De l'espionnage israélien aux Etats-Unis
Un article de Xavière Jardez
Aucun pays n’a connu, de tout temps, de la part des Américains, autant de largesses, d’indulgence ou de protection qu’Israël dans le cadre de leur « relation spéciale » : dernièrement, dans l’espoir d’atténuer l’intransigeance d’Israël sur la colonisation de la Cisjordanie ou de Jérusalem Est, de raviver les négociations de paix moribondes, les Etats-Unis ne lui ont-ils pas offert de juteux contrats d’armement*? Et, de cette relation spéciale, est née une guerre d’espionnage dont les Etats-Unis sont la victime.
Jonathan Jay Pollard, analyste civil des services de renseignements de la Marine, qui a reconnu avoir espionné pour Israël, a été condamné à perpétuité en 1987. Ian Williams, dans un article de juillet/août 1993 dans le Washington Post, écrivait que « même si Pollard a dit avoir été motivé par la sécurité d’Israël, il n’empêche qu’il a été grassement payé (et l’ai toujours) par le gouvernement israélien. Ses protecteurs lui ont aussi offert des cadeaux et des voyages pour lui et sa femme en Europe. La sévérité de la sentence est fondée sur le témoignage non public de l’ancien Secrétaire à la Défense, Caspar Weinberger, qui a déclaré que Pollard avait eu de la chance car il aurait mérité trois condamnations à vie. Pollard a fourni aux services secrets israéliens plus de mille documents US classés secret défense comprenant des centaines de pages, soit au total quelque 100 mètres cubes de papier ».
« Selon Seymour Hersch, journaliste d’investigation, Pollard a vendu à Israël des informations vitales sur les cibles nucléaires de l’Union Soviétique (en fait le plan d’attaque US de l’Union Soviétique). Des sources de la Défense US suggèrent que ce qui a causé le plus de colère au Pentagone et à travers la communauté du renseignement aux Etats-Unis était que ces informations fournies par Pollard mettaient en danger les agents se trouvant en Union Soviétique et ailleurs. Les services de renseignements US – de l’avis même du directeur de la CIA de l’époque, Bill Casey - ont conclu que les Israéliens les avaient troquées avec l’Union Soviétique » pour obtenir des Soviétiques la levée des restrictions en matière de voyage des Juifs de ce pays pour qu’ils émigrent en Israël.
Une « taupe » haut placée
Jusqu’en 1998, Israël a démenti publiquement que Pollard fut un espion à sa solde bien qu’il lui ait accordé la nationalité en 1995. Il avait d’ailleurs tenté d’obtenir sa grâce mais les protestations massives de la communauté du renseignement et de la défense américaine avaient fait échoué la tentative. De même que la menace de démissions aux plus hauts échelons du renseignement avait torpillé les efforts de Bill Clinton pour échanger Pollard contre des concessions des sionistes « dans le processus de paix ». Une nouvelle campagne est d’ailleurs à l’œuvre pour libérer Pollard initiée par trente députés démocrates et les principales organisations juives des Etats-Unis, dont B’nai B’irth International, Zionist Organization of America, Religious Action Center of Reform Judaism, Agudath Israel, l’ancien candidat à la présidence et Chrétien sioniste, Gary Bauer avec son organisation « American Values »
Le cas de Pollard est emblématique de cette lutte longue et incessante du contre-renseignement US pour se débarrasser de ce cauchemar dans la mesure où Pollard était loin d’être seul et le seul dans cette entreprise : une « taupe » haut placée devait obligatoirement lui fournir les éléments clés sur le lieu et la nature des documents à rechercher.
C’est ainsi que les services secrets ont poursuivi Ben Ami Kadish qui avait partagé le même intermédiaire israélien avec Pollard, qu’ils ont arrêtés Steve Rosen et Keith Weissman, deux dirigeants du puissant lobby pro-israélien, AIPAC, qu’ils ont écouté les conversations de Jane Harman avec un agent israélien qui promettait d’intervenir dans le cas de Rosen et Weissman.
Piégé par agent du FBI
se faisant passer pour un agent du Mossad
Et, depuis décembre 2009, un nouveau front a été ouvert dans cette guerre souterraine avec l’arrestation de Stewart David Nozette, un scientifique ayant travaillé pour le Pentagone, qui avait accès aux secrets nucléaires les mieux gardés et était en tête dans la recherche de l’eau sur la lune. Il a occupé de hautes fonctions au Département de l’Energie, de la Défense, à la NASA et a été membre du Conseil national de l’Espace de la Maison Blanche sous Bush père.
En d’autres termes, il n’était pas quelque médiocre quidam désireux de vendre son pays pour des espèces : il était l’un des grands, le principal contributeur à la réalisation du radar biostatique Clementine qui permet aux scientifiques US de découvrir l’eau sur la lune, une sorte de Oppenheimer dont l’apport particulier au programme spatial US et à ses applications militaires lui avait valu une accréditation sur le plan de la sécurité que peu ont obtenue.
En fait, Nozette a été piégé par un agent du FBI ou d’un autre service posant comme agent du Mossad. De 1998 à 2008, il a occupé les fonctions de consultant dans « une société aérospatiale entièrement détenue par le gouvernement israélien » au sein de laquelle, une fois par mois, des représentants de la compagnie lui soumettaient des questions ou des tâches. Il y répondait contre paiements réguliers à hauteur de 250 000 dollars. Il s’était, aussi, enquis de la possibilité d’obtenir un passeport israélien et du droit de retour.
Pillage des découvertes technologiques
En 2007, le FBI a fait une descente dans les locaux d’une association non lucrative qu’il avait fondée, l’Alliance pour la Compétitivité Technologique (ACT) sous prétexte qu’ayant obtenu des contrats du gouvernement fédéral, il avait escroqué ce dernier en facturant des prix excessifs.
La réalité est que le FBI supputait, depuis quelque temps, que ACT transmettait des secrets à Tel Aviv. En effet, ACT dont l’objet social était le transfert de technologie, favorisait les activités israéliennes en pillant les dernières découvertes technologiques américaines, particulièrement dans le domaine militaire, à tel point que la Cour des Comptes (General Accounting Office) les avait qualifiées «d’opérations d’espionnage les plus agressives à l’encontre des Etats-Unis de n’importe quel allié américain ». ACT avait signé des contrats avec le Laboratoire de Recherche de la Marine US à Washington, l’Agence de Projets de Recherche Avancée de la Défense à Arlington, le Centre de Vol Spatial Goddard de la Nasa à Greenbelt. Il ne fait aucun doute que des données essentielles, vitales, sur ces projets ont nourri le Mossad.
La nature et l’étendue de l’espionnage israélien aux Etats-Unis ne sont pas un sujet que la presse ordinaire, aux Etats-Unis ou en Europe, s’aventurent à explorer. Cependant, quand cela arrive, les résultats sont déroutants : la série en quatre parties sur l’espionnage israélien aux Etats-Unis, de Carl Cameron, sur Fox News, en décembre 2001 nous apprend que les Israéliens avaient suivi les terroristes du 11 septembre, connaissaient leurs plans mais n’avaient pas pensé à en informer les Américains. Et, il y avait aussi ceux qui dansaient de joie à la vue des Tours Jumelles en flammes……
* Un nouveau système de défense est développé par Israël, soutenu par les Etats-Unis, sous le nom de « David’s Sling » (la Sarbacane de David), pour protéger l’Etat hébreu contre une attaque de missiles s’ajoutant à un approvisionnement en équipement militaire massif. Ce dernier comprend la fourniture de la dernière génération de 20 avions de combat F-35 entièrement financés par le Pentagone, pour une valeur de $ 2,75 milliards y compris une aide de $1.5 milliards pour la fabrication par la défense israélienne de pièces détachées pour les F.35.L’administration Obama a aussi déboursé 422.7 millions de $ pour le système Iron Dome construit par Israël et l’expansion de la production du système Arrow 3 dont le coût sur dix ans s’est élevé à 3milliards de $ payés par les Etats-Unis. N’est pas oubliée la vente à Israël du carburant pour les troupes terrestre, l’aviation pour un montant de 2milliards de dollars « pour assurer à Israël la supériorité aérienne ».
Sources : Washington Report on Middle East Affaires, november 2010,19 - WRMA, december 2009
http://www.france-irak-actualite.com/article-de-l-espionnage-israelien-aux-etats-unis-63027088.html
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