acier dont ils ont désespérément besoin pour construire et réparer des milliers de maisons ravagées par l’attaque d’Israël il y a 18 mois.

En tout cas, jusqu’à ce que les frontières, le port et l’espace aérien de Gaza lui appartiennent, et que ses usines sont reconstruites, et les exportations deviennent à nouveau possible, l’économie entravée n’a pas l’espoir de récupérer. Pour l’écrasante majorité des Palestiniens de Gaza, engluée dans la pauvreté, la nouvelle liste des articles admissibles - y compris la coriandre - ne restera plus qu’une aspiration.

Mais le plus important pour Israël, en concentrant notre attention sur la prétendue fin du blocus « civil », c’est d’espèrer que nous oublierons de poser une question plus pertinente : quel est le but de cette de ce blocus de « sécurité » reconçu ?

Au fil des années, les Israéliens ont appris de manières diverses que le blocus a été imposé afin d’isoler les dirigeants « terroristes » de la bande de Gaza, le Hamas ; pour servir de contrepoids pour arrêter les tirs de roquettes à proximité des communautés israéliennes ; pour empêcher la contrebande d’armes vers Gaza, et pour forcer le retour du soldat capturé Gilad Shalit.

Aucune des raisons ne résiste au moindre examen. Le Hamas est plus puissant que jamais, les tirs de roquettes ont cessé depuis longtemps ; les trafiquants d’armes utilisent les tunnels abondants sous la frontière égyptienne, et non pas d’Erez ou de Karni et Gilad Shalit serait déjà chez lui si Israël avait sérieusement voulu l’échanger pour mettre une fin au siège.

Le véritable objectif du blocus a été exposé de façon flagrante, à son origine, au début de 2006, peu après la victoire du Hamas aux élections palestiniennes. Dov Weisglass, conseiller en chef du gouvernement à l’époque, a dit qu’il mettrait les Palestiniens dans la bande de Gaza « au régime, mais ne pas les faire mourir de faim. » Les organismes d’aide peuvent attester de la malnutrition envahissante qui a suivi. Le but ultime, a admis Weisglass, était de punir les habitants de Gaza dans l’espoir qu’ils renverseraient le Hamas.

Serait-il possible que Weisglass soit un vestige de l’ère pré-Netanyahu, son blocus-comme-alimentation remplacé depuis longtemps ? Pas du tout. Le mois dernier, au cours d’une action en justice contre le siège, le gouvernement Netanyahu a justifié la politique comme n’étant pas une mesure de sécurité, mais une « guerre économique » contre Gaza. Un document a même exposé, le nombre de calories minimum - ou « lignes rouges », comme ils ont également été évoqués - dont ont besoin les habitants de Gaza en fonction de leur âge et leur sexe.

En vérité, le blocus de « sécurité » d’Israël, dans ses deux incarnations ancienne et nouvelle, est véritablement un blocus « civil ». Il a été conçu et continue d’être une « punition collective » du peuple de Gaza pour avoir élu les mauvais dirigeants. Heureusement que le droit international définit le statut de la politique d’Israël comme un crime contre l’humanité.

Alléger le siège de sorte que la bande de Gaza meure de faim plus lentement est peut-être mieux que rien. Mais la libération de 1,5 million de Palestiniens de la prison qu’Israël a construite pour eux est le véritable devoir de la communauté internationale.

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Jonathan Cook est écrivain et journaliste, basé à Nazareth, Israël. Il est membre du comité de parrainage du Tribunal Russell sur la Palestine dont les travaux ont été présentés le 4 mars 2009.

Son site : http://www.jkcook.net

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