10 février 2010

Algérie : grève des travailleurs de Rouiba


Grève des travailleurs de la zone industrielle de Rouiba

Alger républicain

Les ouvriers, généralement silencieux et rivés à leur sacrifice quotidien du labeur et de la préservation de leur outil de production, ont démontré qu’ils savent, lorsqu’il le faut, refuser ce qui est dangereux et malsain pour leur survie de même que pour celle de l’appareil de production.

Ils ont une fois de plus montré leur profond attachement aux acquis du développement. En défendant leurs propres intérêts ils défendent en même temps les fleurons de l’industrie algérienne tel leur complexe de production de camions d’autobus et de matériels roulants. Ils tiennent à en assurer la continuité, le développement et l’expansion face aux ultra-libéraux qui s’acharnent depuis plus de deux décennies à le casser .

Tout a commencé lorsque les travailleurs ont décidé spontanément de marquer leur opposition aux conclusions de la dernière « tripartite » qui a réuni le 3 décembre dernier gouvernement, UGTA et patronat. Cette tripartite n’a apporté aucune réponse à leurs nombreuses revendications salariales et aux autres problèmes posés, à ce jour non résolus : chute de leur pouvoir d’achat à un niveau inférieur à celui de 1985, un niveau qui ne leur permet plus de vivre décemment, de manger correctement et d’éduquer leurs enfants, retraites misérables après toute une vie de dure labeur, absence de plans de développement de leurs entreprises ouvrant des perspectives durables dans une situation où les caisses de l’Etat débordent de devises stérilisées, etc.

La bourgeoisie et le gouvernement, appuyés par les hauts responsables de l’UGTA, syndicat maison aux ordres de la grande bourgeoisie compradore d’Etat et du patronat, n’ont pas seulement ignoré les revendications et le mécontentement des travailleurs. Plus grave, ils ont donné leur feu vert au lancement d’une attaque en règle contre le régime des retraites pour réduire encore plus le montant des pensions et allonger la durée d’activité requise pour en bénéficier. En réponse à un tel mépris, les ouvriers, cadres et techniciens de la SNVI ont décidé de se faire entendre autrement.

Un rassemblement massif a eu lieu à l’intérieur du complexe de production des véhicules industriels. Des milliers de travailleurs se sont regroupés sur l’immense terre plein d’entrée de l’entreprise. Ainsi, organisés seuls, ils ont pris la décision de dire tout haut leurs revendications à travers leur mouvement de protestation. Ils ne comptent nullement sur le soutien du syndicat UGTA. Au contraire, ils dénoncent ses dirigeants, car ils estiment que ces derniers ne sont que des avocats patentés des positions du gouvernement, des positions aussi éloignées de leurs intérêts que de ceux de l’entreprise.

Les travailleurs protestent contre le caractère purement symbolique de l’augmentation du salaire national minimum garanti (SNMG) que cette tripartite a décidé de porter de 12000 à 15000 dinars à partir du 1er janvier de cette année. A première vue cette augmentation de 25% paraît importante. En réalité, l’article 87 bis du code du travail, introduit de façon scélérate par le pouvoir en 1997 en application des injonctions du FMI en limite sérieusement les effets car il intègre dans ce salaire les primes et indemnités qui s’ajoutent au salaire de base. Dans les faits peu de travailleurs du secteur public sont concernés par cette décision tant que que la composition du salaire minimum n’est pas réduite au seul salaire de base avec l’abrogation de cet article. De plus les travailleurs dénoncent à juste raison le fait qu’une partie importante de cette augmentation du SNMG sera en réalité absorbée par un barême injuste de l’impôt sur le revenu global (IRG), comme toute augmentation salariale ou même celle des pensions de retraite.

Les travailleurs rejettent la décision de cette tripartite des exploiteurs, grands affairistes et profiteurs du régime de remettre en cause le principe du départ à la retraite proportionnelle, anticipée, et sans condition d’âge pour tout salarié travailleur ayant déjà accompli 32 ans d’activité. Ce refus traduit leur crainte légitime face au plan de révision du régime des retraites. Concocté dans le plus grand secret, et avec la complicité des responsables de l’UGTA, par un pouvoir foncièrement hostile à leurs aspirations, revendication et intérêts, ce plan consiste, selon des « indiscrétions », à allonger de 32 à 40 ans la durée d’activité ouvrant droit à une retraite complète et à retenir comme base de calcul du montant de la pension de retraite le salaire des 10 ou même 15 dernières années de travail et non plus celui des cinq dernières années comme le stipule la loi encore en vigueur.
Les travailleurs qui accomplissent leur labeur dans des conditions éprouvantes, notamment les ouvriers de la forge et d’autres postes qui soumettent à une rude épreuve leur résistance physique, avaient espéré que les autorités se décident enfin à se pencher sur leurs dures conditions de travail par l’introduction de régimes spécifiques. Au lieu de cela la réponse de ce pouvoir peut se résumer ainsi : « Travaillez pour gagner moins et silence dans les rangs ».

Par ailleurs les travailleurs dénoncent le recours systématique par les responsables de l’entreprise aux contrats de sous-traitance avec des entreprises extérieures privées ou étrangères. Une bonne partie des pièces fabriquées dans le cadre de cette sous traitance est défectueuse et les ouvriers du complexe sont obligés de corriger les mal-façons quand les rectifications sont possibles. La SNVI subit en conséquence des coûts supplémentaires et des préjudices financiers qui peuvent être évités si les pièces étaient fabriquées directement chez elle comme c’était le cas avant. Qu’apporte donc la sous-traitance pour la SNVI ?


http://barricades.over-blog.com/

Aucun commentaire: