05 février 2010

Abbas : "je soutiens le mur égyptien"

Mahmoud Abbas : « Je soutiens le mur égyptien »

vendredi 5 février 2010 - 11h:40

Seumas Milne
The Guardian


Interview exclusive : Le Président palestinien fait allusion à des pourparlers avec médiateurs pour redémarrer le processus de paix moribond.
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Abbas, c’est la collaboration avec l’occupant, un bilan catastrophique, l’absence complète de perspectives politiques pour la résistance palestinienne, et une popularité en dégringolade...

Mahmoud Abbas a insisté qu’il ne permettrait aucun retour à une résistance palestinienne armée et a appelé Israël à geler la construction des colonies pendant trois mois pour permettre le retour à des discussions de paix.

La poursuite de la colonisation de la Cisjordanie par Israël conduit à une « solution à un État », a dit le président palestinien Mahmoud Abbas au Guardian, tout en indiquant qu’il a l’assurance d’accepter cette semaine une proposition étasunienne de« discussions locales » avec Israël via des médiateurs étasuniens.

Lors d’une interview exclusive, le président de l’Autorité Palestinienne a aussi insisté sur le fait qu’il ne permettrait aucun retour à une résistance armée ; a proposé des négociations directes avec Israël en échange d’un gel complet de trois mois de la colonisation ; a déclaré qu’il avait été proche d’un accord global avec l’ancien leader Ehoud Olmert, qui allait plus loin que tout ce qu’avait négocié Yasser Arafat sous la présidence de Bill Clinton ; et a défendu la construction par l’Égypte d’un mur souterrain pour empêcher la contrebande dans la bande de Gaza contrôlée par Hamas.

Le président de l’Autorité Palestinienne a été sous intense pression US pour ouvrir des négociations de paix avec le gouvernement israélien de Benjamin Netanyahou, mais a jusqu’à présent refusé de le faire à moins qu’Israël gèle toute construction de colonies dans les territoires palestiniens occupés, comme l’avait demandé le président américain, Barak Obama, selon les exigences de la feuille de route de 2002. Israël n’a accepté qu’un arrêt partiel de la construction de colonies pendant 10 mois.

Le mois dernier, Obama a concédé que les USA avaient échoué à parvenir « au genre de percée que nous voulions » au Moyen-Orient, et n’auraient peut-être pas suscité des attentes aussi élevées s’ils avaient anticipé les problèmes politiques.

Parlant à Londres après avoir rencontré Gordon Brown et le secrétaire aux affaires étrangères David Miliband, le leader palestinien a dit qu’il ne savait pas pourquoi les Américains avaient reculé sur leur demande d’un gel complet. Il consulterait les alliés arabes avant de répondre jeudi à l’appel à des discussions informelles de l’envoyé américain pour le Moyen-Orient George Mitchell.

« S’il y a un contenu quelconque dans la réponse du côté israélien — par exemple, s’ils acceptent le cadre d’une solution à deux Etats basé sur les frontières de 1967 et une fin de l’occupation, avec un calendrier et des mécanismes — alors il y aura un progrès », a dit Abbas.

Israël est pressé par les USA de répondre par des mesures établissant la confiance, dont une fin des incursions militaires, le démantèlement de check-points et la libération de prisonniers, si des pourparlers indirects ont lieu.

Abbas a aussi dit qu’il serait prêt à reprendre des négociations de paix face à face si Israël gelait toute construction de colonies pendant trois mois et acceptait les frontières de 1967 comme base pour des échanges de terres. « Ce ne sont pas des pré-conditions, mais les exigences de la feuille de route. S’ils n’y sont pas prêts, c’est qu’ils ne veulent pas de solution politique. »

L’autorité palestinienne et l’OLP soutiennent la solution à deux Etats, a dit Abbas. Mais ce que fait Israël maintenant en Cisjordanie, en terme d’occupation continue, d’extension des colonies et de confiscation de la terre palestinienne, « mène à une solution à un État, que nous rejetons ».

Abbas a déclaré que les négociations avec Olmert pendant les préparatifs de la guerre de Gaza avaient été plus loin que celles tenues en janvier 2001 à Taba entre Arafat et Ehoud Barak, et comprenait « des échanges frontaliers, Jérusalem et le retour de certains réfugiés », mais le gouvernement Netanyahou a refusé ce qui avait été accepté comme base pour une négociation ultérieure.

Le leader palestinien est sous pression, à la fois de son rival islamiste Hamas et à l’intérieur de son propre mouvement Fatah, sur les concessions aux USA et à Israël et sur l’incapacité apparente de sa direction à fournir des progrès tangibles vers les objectifs nationaux palestiniens de fin de l’occupation israélienne, de souveraineté et de retour des réfugiés Palestiniens.

« Il n’y aura pas de retour à la lutte armée », a dit Abbas. « Ceci détruirait notre territoire et notre pays ». Hamas lui-même, a-t-il argumenté, « ne résiste pas » — une référence au cessez-le-feu effectif de l’organisation depuis janvier de l’an dernier — « et maintenant il parle de paix et de trêve avec Israël ».

Mais si Israël continuait à résister à la fin de l’occupation, il démissionnerait et refuserait de se présenter à de nouvelles élections : « Je devrais dire à notre peuple qu’il n’y a pas d’espoir et pas d’utilité à mon maintien en fonction ». Les quatre années d’Abbas comme président élu de l’AP ont expiré il y a un an, mais le mois dernier l’OLP a promongé son terme jusqu’à ce que de nouvelles élections soient tenues.

Le leader de l’AP a défendu les mesures énergiques de ses services de sécurité sur les militants de Hamas en Cisjordanie, en insistant sur : « nous ne voulons emprisonner aucun membre politique de Hamas, mais seulement les gens qui provoquent la situation sécuritaire, même ceux du Fatah ».

Il a aussi démenti les rapports publiés dans Le Guardian selon lesquels la CIA avait travaillé étroitement avec des éléments de l’appareil sécuritaire de l’AP impliqués dans l’arrestation et la torture possible de sympathisants de Hamas. Le rôle américain a été restreint à l’entraînement et à la mise à niveau des forces de sécurité dans le cadre d’un effort international plus large, a-t-il dit.

L’AP était prête à tenir de nouvelles élections dans les territoires palestiniens, gagnées par Hamas en 2006, si l’organisation islamiste signe l’accord de réconciliation élaboré par le gouvernement égyptien, a dit Abbas. Il a blâmé « quelqu’un d’extérieur » — nom de code pour l’Iran — pour le refus par Hamas de le faire.

Le président palestinien a aussi défendu la décision de l’Égypte de construire un mur souterrain pour empêcher les tunnels de contrebande sous la frontière sud de la bande de Gaza soumise au blocus. « Je soutiens le mur [égyptien] », a dit Abbas. « C’est le droit souverain des Égyptiens dans leur propre pays. Les fournitures légitimes devraient être amenées par les points de passage légaux ».

Titre original : « Mahmoud Abbas : Israel’s West Bank occupation leading to one-state solution »

31 janvier 2010 - The Guardian - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.guardian.co.uk/world/201...
Traduction de l’anglais : JP. Bouché

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