L’empoisonnement de Yasser Arafat confirmé
mardi 3 juillet 2012 - 19h:16
Al Jazeera
Neuf mois d’une enquête commandée par Al Jazeera ont mis en
évidence du polonium radioactif sur les dernières affaires personnelles
ayant appartenu au défunt dirigeant palestinien.
Yasser Arafat est encore aujourd’hui une figure emblématique et extrêmement populaire de la cause palestinienne
C’était une scène sur laquelle le monde a eu les yeux
fixés pendant des semaines : Yasser Arafat malade, d’abord assiégé par
les chars israéliens dans son quartier de Ramallah, puis partant pour
Paris où il passa ses derniers jours soumis à toute une série de tests
médicaux dans un hôpital militaire français.
Huit ans après sa mort, ce qui a tué le vieux dirigeant
palestinien restait à élucider. Les tests effectués à Paris n’avaient
pas permis de trouver de traces évidentes de poison. Les rumeurs ont
abondé au sujet de ce qui aurait pu le tuer - un cancer, une maladie du
foie, même des allégations selon lesquelles il était infecté par le VIH.
Une enquête de neuf mois menée par Al-Jazeera a révélé
qu’aucune de ces rumeurs n’était fondée : Arafat était en bonne santé
jusqu’au moment où il tomba subitement et très gravement malade le 12
octobre 2004.
Plus important encore, les tests révèlent que les
derniers effets personnels d’Arafat - ses vêtements, sa brosse à dents,
même son keffieh emblématique - contenaient des niveaux anormaux de
polonium, un élément rare et hautement radioactif. Les effets personnels
de Yasser Arafat, analysés à l’Institut de Radiophysique à Lausanne en
Suisse, étaient diversement marqués avec sang, de la sueur, de la salive
et de l’urine. Les tests effectués sur ces échantillons ont révélé un
haut niveau de polonium à l’intérieur de son corps quand il est décédé.
« Je peux vous confirmer que nous avons mesuré une
quantité inexpliquée et élevée de polonium-210 dans les effets
personnels de M. Arafat qui contenaient des traces de fluides
biologiques, » a déclaré le Dr François Bochud, le directeur de
l’institut.
Du polonium artificiel
L’institut avait déjà étudié les effets personnels
d’Arafat fournis par sa veuve. Les médecins, n’ayant pas trouvé de
traces de métaux lourds ou de poisons classiques, tournèrent alors leur
attention vers des éléments plus discrets, dont le polonium.
C’est un élément hautement radioactif utilisé entre
autres cas, pour produire de l’électricité dans les vaisseaux spatiaux.
Marie Curie a découvert le polonium en 1898 et sa fille Irène fut parmi
les premières personnes qu’il a tué : elle est morte de leucémie
plusieurs années après une exposition accidentelle au polonium dans son
laboratoire.
Au moins deux personnes liées au programme nucléaire
israélien seraient également mortes après une exposition à cet élément,
selon la littérature limitée sur le sujet.
Mais la victime la plus célèbre du polonium fut
Alexandre Litvinenko, l’espion russe devenu dissident qui est mort à
Londres en 2006 après une longue maladie. Une enquête britannique a
révélé qu’il avait été empoisonné avec du polonium versé dans son thé
dans un restaurant de sushi.
Il y a peu de consensus scientifique sur les symptômes
d’empoisonnement au polonium, surtout parce qu’il y a trop peu de cas
enregistrés. Litvinenko a souffert d’une diarrhée sévère, d’une perte de
poids et de vomissements, maux qui faisaient tous partie des symptômes
constatés chez Arafat dans les jours et les semaines qui ont suivi la
déclaration de sa maladie.
Les analyses sur des animaux de laboratoire ont
identifié des symptômes similaires qui pouvaient durer plusieurs
semaines - en fonction de la dose - jusqu’à ce que le sujet en meurt.
« La cible principale des radiations ... est le tractus
gastro-intestinal [estomac, intestin grêle et gros intestin] », a conclu
une étude américaine menée en 1991, « par l’activation du ’centre du
vomissement’ dans le tronc cérébral. »
Les scientifiques à Lausanne ont trouvé des niveaux
élevés de polonium sur les effets d’Arafat - dans certains cas, dix fois
plus élevés que ceux trouvés sur des échantillons aléatoires testés
pour comparaison.
Les résultats du laboratoire ont été mesurés en millibecquerels (MBq), une unité utilisée pour mesurer la radioactivité.
Le polonium est présent dans l’atmosphère, mais les
niveaux naturels qui s’accumulent sur le sol sont négligeables et il
disparaît rapidement. Le polonium-210, l’isotope trouvé sur les affaires
personnelles d’Arafat, a une demi-vie de 138 jours, ce qui signifie que
la moitié de la substance se désintègre environ tous les quatre mois et
demi. « Dans le cas d’un empoisonnement similaire à l’affaire
Litvinenko, on peut s’attendre à ne trouver plus que des traces de
l’ordre de quelques [millibecquerels] l’année 2012, » a noté l’institut
dans son rapport communiqué à Al Jazeera.
Les effets personnels d’Arafat, en particulier ceux avec
des traces de fluides corporels, ont permis d’enregistrer des niveaux
beaucoup plus élevés de polonium. Sa brosse à dents avait des niveaux de
polonium à 54mBq ; l’urine sur son caleçon à 180mBq. (Un sous-vêtement
d’un autre homme, utilisé pour comparaison, n’a été mesuré qu’à 6.7mBq.)
D’autres tests effectués sur une période de trois mois,
de mars jusqu’à juin, ont amené à la conclusion que l’essentiel du
polonium - entre 60 et 80 pour cent, en fonction de l’échantillon -
était artificiel et ne pouvait provenir de sources naturelles.
Consultez également :
La vraie tragédie : qui a tué Arafat et pourquoi ? - 30 juillet 2009
Des médecins rouvrent l’enquête sur la mort de Yasser Arafat - 5 avril 2009
Révélations sur l’assassinat d’Arafat sur ordre de Sharon - 31 décembre 2006
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Révélations sur l’assassinat d’Arafat sur ordre de Sharon - 31 décembre 2006
3 juillet 2012 - Al-Jazeera - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.aljazeera.com/programmes...
Traduction : Info-Palestine.net
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