MLEETA : le musée de la résistance
Cirepal (Centre d’Information sur la Résistance en Palestine)
3 juillet 2010
C’est sur le site même où s’est trouvée la base opérationnelle de la résistance islamique de 1985 à 2000, que le Hezbollah a construit ce site touristique. Le 25 mai 2010, soit au dixième anniversaire de la libération, le site de Mleeta a ouvert ses portes : le musée de la résistance s’étale sur 60.000 m2 dont 4.500 m2 de constructions. Y ont travaillé pendant 150.000 heures plus de 100 architectes et ingénieurs de diverses spécialités. Construit avec des matériaux divers, ce musée, gigantesque et superbe, est d’avant-garde, tant au niveau de sa conception qu’au niveau de sa signification. Ses concepteurs ont voulu en faire un lieu touristique moderne tout en gardant son caractère combatif, en jouant sur la juxtaposition judicieuse du matériau ultra-moderne et du matériau naturel et des formes. Les treillis couleur de terre qui couvrent les murs et les treillis naturels à partir des feuilles des arbres participent de ce jeu unique pour illustrer ce que peut être un musée construit par la résistance et sur un site de la résistance.
Le musée de Mleeta a pour vocation d’être la mémoire de ce que furent ces années de la résistance, de 1985 à 2000. Les guides et les panneaux explicatifs, ainsi que la salle d’exposition et le film court-métrage, résument ce que furent ces quinze années de combat pour libérer le sud du Liban. Dans ce site, agrandi en musée, ont vécu les combattants qui se dirigeaient au front. Dans ce site, sont tombés martyrs des centaines de combattants, lors des bombardements israéliens. De ce site, partaient des combattants pour tomber martyrs ailleurs.
En fait, Mleeta n’est pas un village, mais une colline élevée située entre trois villages de Iqlim al-Tuffah. De cette position avancée vers le sud, se préparaient et se lançaient les opérations armées contre les positions israéliennes. C’est sur cette colline surplombant tout le sud, située entre Jezzine et Nabatyeh, qu’est visible toute la région du sud jusqu’à la frontière avec la Palestine occupée. Pendant quinze ans, l’armée sioniste a bombardé le site, sans jamais parvenir au cœur, c’est-à-dire au tunnel où se trouvait la chambre opérationnelle. Des milliers de combattants ont creusé, en silence, pendant trois ans, avec des moyens rudimentaires, pour préserver les moyens combatifs de la résistance. C’est dans ce sanctuaire de la résistance que sheikh Abbas al-Musawî, secrétaire général précédent du Hezbollah, assassiné par les sionistes en février 1994, faisait ses adieux aux combattants en route vers le combat et le martyre.
Mleeta, c’est un lieu pour se souvenir que la libération de la terre occupée a été faite par des hommes, porteurs d’une foi inébranlable en Dieu et en la justesse de la cause, qui leur donne la détermination de poursuivre jusqu’à la victoire. Mleeta, c’est le lieu pour se souvenir que toute parcelle de la terre libérée l’a été avec le sang des martyrs, tombés à Mleeta et dans la région, comme dans tout le sud Liban. Les guides de Mleeta peuvent raconter des centaines d’histoires, expliquer les détails de la vie de la résistance, mais aussi la symbolique de telle ou telle construction, tel ou tel parcours.
De la place principale du site, on se dirige vers la « fosse », le trou où s’enfonce Israël, l’ennemi sioniste. Cette « fosse », c’est un affaissement réel du sol suite aux bombardements ininterrompus de la machine de guerre israélienne. Dans cette fosse, des chars et des armes israéliennes, abandonnés ou détruits lors de la guerre de libération et de la guerre de juillet-août 2006. Mais aussi un mur, du genre « made by Israel » qui symbolise comment l’entité sioniste s’enferme à l’intérieur d’un mur pour s’anéantir progressivement. De côté, sur un panneau, sont sculptés, côte à côté, la signature du dirigeant de la résistance islamique, Imad Mughnieh, assassiné par les sionistes en février 2008, et l’épervier, symbole de Mleeta. Un char sioniste, au fond de la fosse, a le canon noué. C’est le message de la résistance à l’armée sioniste et au monde : ce canon qu’Israël a voulu invincible, la résistance a réussi non seulement à le faire taire, mais à le tordre.
Puis, c’est le « parcours » des combattants, un chemin étroit dans le bois, parsemé de dizaines de situations, de part et d’autre du chemin : là la reproduction de soins aux blessés, ici, un combattant en prière, là ce sont des armes, ou des fortifications, avant de parvenir à une niche fortifiée, où se trouvent le portrait de sayyid Abbas al-Musawî, des exemplaires du Coran et de livres d’invocations, des tapis de prière, un téléphone et un fusil. C’est là où sayyid Abbas priait, récitait les invocations et encourageait les combattants.
Plus loin, c’est la « cave », le tunnel creusé et fortifié par les combattants. Un travail gigantesque ! Ce qu’il faut rappeler, c’est le froid et la neige qui couvrait ce lieu pendant plusieurs mois de l’année, ce sont les conditions pénibles dans lesquelles vivaient les combattants, abandonnant leurs foyers et leurs familles, pour se consacrer à la lutte contre l’ennemi, et tout au long de ce « parcours », et dans la « cave », nous ne pouvons que penser à leur abnégation et à leur sacrifice, d’autant que la résistance, à cette époque (soit avant 2000) n’était pas si populaire et qu’une large partie de l’opinion publique libanaise n’y croyait pas. Des milliers de résistants traversaient à pied, et parfois en moto, les bois, les vallées et les collines, pour transporter les armes, porter l’eau, les vivres, les outils et toutes sortes de matériels, et ce, dans le silence le plus total, par crainte que l’ennemi ne découvre la base. Mleeta, et la résistance, c’est aussi tout cela.
Au sortir du tunnel, c’est la vue surplombant toute la région libérée en 1985 par la résistance. L’épervier est au rendez-vous, survolant le site et les vallées voisines. Deux drapeaux sont hissés, et que l’on voit de loin : le drapeau du Hezbollah aux côtés de celui du Liban. La suite du parcours, la « ligne de feu », ce sont les armes de la résistance, les charges explosives, les batteries de fusées, l’artillerie, placées dans les bois, avec des panneaux explicatifs. Il est de tradition, chez le Hezbollah, de n’exposer au public que les armes qui, d’une part, ont été remplacées par de plus puissantes, et d’autre part, se trouvent en larges quantités. De quoi comprendre que le site de Mleeta représente effectivement une phase de la résistance, illustrée dans « la place de la libération » : les armes qui y sont exposées ont servi à défendre le Liban lors de la guerre israélienne en 2006.
C’est Mleeta, le musée de la résistance, un des premiers que prévoit le Hezbollah ! Un téléférique est prévu pour relier le site à celui de Sujud, où les Israéliens avaient fortifié une de leurs principales bases, assailli et finalement détruit par les combattants, quelques jours avant la libération, et séparée de Mleeta par une profonde vallée. Sujud, symbole de la défaite israélienne !
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